OuL On Cultive Des Plantes. La solution à ce puzzle est constituéè de 4 lettres et commence par la lettre C. Les solutions pour OU L ON CULTIVE DES PLANTES de mots fléchés et mots croisés. Découvrez les bonnes réponses, synonymes et autres types d'aide pour résoudre chaque puzzle. Planterla patate douce. La patate douce se plante en pleine terre, sur un sol léger, profond et frais, du début du mois d'avril jusqu'à la fin du mois de mai, dans les régions offrant des températures supérieures à 20°C.Le tubercule a besoin de soleil et de chaleur pour se développer. Les variétés d'ornement supportent, toutefois, des expositions semi-ombragées. Planteret cultiver. Rusticité peu rustique, -5°C, à réserver aux régions au climat doux. Exposition ombre claire à mi-ombragée. Sol drainant, moyennement riche. Acidité neutre à acide. Humidité normal. Utilisation potée, jardin d'hiver, véranda. Cytisus maderensis, reclassé dernièrement en Genista maderensis, le genêt de Madère Melinda🫶🏼 shared a post on Instagram: “C’est en se plantant qu’on devient cultivé 🍯” • Follow their account to see 58 posts. Cest d’ailleurs là qu’elle s’est initiée à une « nouvelle » technique de culture qui fait jaser les amateurs de jardinage d’intérieur, et qui consiste à cultiver ses plantes dans un substrat composé uniquement de paillis de cèdre, plutôt qu’en terre. « Fondéeen 2018 par Romain Rachline Borgeaud, la RB Dance Company a été mise à l’honneur lors de sa participation à l’émission « La France a un incroyable talent ». Une aventure qui a marqué son lancement officiel et lui a ouvert depuis de nombreuses perspectives. STORIES retrace l'histoire d’Icare, un jeune acteur dont les films connaissent un franc succès et qui, dans l . Aristote Traduction de Pascale Nau Livre 1 Chapitre 1 [980a] Tous les hommes ont un désir naturel de savoir, comme le témoigne l’ardeur avec laquelle on recherche les connaissances qui s’acquièrent par les sens. On les recherche, en effet, pour elles-mêmes et indépendamment de leur utilité, surtout celles que nous devons à la vue ; car ce n’est pas seulement dans un but pratique, c’est sans vouloir en faire aucun usage, que nous préférons en quelque manière cette sensation à toutes les autres ; cela vient de ce qu’elle nous fait connaÃtre plus d’objets, et nous découvre plus de différences. La nature a donné aux animaux la faculté de sentir mais chez les uns, la sensation ne produit pas la mémoire, chez les autres, elle la produit ; [980b] et c’est pour cela que ces derniers sont plus intelligents et plus capables d’apprendre que ceux qui n’ont pas la faculté de se ressouvenir. L’intelligence toute seule, sans la faculté d’apprendre, est le partage de ceux qui ne peuvent entendre les sons, comme les abeilles et les autres animaux de cette espèce ; la capacité d’apprendre est propre à tous ceux qui réunissent à la mémoire le sens de l’ouïe. Il y a des espèces qui sont réduites à l’imagination et à la mémoire, et qui sont peu capables d’expérience mais la race humaine s’élève jusqu’à l’art et jusqu’au raisonnement. C’est la mémoire qui dans l’homme produit l’expérience ; car plusieurs ressouvenirs d’une même chose constituent une expérience ; aussi l’expérience paraÃt-elle presque semblable à la science et à l’art ; [981a] et c’est de l’expérience que l’art et la science viennent aux hommes ; car, comme le dit Polus, et avec raison, c’est l’expérience qui fait l’art, et l’inexpérience le hasard. L’art commence, lorsque, de plusieurs données empruntées à l’expérience, se forme une seule notion générale, qui s’applique à tous les cas analogues. Savoir que Callias étant attaqué de telle maladie, tel remède lui a réussi, ainsi qu’à Socrate ; et de même à plusieurs autres pris individuellement, c’est de l’expérience ; mais savoir d’une manière générale que tous les individus compris dans une même classe et atteints de telle maladie, de la pituite, par exemple, ou de la bile ou de la fièvre, ont été guéris par le même remède, c’est de l’art. Pour la pratique, l’expérience ne diffère pas de l’art, et même les hommes d’expérience atteignent mieux leur but que ceux qui n’ont que la théorie sans l’expérience ; la raison en est que l’expérience est la connaissance du particulier, l’art celle du général, et que tout acte, tout fait tombe sur le particulier ; car ce n’est pas l’homme en général que guérit le médecin, mais l’homme particulier, mais Callias ou Socrate, ou tout autre individu semblable, qui se trouve être un homme ; si donc quelqu’un possède la théorie sans l’expérience, et connaÃt le général sans connaÃtre le particulier dont il se compose, celui-là se trompera souvent sur le remède à employer ; car ce qu’il s’agit de guérir, c’est l’individu. Cependant on croit que le savoir appartient plus à l’art qu’à l’expérience, et on tient pour plus sages les hommes d’art que les hommes d’expérience ; car la sagesse est toujours en raison du savoir. Et il en est ainsi parce que les premiers connaissent la cause, tandis que les seconds ne la connaissent pas ; les hommes d’expérience en effet, savent bien qu’une chose est, mais le pourquoi, ils l’ignorent ; les autres, au contraire, savent le pourquoi et la cause. Aussi on regarde en toute circonstance les architectes comme supérieurs en considération, en savoir et en sagesse aux simples manÅ“uvres, parce qu’ils savent la raison de ce qui se fait, tandis qu’il en est de ces derniers comme de ces espèces inanimées qui agissent sans savoir ce quelles font, par exemple, le feu qui brûle sans savoir qu’il brûle. [981b] Les êtres insensibles suivent l’impulsion de leur nature ; les manÅ“uvres suivent l’habitude ; aussi n’est-ce pas par rapport à la pratique qu’on préfère les architectes aux manÅ“uvres, mais par rapport à la théorie, et parce qu’ils ont la connaissance des causes. Enfin, ce qui distingue le savant, c’est qu’il peut enseigner ; et c’est pourquoi on pense qu’il y a plus de savoir dans l’art que dans l’expérience ; car l’homme d’art peut enseigner, l’homme d’expérience ne le peut pas. En outre, on n’attribue la sagesse à aucune des connaissances qui viennent par les sens, quoiqu’ils soient le vrai moyen de connaÃtre les choses particulières ; mais ils ne nous disent le pourquoi de rien ; par exemple, ils ne nous apprennent pas pourquoi le feu est chaud, mais seulement qu’il est chaud. D’après cela, il était naturel que le premier qui trouva, au-dessus des connaissances sensibles, communes à tous, un art quelconque, celui-là fut admiré des hommes, non seulement à cause de l’utilité de ses découvertes, mais aussi comme un sage supérieur au reste des hommes. Les arts s’étant multipliés, et les uns se rapportant aux nécessités, les autres aux agréments de la vie, les inventeurs de ceux-ci ont toujours été estimés plus sages que les inventeurs de ceux-là , parce que leurs découvertes ne se rapportaient pas à des besoins. Ces deux sortes d’arts une fois trouvés, on en découvrit d’autres qui n’avaient plus pour objet ni le plaisir ni la nécessité, et ce fut d’abord dans les pays où les hommes avaient du loisir. Ainsi, c’est en Égypte que les mathématiques se sont formées ; là , en effet, beaucoup de loisir était laissé à la caste des prêtres. Du reste, nous avons dit dans la Morale en quoi diffèrent l’art et la science et les autres degrés de connaissance ; ce que nous voulons établir ici, c’est que tout le monde entend par la sagesse à proprement parler la connaissance des premières causes et des principes ; de telle sorte que, comme nous l’avons déjà dit, sous le rapport de la sagesse, l’expérience est supérieure à la sensation, l’art à l’expérience, l’architecte au manÅ“uvre et la théorie à la pratique. [982a] Il est clair d’après cela que la sagesse par excellence, la philosophie est la science de certains principes et de certaines causes. Chapitre 2 Puisque telle est la science que nous cherchons, il nous faut examiner de quelles causes et de quels principes s’occupe cette science qui est la philosophie. C’est ce que nous pourrons éclaircir par les diverses manières dont on conçoit généralement le philosophe. On entend d’abord par ce mot l’homme qui sait tout, autant que cela est possible, sans savoir les détails. En second lieu, on appelle philosophe celui qui peut connaÃtre les choses difficiles et peu accessibles à la connaissance humaine ; or les connaissances sensibles étant communes à tous et par conséquent faciles, n’ont rien de philosophique. Ensuite on croit que plus un homme est exact et capable d’enseigner les causes, plus il est philosophe en toute science. En outre, la science qu’on étudie pour elle-même et dans le seul but de savoir, paraÃt plutôt la philosophie que celle qu’on apprend en vue de ses résultats. Enfin, de deux sciences, celle qui domine l’autre, est plutôt la philosophie que celle qui lui est subordonnée ; car le philosophe ne doit pas recevoir des lois, mais en donner ; et il ne doit pas obéir à un autre, mais c’est au moins sage à lui obéir. Telle est la nature et le nombre des idées que nous nous formons de la philosophie et du philosophe. De tous ces caractères de la philosophie, celui qui consiste à savoir toutes choses, appartient surtout à l’homme qui possède le mieux la connaissance du général ; car celui-là sait ce qui en est de tous les sujets particuliers. Et puis les connaissances les plus générales sont peut-être les plus difficiles à acquérir ; car elles sont les plus éloignées des sensations. Ensuite, les sciences les plus exactes sont celles qui s’occupent le plus des principes. En effet, celles dont l’objet est plus simple sont plus exactes que celles dont l’objet est plus composé. L’arithmétique, par exemple, est plus exacte que la géométrie. D’ailleurs, la science la plus apte à enseigner est celle qui étudie les causes, car enseigner, c’est dire les causes de chaque chose. De plus, savoir uniquement pour savoir, appartient surtout à la science de ce qu’il y a de plus scientifique. En effet, celui qui veut apprendre dans le seul but d’apprendre, choisira sur toute autre la science par excellence, c’est-à -dire la science de ce qu’il y a de plus scientifique ; et ce qu’il y a de plus scientifique, [982b] ce sont les principes et les causes ; car c’est à l’aide des principes et par eux que nous connaissons les autres choses, et non pas les principes par les sujets particuliers. Enfin, la science souveraine, faite pour dominer toutes les autres, est celle qui connaÃt pourquoi il faut faire chaque chose ; or, ce pourquoi est le bien dans chaque chose, et, en général, c’est le bien absolu dans toute la nature. De tout ce que nous venons de dire, il résulte que le mot Philosophie dont nous avons recherché les diverses significations, se rapporte à une seule et même science. Une telle science s’élève aux principes et aux causes ; or, le bien, la raison des choses, est au nombre des causes. Et qu’elle n’a pas un but pratique, c’est ce qui est évident par l’exemple des premiers qui se sont occupés de philosophie. Ce fut, en effet, l’étonnement d’abord comme aujourd’hui, qui fit naÃtre parmi les hommes les recherches philosophiques. Entre les phénomènes qui les frappaient, leur curiosité se porta d’abord sur ce qui était le plus à leur portée ; puis, s’avançant ainsi peu à peu, ils en vinrent à se demander compte de plus grands phénomènes, comme des divers états de la lune, du soleil, des astres, et enfin de l’origine de l’univers. Or, douter et s’étonner, c’est reconnaÃtre son ignorance. Voilà pourquoi on peut dire en quelque manière que l’ami de la philosophie est aussi celui des mythes ; car la matière du mythe, c’est l’étonnant, le merveilleux. Si donc on a philosophé pour échapper à l’ignorance, il est clair qu’on a poursuivi la science pour savoir et sans aucun but d’utilité. Le fait en fait foi car tout ce qui regarde les besoins, le bien-être et la commodité de la vie était déjà trouvé, lorsqu’on entreprit un tel ordre de recherches. Il est donc évident que nous ne cherchons la philosophie dans aucun intérêt étranger ; et comme nous appelons homme libre celui qui s’appartient à lui-même et qui n’appartient pas à un autre, de même la philosophie est de toutes les sciences la seule libre ; car seule elle est à elle-même son propre but. Aussi, ne serait-ce pas sans quelque raison qu’on regarderait comme plus qu’humaine la possession de cette science ; car la nature de l’homme est esclave à beaucoup d’égards ; la divinité seule, pour parler comme Simonide, aurait ce privilège, et il ne convient pas à l’homme de ne pas se borner à la science qui est à son usage. Si donc les poètes disent vrai, et si la nature divine doit être envieuse, [983a] c’est surtout au sujet de cette prétention, et tous les téméraires qui la partagent, en portent la peine. Mais la divinité ne peut connaÃtre l’envie ; les poètes, comme dit le proverbe, sont souvent menteurs, et il n’y a pas de science à laquelle il faille attacher plus de prix. Car la plus divine est celle qu’on doit priser le plus ; or, celle-ci porte seule ce caractère à un double titre. En effet, une science qui appartiendrait à Dieu, et qui s’occuperait de choses divines, serait sans contredit une science divine et seule, celle dont nous parlons satisfait à ces deux conditions. D’une part, Dieu est reconnu de tout le monde comme le principe même des causes ; et de l’autre, la science des causes lui appartient exclusivement ou dans un degré supérieur. Ainsi toutes les sciences sont plus nécessaires que la philosophie, mais nulle n’est plus excellente. Et rien ne diffère plus que la possession de cette science et son début. On commence, ainsi que nous l’avons dit, par s’étonner que les choses soient de telle façon ; et comme on s’émerveille en présence des automates, quand on n’en connaÃt pas les ressorts, de même nous nous étonnons des révolutions du soleil et de l’incommensurabilité du diamètre ; car il semble étonnant à tout le monde qu’une quantité ne puisse être mesurée par une quantité si petite qu’elle soit. C’est, comme dit le proverbe, par le contraire et par le meilleur qu’il faut finir, comme il arrive dans le cas que nous venons de citer, lorsqu’enfin on est parvenu à s’en rendre compte car rien n’étonnerait plus un géomètre que si le diamètre devenait commensurable. Nous venons de déterminer la nature de la science que nous cherchons, le but de cette science et de tout notre travail. Chapitre 3 Il est évident qu’il faut acquérir la science des causes premières, puisque nous ne pensons savoir une chose que quand nous croyons en connaÃtre la première cause. Or, on distingue quatre sortes de causes, la première est l’essence et la forme propre de chaque chose ; car il faut pousser la recherche des causes aussi loin qu’il est possible, et c’est la raison dernière d’une chose qui en est le principe et la cause. La seconde cause est la matière et le sujet ; la troisième le principe du mouvement ; la quatrième, enfin, celle qui répond à la précédente, la raison et le bien des choses ; car la fin de tout phénomène et de tout mouvement, c’est le bien. Ces points de vue ont été suffisamment expliqués dans les livres de physique ; [983b] reprenons cependant les opinions des philosophes qui nous ont précédés dans l’étude des êtres et de la vérité. Il est évident qu’eux aussi reconnaissent certaines causes et certains principes cette revue peut donc nous être utile pour la recherche qui nous occupe. Car il arrivera ou que nous rencontrerons un ordre de causes que nous avions omis, ou que nous prendrons plus de confiance dans la classification que nous venons d’exposer. La plupart des premiers philosophes ont cherché dans la matière les principes de toutes choses. Car ce dont toute chose est, d’où provient toute génération et où aboutit toute destruction, l’essence restant la même et ne faisant que changer d’accidents, voilà ce qu’ils appellent l’élément et le principe des êtres ; et pour cette raison, ils pensent que rien ne naÃt et que rien ne périt, puisque cette nature première subsiste toujours. Nous ne disons pas d’une manière absolue que Socrate naÃt, lorsqu’il devient beau ou musicien, ni qu’il périt lorsqu’il perd ces manières d’être, attendu que le même Socrate, sujet de ces changements, n’en demeure pas moins ; il en est de même pour toutes les autres choses ; car il doit y avoir une certaine nature, unique ou multiple, d’où viennent toutes choses, celle-là subsistant la même. Quant au nombre et à l’espèce de ces déments, on ne s’accorde pas. Thalès, le fondateur de cette manière de philosopher, prend l’eau pour principe, et voilà pourquoi il a prétendu que la terre reposait sur l’eau, amené probablement à cette opinion parce qu’il avait observé que l’humide est l’aliment de tous les êtres, et que la chaleur elle-même vient de l’humide et en vit ; or, ce dont viennent les choses est leur principe. C’est de là qu’il tira sa doctrine, et aussi de ce que les germes de toutes choses sont de leur nature humides, et que l’eau est le principe des choses humides. Plusieurs pensent que dès la plus haute antiquité, bien avant notre époque, les premiers théologiens ont eu la même opinion sur la nature car ils avaient fait l’Océan et Téthys auteurs de tous les phénomènes de ce monde, et ils montrent les Dieux jurant par l’eau que les poètes appellent le Styx. [984a] En effet, ce qu’il y a de plus ancien est ce qu’il y a de plus saint ; et ce qu’il y a de plus saint, c’est le serment. Y a-t-il réellement un système physique dans cette vieille et antique opinion ? C’est ce dont on pourrait douter. Mais pour Thalès on dit que telle fut sa doctrine. Quant à Hippon, sa pensée n’est pas assez profonde pour qu’on puisse le placer parmi ces philosophes. Anaximène et Diogène prétendaient que l’air est antérieur à l’eau, et qu’il est le principe des corps simples ; ce principe est le feu, selon Hippase de Métaponte et Héraclite d’Éphèse. Empédocle reconnut quatre éléments, ajoutant la terre à ceux que nous avons nommés ; selon lui, ces éléments subsistent toujours et ne deviennent pas, mais le seul changement qu’ils subissent est celui de l’augmentation ou de la diminution, lorsqu’ils s’agrègent ou se séparent. Anaxagore de Clazomènes, qui naquit avant ce dernier, mais qui écrivit après lui, suppose qu’il y a une infinité de principes il prétend que toutes les choses formées de parties semblables comme le feu et l’eau, ne naissent et ne périssent qu’en ce sens que leurs parties se réunissent ou se séparent, mais que du reste rien ne naÃt ni ne périt, et que tout subsiste éternellement. De tout cela on pourrait conclure que jusqu’alors on n’avait considéré les choses que sous le point de vue de la matière. Quand on en fut là , la chose elle-même força d’avancer encore, et imposa de nouvelles recherches. Si tout ce qui naÃt doit périr et vient d’un principe unique ou multiple, pourquoi en est-il ainsi et quelle en est la cause ? Car ce n’est pas le sujet qui peut se changer lui-même ; l’airain, par exemple, et le bois ne se changent pas eux-mêmes, et ne se font pas l’un statue, l’autre lit, mais il y a quelque autre cause à ce changement. Or, chercher cette cause, c’est chercher un autre principe, le principe du mouvement, comme nous disions. Ceux des anciens qui dans l’origine touchèrent ce sujet, et qui avaient pour système l’unité de substance, ne se tourmentèrent pas de cette difficulté ; mais quelques-uns de ces partisans de l’unité, inférieurs en quelque sorte à cette question, disent que l’unité et tout ce qui est, réel n’admet pas de mouvement, ni pour la génération et la corruption, ni même pour tout autre changement. [984b] Aussi, de tous ceux qui partent de l’unité du tout, pas un ne s’est occupé de ce point de vue, si ce n’est peut-être Parménide, et encore ne le fait-il qu’autant qu’à côté de son système de l’unité, il admet en quelque sorte deux principes. Mais ceux qui admettent la pluralité des principes, le chaud et le froid, par exemple, ou le feu et la terre, étaient plus à même d’arriver à cet ordre des recherches ; car ils attribuaient au feu la puissance motrice, à l’eau, à la terre et aux autres éléments de cette sorte, la qualité contraire. Après ces philosophes et de pareils principes, comme ces principes étaient insuffisants pour produire les choses, la vérité elle-même, comme nous l’avons déjà dit, força de recourir à un autre principe. En effet, il n’est guère vraisemblable que ni le feu, ni la terre, ni aucun autre élément de ce genre, soit la cause de l’ordre et de la beauté qui règnent dans le monde, éternellement chez certains êtres, passagèrement chez d’autres ; ni que ces philosophes aient eu une pareille pensée d’un autre côté, rapporter un tel résultat au hasard ou à la fortune n’eût pas été raisonnable. Aussi quand un homme vint dire qu’il y avait dans la nature, comme dans les animaux, une intelligence qui est la cause de l’arrangement et de l’ordre de l’univers, cet homme parut seul avoir conservé sa raison au milieu des folies de ses devanciers. Or, nous savons avec certitude qu’Anaxagore entra le premier dans ce point de vue ; avant lui Hermotime de Clazomènes paraÃt l’avoir soupçonné. Ces nouveaux philosophes érigèrent en même temps cette cause de l’ordre en principe des êtres, principe doué de la vertu d’imprimer le mouvement. On pourrait dire qu’avant eux, Hésiode avait entrevu cette vérité, Hésiode ou quiconque a mis dans les êtres comme principe l’amour ou le désir, par exemple Parménide. Celui-ci dit, en effet, dans sa théorie de la formation de l’univers Il fit l’amour le premier de tous les dieux. Hésiode dit de son côté Avant toutes choses était le chaos ; ensuite, La terre au vaste sein… Puis l’amour, le plus beau de tous les immortels. Comme s’ils avaient reconnu la nécessité d’une cause dans les êtres capable de donner le mouvement et le lien aux choses. Quant à la question de savoir à qui appartient la priorité, qu’il nous soit permis de la décider plus tard. Ensuite, comme à côté du bien dans la nature, on voyait aussi son contraire, non seulement de l’ordre et de la beauté, mais aussi du désordre et de la laideur, comme le mal paraissait même l’emporter sur le bien et le laid sur le beau, un autre philosophe introduisit l’amitié et la discorde, causes opposées de ces effets opposés. Car si l’on veut suivre de près Empédocle, et s’attacher au fond de sa pensée plutôt qu’à la manière presqu’enfantine dont il l’exprime, on trouvera que l’amitié est la cause du bien, et la discorde celle du mal ; de sorte que peut-être n’aurait-t-on pas tort de dire qu’Empédocle a parlé en quelque manière et a parlé le premier du bien et du mal comme principes, puisque le principe de tous les biens est le bien lui-même, et le mal le principe de tout ce qui est mauvais. Jusqu’ici nous avons vu ces philosophes reconnaÃtre deux des genres de causes déterminés par nous dans la Physique la matière et le principe du mouvement. Mais ils l’ont fait confusément et indistinctement, comme agissent dans les combats les soldats mal exercés. Ceux-ci frappent souvent de bons coups dans la mêlée, mais ils le font sans science. De même nos philosophes paraissent avoir parlé sans bien savoir ce qu’ils disaient, car l’usage qu’on les voit faire de leurs principes est nul ou peu s’en faut. Anaxagore se sert de l’intelligence comme d’une machine pour faire le monde, et quand il désespère de trouver la cause réelle d’un phénomène, il met en scène l’intelligence. Mais dans tout autre cas, il aime mieux donner aux faits une autre cause. [985a] Empédocle se sert davantage, mais d’une manière insuffisante encore, de ses principes, et dans leur emploi il ne s’accorde pas avec lui-même. Souvent chez lui, l’amitié sépare, la discorde réunit en effet, lorsque dans l’univers les éléments sont séparés par la discorde, toutes les particules de feu n’en sont pas moins unies en un tout, ainsi que celles de chacun des autres éléments ; et lorsque, au contraire, c’est l’amitié qui unit tous les éléments, il faut bien pour cela que les particules de chaque élément se divisent. Empédocle fut donc le premier des anciens qui employa en le divisant le principe du mouvement, et ne supposa plus une cause unique, mais deux causes différentes et opposées. Quant à la matière, il est le premier qui ait parlé des quatre éléments ; toutefois, il ne s’en sert pas comme s’ils étaient quatre, mais comme s’ils n’étaient que deux, à savoir, le feu tout seul, et en opposition au [985b] feu, la terre, l’air et l’eau, ne faisant qu’une seule et même nature. C’est là du moins ce que ses vers donnent à entendre. Voilà , selon nous, la nature et le nombre des principes d’Empédocle. Leucippe et son ami Démocrite disent que les éléments primitifs sont le plein et le vide, qu’ils appellent l’être et le non-être ; le plein ou le solide, c’est l’être ; le vide ou le rare, c’est le non-être ; c’est pourquoi ils disent que l’être n’existe pas plus que le non-être, parce que le corps n’existe pas plus que le vide telles sont, sous le point de vue de la matière, les causes des êtres. De même que ceux qui posent comme principe une substance unique, expliquent tout le reste par les modifications de cette substance – en donnant pour principe à ces modifications le rare et le dense – ainsi ces philosophes placent dans les différences les causes de toutes choses. Ces différences sont au nombre de trois la forme, l’ordre et la position. Ils disent, en effet, que les différences de l’être viennent de la configuration, de l’arrangement et de la tournure, Or, la configuration c’est la forme, l’arrangement l’ordre, et la tournure la position. Ainsi, A diffère de N par la forme, AN de NA par l’ordre, et Z de N par la position. Quant au mouvement, à ses lois et à sa cause, ils ont traité cette question avec beaucoup de négligence, comme les autres philosophes. Par conséquent, nos devanciers n’ont pas été plus loin sur ces deux genres de causes. Chapitre 4 Parmi eux et avant eux, ceux qu’on nomme Pythagoriciens, s’étant occupés des mathématiques, furent les premiers à les mettre en avant ; et nourris dans cette étude, ils pensèrent que les principes de cette science étaient les principes de tous les êtres. Comme, par nature, les nombres sont les premiers des êtres, et ils leur paraissaient avoir plus d’analogie avec les choses et les phénomènes – comme le feu, l’air ou l’eau, – que la modification des nombres semblait être la justice, une autre rame et intelligence, un autre propos, et à peu près ainsi de toutes les autres choses – ; comme ils voyaient de plus dans les nombres les modifications et les rapports de l’harmonie ; [986a] par ces motifs joints à ces deux premiers que la nature entière a été formée à la ressemblance des nombres, et que les nombres sont les premiers de tous les êtres, ils posèrent les éléments des nombres comme les éléments de tous les êtres, et le ciel tout entier comme une harmonie et un nombre. Tout ce qu’ils pouvaient montrer dans les nombres et dans la musique qui s’accordât avec les phénomènes du ciel, ses parties et toute son ordonnance, ils le recueillirent, et ils en composèrent un système ; et si quelque chose manquait, ils y suppléaient pour que le système fût bien d’accord et complet. Par exemple, comme la décade paraÃt être quelque chose de parfait et qui embrasse tous les nombres possibles, ils prétendent qu’il y a dix corps en mouvement dans le ciel, et comme il n’y en a que neuf de visibles, ils en supposent un dixième qu’ils appellent antichtone. Mais tout ceci a été déterminé ailleurs avec plus de soin. Si nous y revenons, c’est pour constater à leur égard comme pour les autres écoles, quels principes ils posent, et comment ces principes tombent sous notre classification. Or, ils paraissent penser que le nombre est principe des êtres sous le point de vue de la matière, en y comprenant les attributs et les manières d’être ; que les éléments du nombre sont le pair et l’impair ; que l’impair est fini, le pair infini ; que l’unité tient de ces deux éléments, car elle est à la fois pair et impair, et que le nombre vient de l’unité ; enfin que les nombres sont tout le ciel. D’autres pythagoriciens disent qu’il y a dix principes, dont voici la liste Fini et infini, Impair et pair, Unité et pluralité, Droit et gauche, Mâle et femelle, Repos et mouvement, Droit et courbe, Lumière et ténèbres, Bien et mal, Carré et toute figure à côtés inégaux. Alcméon de Crotone paraÃt avoir professé une doctrine semblable il la reçut des Pythagoriciens ou ceux-ci la reçurent de lui ; car l’époque où il florissait correspond à la vieillesse de Pythagore ; et son système se rapproche de celui de ces philosophes. Il dit que la plupart des choses humaines sont doubles, désignant par là leurs oppositions, mais, à la différence de ceux-ci, sans les déterminer, et prenant au hasard le blanc et le noir, le doux et l’amer, le bon et le mauvais, le petit et le grand. Il s’exprima ainsi d’une manière indéterminée sur tout le reste, [986b] tandis que les Pythagoriciens montrèrent quelles sont ces oppositions et combien il y en a. On peut donc tirer de ces deux systèmes que les contraires sont les principes des choses et de l’un deux quel est le nombre et la nature de ces principes. Maintenant comment est-il possible de les ramener à ceux que nous avons posés, c’est ce qu’eux-mêmes n’articulent pas clairement ; mais ils semblent les considérer sous le point de vue de la matière ; car ils disent que ces principes constituent le fonds dont se composent et sont formés les êtres. Nous en avons dit assez pour faire comprendre la pensée de ceux des anciens qui admettent la pluralité dans les éléments de la nature. Il en est d’autres qui ont considéré le tout comme étant un être unique, mais ils diffèrent et par le mérite de l’explication et par la manière de concevoir la nature de cette unité. Il n’est nullement de notre sujet, dans cette recherche des principes, de nous occuper d’eux ; car ils ne font pas comme quelques-uns des physiciens qui, ayant posé une substance unique, engendrent l’être de cette unité considérée sous le point de vue de la matière ; ils procèdent autrement les physiciens, en effet, ajoutent le mouvement pour engendrer l’univers ; ceux-ci prétendent que l’univers est immobile ; mais nous n’en dirons que ce qui se rapporte à notre sujet. L’unité de Parménide paraÃt avoir été une unité rationnelle, celle de Mélisse une unité matérielle, et c’est pourquoi l’un la donne comme finie, l’autre comme infinie. Xénophane qui le premier parla d’unité car Parménide passe pour son disciple, ne s’est pas expliqué d’une manière précise et paraÃt étranger au point de vue de l’un et l’autre de ses deux successeurs ; mais ayant considéré l’ensemble du inonde, il dit que l’unité est Dieu. Encore une fois, il faut négliger ces philosophes dans la recherche qui nous occupe – et deux, surtout, dont les idées sont un peu trop grossières, Xénophane et Mélisse. Parménide paraÃt avoir eu des vues plus profondes. Persuadé que, hors de l’être, le non-être n’est rien, il pense que l’être est nécessairement un, et qu’il n’y a rien autre chose que lui. C’est un point sur lequel nous nous sommes expliqués plus clairement dans la Physique. Mais forcé de se mettre d’accord avec les faits, et, en admettant l’unité par la raison, d’admettre aussi la pluralité par les sens, Parménide en revint à poser deux principes et deux causes, le chaud et le froid, par exemple le feu et la terre il rapporte [987a] l’un de ces deux principes, le chaud à l’être, et l’autre au non-être. Voici le résultat de ce que nous avons dit, et de tous les systèmes que nous avons parcourus jusqu’ici chez les premiers de ces philosophes, un principe corporel ; car l’eau, le feu et les autres choses de cette nature sont des corps, principe unique selon les uns, multiple selon les autres, mais toujours considéré sous le point de vue de la matière ; chez quelques-uns, d’abord ce principe, et à côté de ce principe, celui du mouvement, unique dans certains systèmes, double dans d’autres. Ainsi, jusqu’à l’école italique exclusivement, les anciens philosophes ont parlé de toutes ces choses d’une manière vague, et n’ont mis en usage, ainsi que nous l’avons dit, que deux sortes de principes, dont l’un, celui du mouvement, est regardé tantôt comme unique et tantôt comme double. Quant aux Pythagoriciens, comme les précédents, ils ont posé deux principes ; mais ils ont en outre introduit cette doctrine qui leur est propre, savoir que le fini, l’infini et l’unité, ne sont pas des qualités distinctes des sujets où ils se trouvent, comme le feu, la terre et tout autre principe semblable sont distincts de leurs qualités, mais qu’ils constituent l’essence même des choses auxquelles on les attribue ; de sorte que le nombre est l’essence de toutes choses. Ils se sont expliqués sur ces points de la manière que nous venons de dire ; de plus, ils ont commencé à s’occuper de l’essence des choses et ont proposé une définition. Cependant, leur essai fut un peu trop grossier. Ils la définissaient superficiellement. Pour eux, le premier objet auquel semblait convenir la définition donnée, ils le considéraient comme l’essence de la chose définie – comme si l’on pensait, par exemple, que le double est la même chose que le nombre deux, parce que c’est dans le nombre deux que se rencontre en premier lieu le caractère du double ; mais deux ou double ne sont pas la même chose, autrement l’unité sera multiple, comme il arrive dans le système Pythagoricien. Voilà ce qu’on peut tirer des premiers philosophes et de leurs successeurs. Chapitre 5 Après ces différentes philosophies, parut la philosophie de Platon, qui suivit en beaucoup de points ses devanciers, mais qui eut aussi ses points de doctrine particuliers, et alla plus loin que l’école italique. Dès sa jeunesse, Platon se familiarisa dans le commerce de Cratyle avec les opinions d’Héraclite, que toutes les choses sensibles sont dans un perpétuel écoulement, et qu’il n’y a pas de science de ces choses ; et dans la suite, il garda ces opinions. [987b] D’une autre part, Socrate s’étant occupé de morale, et non plus d’un système de physique, et ayant d’ailleurs cherché dans la morale ce qu’il y a d’universel, et porté le premier son attention sur les définitions, Platon qui le suivit et le continua fut amené à penser que les définitions devaient porter sur un ordre d’êtres à part et nullement sur les objets sensibles ; car comment une définition commune s’appliquerait-elle aux choses sensibles, livrées à un perpétuel changement ? Or, ces autres êtres, il les appela Idées, et dit que les choses sensibles existent en dehors des idées et sont nommées d’après elles ; car il pensait que toutes les choses d’une même classe tiennent leur nom commun des idées, en vertu de leur participation avec elles. Du reste, le mot Participation est le seul changement qu’il apporta ; les Pythagoriciens, en effet, disent que les êtres sont à l’imitation des nombres, Platon en participation avec les idées. Comment se fait maintenant cette participation ou cette imitation des idées ? C’est ce que celui-ci et ceux-là ont également négligé de rechercher. De plus, outre les choses sensibles et les idées, il reconnaÃt des êtres intermédiaires qui sont les choses mathématiques, différentes des choses sensibles en ce qu’elles sont éternelles et immuables, et des idées en ce qu’elles admettent un grand nombre de semblables, tandis que toute idée en elle-même a son existence à part. Voyant dans les idées les raisons des choses, il pensa que leurs éléments étaient les éléments de tous les êtres. Les principes dans ce système sont donc, sous le point de vue de la matière, le grand et le petit, et sous celui de l’essence, l’unité ; et en tant que formées de ces principes et participant de l’unité, les idées sont les nombres. [988a] Ainsi, en avançant que l’unité est l’essence des êtres et que rien autre chose que cette essence n’a le titre d’unité, Platon se rapprocha des pythagoriciens. Comme eux, il dit que les nombres sont les causes des choses et de leur essence ; mais faire une dualité de cet infini qu’ils regardaient comme un, et composer l’infini du grand et da petit, voilà ce qui lui est propre – avec cette supposition que les nombres existent en dehors des choses sensibles, tandis que les pythagoriciens disent que les nombres sont les choses mêmes, et ne donnent pas aux choses mathématiques un rang intermédiaire. Cette existence que Platon attribue à l’unité et au nombre en dehors des choses, à la différence des pythagoriciens, ainsi que l’introduction des idées, est due à ses recherches logiques car les premiers philosophes étaient étrangers à la dialectique ; et il fut conduit à faire une dyade de cette autre nature différente de l’unité, parce que lés nombres, à l’exception des nombres primordiaux, s’engendrent aisément de cette dyade, comme d’une sorte de matière. Cependant, les choses se passent autrement, et cela est contraire à la raison. Dans ce système, on fait avec la matière un grand nombre d’êtres, et l’idée n’engendre qu’une seule fois ; mais au vrai, d’une seule matière on ne fait qu’une seule table, tandis que celui qui apporte l’idée, tout en étant un lui-même, en fait un grand nombre. Il en est de même du mâle à l’égard de la femelle ; la femelle est fécondée par un seul accouplement, tandis que le mâle en féconde plusieurs or, cela est l’image de ce qui a lieu pour les principes dont nous parlons. C’est ainsi que Platon s’est prononcé sur ce qui fait l’objet de nos recherches il est clair, d’après ce que nous avons dit, qu’il ne met en usage que deux principes, celui de l’essence et celui de la matière ; car les idées sont pour les choses les causes de leur essence, comme l’unité l’est pour les idées Et quelle est la matière ou le sujet auquel s’appliquent les idées dans les choses sensibles et l’unité dans les idées ? C’est cette dyade, composée du grand et du petit de plus il attribua à l’un de ces deux éléments la cause du bien, à l’autre la cause du mal, de la même manière que l’ont fait dans leurs recherches quelques-uns des philosophes précédents, comme Empédocle et Anaxagore. Chapitre 6 Nous, venons de voir, brièvement et sommairement, il est vrai, quels sont ceux qui se sont occupés des principes et de la vérité, et comment ils l’ont fait cette revue rapide n’a pas laissé de nous faire reconnaÃtre, que de tous les philosophes qui ont traité de principe et de cause, pas un n’est sorti de la classification que nous avons établie dans la Physique, et que tous plus ou moins nettement l’ont entrevue. Les uns considèrent le principe sous le point de vue de la matière, soit qu’ils lui attribuent l’unité ou la pluralité, soit qu’ils le supposent corporel ou incorporel ; tels sont le grand et le petit de Platon, l’infini de l’école italique ; le feu, la terre, l’eau et l’air d’Empédocle ; l’infinité des homéoméries d’Anaxagore. Tous ont évidemment touché cet ordre de causes, et de même ceux qui ont choisi l’air, le feu ou l’eau, ou un élément plus dense que le feu et plus délié que l’air ; car telle est la nature que quelques-uns ont donnée à l’élément premier. Ceux-là donc n’ont atteint que le principe de la matière, quelques autres le principe du mouvement, comme ceux par exemple qui font un principe de l’amitié ou de la discorde, de l’intelligence ou de l’amour. Quant à la forme et à l’essence, nul n’en a traité clairement, mais ceux qui l’ont fait le mieux sont les partisans des idées. [988b] En effet, ils ne regardent pas les idées et les principes des idées, comme la matière des choses sensibles, ni comme le principe d’où leur vient le mouvement car ce seraient plutôt, selon eux, des causes d’immobilité et de repos ; mais c’est l’essence que les idées fournissent à chaque chose, comme l’unité la fournit aux idées. Quant à la fin en vue de laquelle se font les actes, les changements et les mouvements, ils mentionnent bien en quelque manière ce principe, mais ils ne le font pas dans cet esprit, ni dans le vrai sens de la chose ; car ceux qui mettent en avant l’intelligence et l’amitié, posent bien ces principes, comme quelque chose de bon, mais non comme un but en vue duquel tout être est ou devient ; ce sont plutôt des causes d’où leur vient le mouvement. Il eu est de même de ceux qui prétendent que l’unité ou l’être est cette même nature ; ils disent qu’elle est la cause de l’essence, mais ils ne disent pas qu’elle est la fin pour laquelle les choses sont et deviennent. De sorte qu’il leur arrive en quelque façon de parler à la fois et de ne pas parler du principe du bien ; car ils n’en parlent pas d’une manière spéciale, mais seulement par accident. Ainsi, que le nombre et la nature des causes ait été déterminé par nous avec exactitude, c’est ce que semblent témoigner tous ces philosophes dans l’impossibilité où ils sont d’indiquer aucun autre principe. Outre cela, il est clair qu’il faut, dans la recherche des principes, ou les considérer tous comme nous l’avons fait, ou adopter les vues de quelques-uns de ces philosophes. Exposons d’abord les difficultés que soulèvent les doctrines de nos devanciers et la question de la nature même des principes. Chapitre 7 Tous ceux qui ont prétendu que l’univers est un, et qui, dominés par le point de vue de la matière, ont voulu qu’il y ait une seule et même nature, et une nature corporelle et étendue, ceux-là sans contredit se trompent de plusieurs manières ; car ainsi, ils posent seulement les éléments des corps et non ceux des choses incorporelles, quoiqu’il existe de telles choses. Puis, quoiqu’ils entreprennent de dire les causes de la génération et de la corruption, et d’expliquer la formation des choses, ils suppriment le principe du mouvement. Ajoutez qu’ils ne font pas un principe de l’essence et de la forme ; et aussi, qu’ils donnent sans difficulté aux corps simples, à l’exception de la terre, un principe quelconque, sans avoir examiné comment ces corps peuvent naÃtre les uns des autres ; je parle du feu, de la terre, de l’eau et de l’air, lesquels naissent, en effet, les uns des autres, soit par réunion, soit par séparation. Or, cette distinction importe beaucoup pour la question de l’antériorité et de la postériorité des éléments. D’un côté, le plus élémentaire de tous semblerait être celui d’où naissent primitivement tous les autres par voie de réunion ; et ce caractère appartiendrait à celui des corps dont les parties seraient les plus petites et les plus déliées. C’est pourquoi tous ceux qui posent comme principe le feu, se prononceraient de la manière la plus conforme à cette vue. Tel est aussi le caractère que tous les autres s’accordent à assigner à l’élément des corps. Aussi, aucun philosophe, d’une époque plus récente, qui admet un seul élément, n’a jugé convenable de choisir la terre, sans doute à cause de la grandeur de ses parties, tandis que chacun des trois autres éléments a eu son partisan les uns se déclarent pour le feu, les autres pour l’eau, les autres pour l’air ; et pourtant pourquoi n’admettent-ils pas aussi bien la terre, comme font la plupart des hommes qui disent que tout est terre ? Hésiode lui-même dit que la terre est le premier des corps ; tellement ancienne et populaire se trouve être cette opinion. Dans ce point de vue, ni ceux qui adoptent à l’exclusion du feu un des éléments déjà nommés, ni ceux qui prennent un élément plus dense que l’air et plus délié que l’eau, n’auraient raison ; mais si ce qui est postérieur dans l’ordre de formation est antérieur dans l’ordre de la nature, et que, dans l’ordre de formation, le composé soit postérieur, l’eau sera tout au contraire antérieure à l’air et la terre à l’eau. Nous nous bornerons à cette observation sur ceux qui admettent un principe unique tel que nous l’avons énoncé. Il y en aurait autant à dire de ceux qui admettent plusieurs principes pareils, comme Empédocle qui dit qu’il y a quatre corps, matière des choses ; car sa doctrine donne lieu d’abord aux mêmes critiques, puis à quelques observations particulières. Nous voyons, en effet, ces éléments naÃtre les uns des autres, de sorte que le feu et la terre ne demeurent jamais le même corps nous avons traité de ce sujet dans la Physique. [989b] Quant à la cause qui fait mouvoir les choses, et à la question de savoir si elle est une ou double, on doit penser qu’Empédocle ne s’est prononcé ni tout-à -fait convenablement, ni d’une manière tout-à -fait déraisonnable. En somme, quand on admet sou système, on est forcé de rejeter tout changement, car le froid ne viendra pas du chaud ni le chaud du froid ; car quel serait le sujet qui éprouverait ces modifications contraires, et quelle serait la nature unique qui deviendrait feu et eau ? C’est ce qu’il ne dit pas. Pour Anaxagore, si on pense qu’il reconnaÃt deux éléments, on le pense d’après des raisons qu’il n’a pas lui-même clairement articulées, mais auxquelles il aurait été obligé de se rendre, si on les lui eût présentées. En effet, s’il est absurde de dire qu’à l’origine tout était mêlé, pour plusieurs motifs – entre autres parce qu’il faut que les éléments du mélange aient existé d’abord séparés et il n’est pas dans la nature des choses qu’un élément, quel qu’il soit, se mêle avec tout autre, quel qu’il soit. De plus, les qualités et les attributs seraient séparés de leur substance ; car ce qui peut être mêlé peut être séparé. Cependant, quand on vient à approfondir et à développer ce qu’il veut dire, on lui trouvera peut-être un sens peu commun. Car lorsque rien n’était séparé, il est clair qu’on ne pouvait rien affirmer de vrai de cette substance mixte. Par exemple, comme elle n’était ni blanche ni noire, ni d’aucune autre couleur, elle était de nécessité sans couleur ; autrement, elle aurait eu quelqu’une des couleurs que nous pouvons citer. Elle était de même sans saveur, et pour la même raison elle ne possédait aucun attribut de ce genre ; car elle ne pouvait avoir ni qualité ni quantité ni détermination quelconque. Autrement quelqu’une des formes spéciales s’y serait rencontrée, et cela est impossible lorsque tout est mêlé. En effet, pour cela, il y aurait déjà séparation, et Anaxagore dit que tout est mêlé, excepté l’intelligence, qui seule est pure et sans mélange. Il faut donc qu’il reconnaisse pour principes l’unité d’abord ; car c’est bien là ce qui est simple et sans mélange, et d’un autre côté quelque chose, ainsi que nous désignons l’indéfini avant qu’il soit défini et participe d’aucune forme. Ce n’est s’exprimer ni justement, ni clairement ; mais au fond il a voulu dire quelque chose qui se rapproche davantage des doctrines qui ont suivi et de la réalité. Tous ces philosophes ne sont familiers qu’avec ce qui regarde la génération, la corruption et le mouvement, car ils s’occupent à peu près et exclusivement de cet ordre de choses, des principes et des causes qui s’y rapportent. Mais ceux qui étendent leurs recherches à tous les êtres, et qui admettent d’un côté des êtres sensibles, de l’autre des êtres qui ne tombent pas sous les sens, ceux-là ont dû naturellement faire l’étude de l’une et de l’autre de ces deux classes d’êtres ; et c’est pourquoi il faut s’arrêter davantage sur ces philosophes pour savoir ce qu’ils disent de bon ou de mauvais qui puisse éclairer nos recherches. Ceux qu’on appelle pythagoriciens font jouer aux principes et aux éléments un rôle bien plus étrange que les physiciens ; la raison en est qu’ils ne les ont pas empruntés aux choses sensibles. Les êtres mathématiques sont sans mouvement, à l’exception de ceux dont s’occupe l’astronomie ; et cependant les pythagoriciens ne dissertent et ne font de système que sur la physique. Ils engendrent le ciel, [990a] ils observent ce qui arrive dans toutes ses parties, dans leurs rapports, dans leurs mouvements, et ils épuisent à cela leurs causes et leurs principes, comme s’ils convenaient avec les physiciens que l’être est tout ce qui est sensible, et tout ce qu’embrasse ce qu’or appelle le ciel. Or, les causes et les principes qu’ils reconnaissent sont bons pour s’élever, comme nous l’avons dit, à ce qu’il y a de supérieur dans les êtres, et conviennent plus à cet objet qu’à l’explication des choses naturelles. Puis, comment pourra-t-il y avoir du mouvement, si on ne suppose d’autres sujets que le fini et l’infini, le pair et l’impair ? Ils ne le disent nullement ; ou comment est-il possible que sans mouvement ni changement, il y ait génération et corruption, et toutes les révolutions des corps célestes ? Ensuite, en supposant qu’on leur accorde ou qu’il soit démontré que de leurs principes on tire l’étendue, comment alors même rendront-ils compte de la légèreté et de la pesanteur ? Car d’après leurs principes et leur prétention même, ils ne traitent pas moins des corps sensibles que des corps mathématiques. Aussi n’ont-ils rien dit de bon sur le feu, la terre et les autres choses semblables, et cela, parce qu’ils n’ont rien dit, je pense, qui convienne proprement aux choses sensibles. De plus, comment faut-il entendre que le nombre et les modifications du nombre sont la cause des êtres qui existent et qui naissent dans le monde, depuis l’origine jusqu’à présent, tandis que d’autre part il n’y a aucun autre nombre hors celui dont le monde est formé ? En effet, lorsque pour eux, l’opinion et le sens sont dans une certaine partie du ciel, et un peu plus haut ou un peu plus bas l’injustice et la séparation ou le mélange, attendu, selon eux, que chacune de ces choses est un nombre, et lorsque déjà dans ce même espace se trouvent rassemblées une multitude de grandeurs, parce que ces grandeurs sont attachées chacune à un lieu, alors le nombre qu’il faut regarder comme étant chacune de ces choses, est-il le même que celui qui est dans le ciel, ou un autre outre celui-là ? Platon dit que c’est un autre nombre ; et pourtant lui aussi pense que les choses sensibles et les causes de ces choses sont des nombres ; mais pour lui les nombres qui sont causes, sont intelligibles, et les autres sont des nombres sensibles. Chapitre 8 Laissons maintenant les Pythagoriciens ; [990b] ce que nous en avons dit, suffira. Quant à ceux qui posent pour principes les idées, d’abord, en cherchant à saisir les principes des êtres que nous voyons, ils en ont introduit d’autres en nombre égal à celui des premiers, comme si quelqu’un voulant compter des objets, et ne pouvant le faire, alors même qu’ils sont en assez petit nombre, s’avisait de les multiplier pour les compter. Les idées sont presque en aussi grand nombre que les choses pour l’explication desquelles on a eu recours aux idées. Chaque chose individuelle se trouve avoir un homonyme, non seulement les existences individuelles, mais toutes celles où l’unité est dans la pluralité, et cela pour les choses de ce monde et pour les choses éternelles. En second lieu, de tous les arguments dont on se sert pour établir l’existence des idées, aucun ne la démontre la conclusion qu’on tire des uns n’est pas rigoureuse, et d’après les autres, il y aurait des idées là même où les Platoniciens n’en admettent pas. Ainsi d’après les considérations puisées dans la nature de la science, il y aura des idées de toutes les choses dont il y a science ; et d’après l’argument qui se tire de l’unité impliquée dans toute pluralité, il y aura des idées des négations mêmes ; et par ce motif qu’on pense aux choses qui ont péri, il y en aura des choses qui ne sont plus car nous nous en formons quelque image. En outre, on est conduit, en raisonnant rigoureusement, à supposer des idées pour le relatif dont on ne prétend pourtant pas qu’il forme par lui-même un genre à part, ou bien à l’hypothèse du troisième homme. Enfin, les raisonnements qu’on fait sur les idées renversent ce que les partisans des idées ont plus à cÅ“ur que l’existence même des idées car il arrive que ce n’est plus la dyade qui est avant le nombre, mais le nombre qui est avant la dyade, que le relatif est antérieur à l’absolu, et toutes les conséquences en contradiction avec leurs propres principes, auxquelles ont été poussés certains partisans de la doctrine des idées. De plus, dans l’hypothèse sur laquelle on établit l’existence des idées, il y aura des idées non seulement pour les substances, mais aussi pour beaucoup d’autres choses car ce ne sont pas les substances seules, mais les autres choses aussi que nous concevons sous la raison de l’unité, et toutes les sciences né portent pas seulement sur l’essence, mais sur d’autres choses encore ; et il y a mille autres difficultés de ce genre. Mais de toute nécessité, ainsi que d’après les opinions établies sur les idées, si les idées sont quelque chose dont participent les êtres, il ne peut y avoir d’idées que des essences car ce n’est pas par l’accident qu’il peut y avoir participation des idées ; c’est par son côté substantiel que chaque chose doit participer d’elles. Par exemple si une chose participe du double en soi, elle participe de l’éternité, mais selon l’accident car ce n’est que par accident que le double est éternel ; en sorte que les idées seront l’essence, et que dans le monde sensible et au-dessus elles désigneront l’essence ; ou sinon, que signifiera-t-il de dire qu’il doit y avoir quelque chose de plus que les choses particulières, à savoir, l’unité dans la pluralité ? Si les idées et les choses qui en participent, sont du même genre, il y aura entre elles quelque chose de commun car pourquoi y aurait-il dans les dualités périssables et les dualités multiples, mais éternelles, une dualité une et identique, plutôt que dans la dualité idéale et dans telle ou telle dualité déterminée ? Si, au contraire, elles ne sont pas du même genre, il n’y aura entre elles que le nom de commun, et ce sera comme si on donnait le nom d’homme à Callias et à un morceau de bois, sans avoir vu entre eux aucun rapport. La plus grande difficulté, c’est de savoir ce que font les idées aux choses sensibles, soit à celles qui sont éternelles, soit à celles qui naissent et qui périssent car elles ne sont causes pour elles ni d’aucun mouvement, ni d’aucun changement. D’autre part, elles ne servent en rien à la connaissance des choses, puisqu’elles n’en sont point l’essence car alors elles seraient en elles ; elles ne les font pas être non plus, puisqu’elles ne résident pas dans les choses qui participent d’elles. A moins qu’on ne dise peut-être qu’elles sont causes, comme serait, par exemple, la blancheur cause de l’objet blanc, en se mêlant à lui ; mais il n’y a rien de solide dans cette opinion qu’Anaxagore le premier, et après lui Eudoxe et quelques autres, ont mise en avant ; et il est facile de rassembler contre une pareille hypothèse une foule de difficultés insolubles. Ainsi les choses ne sauraient venir des idées, dans aucun des cas dans lesquels, on a coutume de l’entendre. Dire que ce sont des exemplaires et que les autres choses en participent, c’est prononcer de vains mots et faire des métaphores poétiques ; car, qu’est-ce qui produit jamais quelque chose en vue des idées ? De plus, il se peut qu’il existe ou qu’il naisse une chose semblable à une autre, sans avoir été modelée sur elle ; et, par exemple, que Socrate existe ou n’existe pas, il pourrait naÃtre un personnage tel que Socrate. D’un autre côté, il est également vrai que, en admettant un Socrate éternel, il faudra qu’il y ait plusieurs exemplaires et par conséquent plusieurs idées de la même chose ; de l’homme, par exemple, il y aurait l’animal, le bipède, tout aussi bien que l’homme en soi. Il faut en outre qu’il y ait des idées exemplaires non seulement pour des choses sensibles, mais encore pour les idées elles-mêmes, comme le genre en tant que comprenant des espèces ; de sorte que la même chose sera à la fois exemplaire et copie. De plus, il semble impossible que l’essence soit séparée de la chose dont elle est l’essence si cela est, comment les idées qui sont les essences des choses, en seraient-elles séparées ? Dans le Phédon, il est dit que les causes de l’être et du devenir sont les Idées. Pourtant, même en admettant l’existence des Idées, les êtres participants ne sont pas engendrés sans l’intervention de la cause motrice. Et comme beaucoup d’autres objets sont produits, par exemple une maison et un anneau, dont nous disons qu’il n’y a pas d’Idées, il en résulte qu’il est évidemment possible, pour les autres choses aussi, d’exister et de devenir par des causes analogues à celles des objets dont nous parlons. Maintenant, si les idées sont des nombres, comment ces nombres seront-ils causes ? Sera-ce parce que les êtres sont d’autres nombres, et que tel nombre par exemple est l’homme, tel autre Socrate, tel autre Callias ? Mais en quoi ceux-là sont-ils causes de ceux-ci ? Car, que les uns soient éternels, les autres non, cela n’y fera rien. Si c’est parce que les choses sensibles sont des rapports de nombres, comme est par exemple une harmonie, il est évident qu’il y a quelque chose qui est le sujet de ces rapports ; et si ce quelque chose existe, savoir la matière, il est clair qu’à leur tour les nombres eux-mêmes seront des rapports de choses différentes. Par exemple, si Callias est une proportion en nombres de feu, de terre, d’eau et d’air, cela supposera des sujets particuliers, distincts de la proportion elle-même ; et l’idée nombre, l’homme en soi, que ce soit un nombre ou non, n’en sera pas moins une proportion de nombres qui suppose des sujets particuliers et non pas un pur nombre, et on n’en peut tirer non plus aucun nombre particulier. Ensuite, de la réunion de plusieurs nombres, résulte un nombre unique ; comment de plusieurs idées fera-t-on une seule idée ? Si on prétend que la somme n’est pas formée de la réunion des idées elles-mêmes, mais des éléments individuels compris sous les idées, comme est par exemple une myriade, comment sont les unités qui composent cette somme ? Si elles sont de même espèce, il s’ensuivra beaucoup de choses absurdes ; si d’espèce diverse, elles ne seront ni les mêmes, ni différentes ; car en quoi différeraient-elles, puisqu’elles n’ont pas de qualités ? Toutes ces choses ne sont ni raisonnables ni conformes au bon sens. Et puis, il est nécessaire d’introduire un autre genre de nombre qui soit l’objet de l’arithmétique, et de ce que plusieurs appellent les choses intermédiaires ; autrement de quels principes viendront ces choses ? Pourquoi doit-il y avoir des intermédiaires entre le monde sensible et les Idées ? De plus, les unités, dans la Dyade indéfinie, viendront chacune d’une dyade antérieure, ce qui est pourtant impossible. En outre, comment [992a] expliquer que le Nombre idéal, composé d’unités, soit une unités ? Ce n’est pas tout. Si les unités sont différentes entre elles, on devrait parler comme ceux qui admettent deux ou quatre éléments, tous entendant par là , non un élément commun, le Corps en général, par exemple, mais le Feu ou la Terre, que le Corps soit, ou non, quelque chose de commun. Mais, en réalité, les platoniciens s’expriment comme si l’Un en soi était, à la façon du Feu ou de l’Eau, une sorte d’élément homéomère. S’il en est ainsi, les Nombres ne seront pas des substances, mais il est clair que, si l’Un en soi existe, et qu’il soit principe, l’Un ne recevra qu’une diversité de dénomination, autrement il y aurait là une impossibilité. Dans le but de ramener les choses aux principes de cette théorie, on compose les longueurs du long et du court, c’est-à -dire d’une certaine espèce de grand et de petit, la surface du large et de l’étroit, le corps du profond et de son contraire. Or, comment le plan pourra-t-il contenir la ligne, ou le solide la ligne et le plan ? Car le large et l’étroit sont une espèce différente du profond et de son contraire. De même donc que le nombre ne se trouve pas dans ces choses, parce que ses principes, le plus ou le moins, sont distincts de ceux que nous venons de nommer, il est clair que de ces diverses espèces, celles qui sont supérieures, ne pourront se trouver dans les inférieures. Et il ne faut pas dire que le profond soit une espèce du large ; car alors, le corps serait une sorte de plan. Et les points, d’où viendront-ils ? Platon combattait l’existence du point, comme étant une pure conception géométrique ; d’autre part, il l’appelait le principe de la ligne, il en a fait souvent des lignes indivisibles. Pourtant, il faut que ces lignes aient une limite ; de sorte que par la même raison que la ligne existe, le point existe aussi. Enfin, quand il appartient à la philosophie de rechercher la cause des phénomènes, c’est cela même que l’on néglige car on ne dit rien de la cause qui est le principe du changement ; et on s’imagine expliquer l’essence des choses sensibles, en posant d’autres essences ; mais comment celles-ci sont-elles les essences de celles-là ? C’est sur quoi on ne se paie que de mots, car participer, comme nous l’avons déjà dit, ne signifie rien. Et ce principe que nous regardons comme la fin des sciences, en vue duquel agit toute intelligence et tout être ; ce principe que nous avons rangé parmi les principes premiers, les idées ne l’atteignent nullement. Mais, les Mathématiques sont devenues, pour les modernes, toute la Philosophie, quoiqu’ils disent qu’on ne devrait les cultiver [992b] qu’en vue du reste. De plus, cette dyade, dont ils font la matière des choses, on pourrait bien la regarder comme une matière purement mathématique, comme un attribut et une différence de ce qui est et de la matière, plutôt que comme la matière même c’est comme ce que les physiciens appellent le rare et le dense, ne désignant par là que les différences premières du sujet ; car tout cela n’est autre chose qu’une sorte de plus et de moins. Quant à ce qui est du mouvement, si le grand et le petit renferment le mouvement, il est clair que les idées seront en mouvement sinon, d’où est-il venu ? C’en est assez pour supprimer d’un seul coup toute étude de la nature. Il eût paru facile à cette doctrine de démontrer que tout est un ; mais elle n’y parvient pas, car, des raisons qu’on expose, il ne résulte pas que toutes choses soient l’unité, mais seulement qu’il y a une certaine unité existante, et il reste à accorder qu’elle soit tout or cela, on ne le peut, qu’en accordant l’existence du genre universel, ce qui est impossible pour certaines choses. Pour les choses qui viennent après les nombres, à savoir, les longueurs, les surfaces et les solides, on n’en rend pas raison, on n’explique ni comment elles sont et deviennent, ni si elles ont quelque vertu. Il est impossible que ce soient des idées ; car ce ne sont pas des nombres, ni des choses intermédiaires, car ces dernières sont les choses mathématiques, ni enfin des choses périssables ; mais il est évident qu’elles constituent une quatrième classe d’êtres. Enfin, rechercher les éléments des êtres sans les distinguer, lorsque leurs dénominations les distinguent de tant de manières, c’est se mettre dans l’impossibilité de les trouver, surtout si on pose la question de cette manière Quels sont les éléments des êtres ? Car de quels éléments viennent l’action ou la passion ou la direction rectiligne, c’est ce qu’on ne peut certainement pas saisir ; on ne le peut que pour les substances ; de sorte que rechercher les éléments de tous les êtres ou s’imaginer qu’on les connaÃt, est une chimère. Et puis, comment pourra-t-on apprendre quels sont les éléments de toutes choses ? Évidemment, il est impossible alors qu’on ne possède aucune connaissance préalable ; car quand on apprend la géométrie, on a des connaissances préalables, sans qu’on sache d’avance rien de ce que renferme la géométrie et de ce qu’il s’agit d’apprendre ; et il en est ainsi de tout le reste ; si donc il y a une science de toutes choses, comme quelques-uns le prétendent, il n’y a plus de connaissance préalable. Cependant, toute science, aussi bien celle qui procède par démonstration que celle q ni procède par définitions, ne s’acquiert qu’à l’aide de connaissances préalables, totales ou particulières ; car toute définition suppose des données connues d’avance ; et il en est de même de la science par induction. Mais, d’un autre côté, si la science se trouvait actuellement innée, il serait étonnant [993a] qu’à notre insu nous possédions en nous la plus haute des sciences. Et puis, comment connaÃtra-t-on les éléments de toutes choses et comment arrivera-t-on à une certitude démonstrative ? Car cela est sujet à difficulté ; et on pourrait douter sur ce point comme on doute au sujet de certaines syllabes les uns disent, en effet, que la syllabe ZA est composée des trois lettres S, D et A ; les autres prétendent que c’est un autre son, différent de tous ceux que nous connaissons. Enfin, les choses qui tombent sous la sensation, comment celui qui est dépourvu de la faculté de sentir, pourra-t-il les connaÃtre ? Pourtant, il le faudrait si les idées sont les éléments dont se composent toutes choses, comme des sons composés viennent tous des sons élémentaires. Chapitre 9 Ainsi donc, il résulte clairement de tout ce que nous avons dit jusqu’ici les recherches de tous les philosophes se rapportent aux quatre principes déterminés par nous dans la Physique, et qu’en dehors de ceux-là il n’y en a pas d’autre. Mais ces recherches ont été faites sans précision ; et si, en un sens, on a parlé avant nous de tous les principes, on peut dire en un autre qu’il n’en a pas été parlé car la philosophie primitive, jeune et faible encore, semble bégayer sur toutes choses. Par exemple, lorsque Empédocle dit que ce qui fait l’os c’est la proportion, il désigne par là la forme et l’essence de la chose ; mais il faut aussi que ce principe rende raison de la chair et de toutes les autres choses, ou de rien ; c’est donc par la proportion que la chair et l’os et toutes les autres choses existeront, et non pas par la matière, laquelle est selon lui feu, terre et eau. Qu’un autre eût dit cela, Empédocle en serait nécessairement convenu ; mais il ne s’est pas expliqué clairement. L’insuffisance des recherches de nos devanciers a été assez montrée. Maintenant, reprenons les difficultés qui peuvent s’élever sur le sujet, lui-même ; leur solution nous conduira peut-être à celle des difficultés qui se présenteront ensuite. Livre 2 Chapitre 1 La science qui a pour objet la vérité, est difficile sous un point de vue et facile sous un autre. Ce qui le prouve, c’est qu’il est impossible d’atteindre complètement la vérité, et que tous la manquent complètement. [993b] Pourtant, chaque philosophe explique quelque secret de la nature. Ce que chacun en particulier ajoute à la connaissance de la vérité n’est rien sans doute ou n’est que peu de chose ; mais la réunion de toutes les idées présente d’importants résultats. De sorte qu’il en est ici, ce nous semble, comme de ce que nous disons dans le proverbe Qui ne mettrait pas la flèche dans une porte ? Considérée ainsi, cette science est chose facile. Mais l’impossibilité d’une possession complète de la vérité dans son ensemble et dans ses parties, montre tout ce qu’il y a de difficile dans la recherche dont il s’agit. Cette difficulté est double. Toutefois, elle a peut-être sa cause non pas dans les choses, mais dans nous-mêmes. En effet, de même que les yeux des chauves-souris sont offusqués par la lumière du jour, de même l’intelligence de notre âme est offusquée par les choses qui portent en elles la plus éclatante évidence. Il est donc juste d’avoir de la reconnaissance non-seulement pour ceux dont on partage les opinions, mais pour ceux-là mêmes qui ont traité les questions d’une manière un peu superficielle ; car eux aussi ont contribué pour leur part. Ce sont eux qui ont préparé par leurs travaux l’état actuel de la science. Si Timothée n’avait point existé, nous n’aurions pas toutes ces belles mélodies ; mais s’il n’y avait point eu de Phrynes, il n’eût point existé de Timothée. Il en est de même de ceux qui ont exposé leurs idées sur la vérité. Nous avons adopté quelques-unes des opinions de plusieurs philosophes ; les autres philosophes ont été causes de l’existence de ceux-là . Enfin c’est à juste titre qu’on nomme la philosophie, la science théorétique de la vérité. En effet, la fin de la spéculation, c’est la vérité ; celle de la pratique, c’est l’œuvre ; et les praticiens, quand ils considèrent le comment des choses, n’examinent pas la cause pour elle-même, mais en vue d’un but particulier, d’un intérêt présent. Or, nous ne savons pas le vrai si nous ne savons la cause. De plus, une chose est vraie par excellence, quand c’est à elle que les autres choses empruntent ce qu’elles ont en elles de vérité ; et, de même que le feu est le chaud par excellence, parce qu’il est la cause de la chaleur des autres êtres ; de même la chose qui est la cause de la vérité dans les êtres qui dérivent de cette chose est aussi la vérité par excellence. C’est pourquoi les principes des êtres éternels sont nécessairement l’éternelle vérité. Car, ce n’est pas dans telle circonstance seulement qu’ils sont vrais ; et il n’y a rien qui soit la cause de leur vérité ; ce sont eux au contraire qui sont causes de la vérité des autres choses. En sorte que tel est le rang de chaque chose dans l’ordre de l’être, tel est son rang dans l’ordre de la vérité. Chapitre 2 [994a] Il est évident qu’il y a un premier principe, et qu’il n’existe ni une série infinie de causes, ni une infinité d’espèces de causes. Ainsi, sous le point de vue de la matière, il est impossible qu’il y ait production à l’infini ; que la chair, par exemple, vienne de la terre, la terre de l’air, l’air du feu, sans que cela s’arrête. De même pour le principe du mouvement on ne dira pas que l’homme a été mis en mouvement par l’air, l’air par le soleil, le soleil par la discorde, et ainsi à l’infini. De même encore, on ne peut, pour la cause finale, aller à l’infini et dire que la marche est en vue de la santé, la santé en vue du bonheur, le bonheur en vue d’autre chose, et que toute chose est toujours ainsi en vue d’une autre. De même enfin pour la cause essentielle. Toute chose intermédiaire est précédée et suivie d’autre chose, et ce qui précède est nécessairement cause de ce qui suit. Si l’on nous demandait laquelle d’une série de trois choses est la cause, nous dirions que c’est la première. Car ce n’est point la dernière ce qui est à la fin n’est cause de rien. Ce n’est point non plus l’intermédiaire elle n’est cause que d’une seule chose. Peu importe ensuite que ce qui est intermédiaire soit un ou plusieurs, infini ou fini. Car toutes les parties de cette infinité de causes, et, en général, toutes les parties de l’infini, si vous partez du fait actuel pour remonter de cause en cause, ne sont également que des intermédiaires. De sorte que si rien n’est premier, il n’y a absolument pas de cause. Mais s’il faut, en remontant, arriver à un principe, on ne peut pas non plus, en descendant, aller à l’infini, et dire, par exemple, que le feu produit l’eau, l’eau la terre, et que la chaÃne de la production des êtres se continue ainsi sans cesse et sans fin. En effet, ceci succède à cela, signifie deux choses ; ou bien une succession simple Après les jeux Isthmiques, les jeux Olympiens ; ou bien un rapport d’un autre genre L’homme, par l’effet d’un changement, vient de l’enfant, l’air de l’eau. Et voici dans quel sens nous entendons que l’homme vient de l’enfant ; c’est dans le sens où nous disons que ce qui est devenu a été produit par ce qui devenait, ou bien que ce qui est parfait a été produit par l’être qui se perfectionnait ; car, de même que entre l’être et le non-être il y a toujours le devenir, de même aussi entre ce qui n’était pas et ce qui est, il y a ce qui devient. Ainsi, celui qui étudie devient savant, et c’est ce qu’on entend en disant que d’apprenant qu’on était on devient instruit. Quant à cet autre exemple L’air vient de l’eau ; là , il y a l’un des deux éléments qui périt dans la production de l’autre. Aussi, dans le premier cas n’y a-t-il point de retour de ce qui est produit à ce qui a produit [994b] d’homme on ne devient pas enfant ; car ce qui est produit ne l’est pas par la production même, mais vient après la production. De même pour la succession simple le jour vient de l’aurore, uniquement parce qu’il lui succède ; mais par cela même l’aurore ne vient pas du jour. Dans l’autre espèce de production, au contraire, il y a retour de l’un des éléments à l’autre. Mais dans les deux cas il est impossible d’aller à l’infini. Dans le premier, il faut que les intermédiaires aient une fin ; dans le dernier il y a retour perpétuel d’un élément à l’autre, car la destruction de l’un est la production de l’autre. Et puis, il est impossible que l’élément premier, s’il est éternel, périsse comme il le faudrait alors. Car, puisque, en remontant de cause en cause, la chaÃne de la production n’est pas infinie, il faut nécessairement que l’élément premier qui, en périssant, a produit quelque chose, ne soit pas éternel. Or, cela est impossible. Ce n’est pas tout la cause finale est une fin. Par cause finale on entend ce qui ne se fait pas en vue d’autre chose, mais au contraire ce en vue de quoi autre chose se fait. De sorte que s’il y a ainsi quelque chose qui soit le dernier terme, il n’y aura pas de production infinie s’il n’y a rien de tel, il n’y a point de cause finale. Ceux qui admettent ainsi la production à l’infini, ne voient pas qu’ils suppriment par là même le bien. Or, y a-t-il quelqu’un qui voudrait entreprendre une chose, s’il ne devait pas arriver à l’achever ? Ce serait l’acte d’un insensé. L’homme raisonnable agit toujours en vue de quelque chose ; et c’est-là une fin, car le but qu’on se propose est une fin. On ne peut pas non plus ramener indéfiniment l’essence à une autre essence. Il faut s’arrêter. Toujours l’essence qui précède est plus essence que celle qui suit ; mais si ce qui précède ne l’est pas encore, à plus forte raison ce qui suit. Bien plus, ce genre de système rend toute connaissance impossible. On ne peut savoir, il est impossible de rien connaÃtre, avant d’arriver à ce qui est simple et indivisible. Or, comment penser à cette infinité d’êtres dont on nous parle ? Il n’en est pas ici comme de la ligne, qui ne s’arrête pas dans ses divisions la pensée a besoin de points d’arrêt. Aussi, si vous parcourez cette ligne qui se divise à l’infini, vous n’en pouvez compter toutes les divisions. Ajoutons que nous ne concevons la matière que dans un objet en mouvement. Or, aucun de ces objets n’est marqué du caractère de l’infini. Si ces objets sont réellement infinis, le caractère propre de l’infini n’est pas l’infini. Et quand bien même on dirait seulement qu’il y a un nombre infini d’espèces de causes, la connaissance serait encore impossible. Car nous croyons savoir quand nous connaissons les causes ; et il n’est point possible que dans un temps fini, nous puissions parcourir une série infinie. Chapitre 3 Les auditeurs sont soumis à l’influence de l’habitude. Nous aimons qu’on se serve d’un langage conforme à celui qui nous est familier. Sans cela, les choses ne paraissent plus ce qu’elles nous paraissaient ; il nous semble, par ce qu’elles ont d’inaccoutumé, que nous les connaissons moins, et qu’elles nous sont plus étrangères. Ce qui nous est habituel nous est, en effet, mieux connu. Une chose qui montre bien quelle est la force de l’habitude, ce sont les lois, où des fables et [995a] des puérilités ont plus de puissance, par l’effet de l’habitude, que n’en aurait la vérité même. Il est des hommes qui n’admettent d’autres démonstrations que celles des mathématiques ; d’autres ne veulent que des exemples ; d’autres ne trouvent pas mauvais qu’on invoque le témoignage d’un poète. Il en est enfin qui demandent que tout soit rigoureusement démontré ; tandis que d’autres trouvent cette rigueur insupportable, ou bien parce qu’ils ne peuvent suivre la chaÃne des démonstrations, ou bien parce qu’ils pensent que c’est se perdre dans des futilités. Il y a, en effet, quelque chose de cela dans l’affectation de la rigueur. Aussi quelques-uns la regardent-ils comme indigne d’un homme libre, non-seulement dans la conversation, mais même dans la discussion philosophique. Il faut donc que nous apprenions avant tout quelle sorte de démonstration convient à chaque objet particulier ; car il serait absurde de mêler ensemble et la recherche de la science, et celle de sa méthode deux choses dont l’acquisition présente de grandes difficultés. On ne doit pas exiger en tout la rigueur mathématique, mais seulement quand il s’agit d’objets immatériels. Aussi la méthode mathématique n’est-elle pas celle des physiciens ; car la matière est probablement le fond de toute la nature. Ils ont à examiner d’abord ce que c’est que la nature. De cette manière, en effet, ils verront clairement quel est l’objet de la physique, et si l’étude des causes et des principes de la nature est le partage d’une science unique ou de plusieurs sciences. Livre 3 Chapitre 1 Il est nécessaire, dans l’intérêt de la science que nous cherchons, de commencer par exposer les difficultés que nous avons à résoudre dès l’abord. Ces difficultés, ce sont, outre les opinions contradictoires des divers philosophes sur les mêmes sujets, tous les points obscurs qu’ils peuvent avoir négligé d’éclaircir si l’on veut arriver à une solution vraie, il est utile de se bien poser d’abord ces difficultés. Car la solution vraie à laquelle on parvient ensuite, n’est autre chose que l’éclaircissement de ces difficultés or, il est impossible de délier un nÅ“ud si l’on ne sait pas la manière de s’y prendre. Ceci est évident surtout pour les difficultés, les doutes de la pensée. Douter, pour elle, c’est être dans l’état de l’homme enchaÃné pas plus que lui elle ne peut aller en avant. Il nous faut donc commencer par examiner toutes les difficultés, et pour ces motifs, et aussi parce que chercher sans se les être posées d’abord, c’est ressembler à ceux qui marchent sans savoir vers quel but il faut marcher, c’est s’exposer même à ne point reconnaÃtre si l’on a découvert ou non ce que l’on cherchait. En effet, on n’a point alors de but marqué le but est marqué au contraire pour celui qui a commencé par se les bien poser. Enfin, on doit nécessairement être mieux à même de juger, quand on a entendu, comme parties adverses en quelque sorte, toutes les raisons opposées. La première difficulté est celle que nous nous sommes déjà proposée dans l’introduction. L’étude des causes appartient-elle à une seule science, ou à plusieurs, et la science doit-elle s’occuper seulement des premiers principes des êtres, ou bien doit-elle embrasser aussi les principes généraux de la démonstration, tels que celui-ci Est-il possible, ou non, d’affirmer et de nier en même temps une seule et même chose ? Et tous les autres principes de ce genre ? Et si elle ne s’occupe que des principes des êtres, y a-t-il une seule science ou plusieurs pour tous ces principes ? Et s’il y en a plusieurs, y a-t-il entre toutes quelque affinité, on bien les unes doivent-elles être considérées comme des philosophies, les autres non ? Il est nécessaire encore de rechercher si l’on ne doit reconnaÃtre que des substances sensibles, ou s’il y en a d’autres en dehors de celles-là . Y a-t-il une seule espèce de substance, ou bien y en a-t-il plusieurs ? De ce dernier avis sont, par exemple, ceux qui admettent les idées, et les substances mathématiques intermédiaires entre les idées et les objets sensibles. Ce sont là , disons-nous, des difficultés qu’il faut examiner, et encore celle-ci Notre étude n’embrasse-t-elle que les essences, ou bien s’étend-elle aussi aux accidents essentiels des substances ? Ensuite, à quelle science appartient-il de s’occuper de l’identité et de l’hétérogénéité, de la similitude et de la dissimilitude, de l’identité et de la contrariété, de l’antériorité et de la postériorité, et des autres principes de ce genre à l’usage des Dialecticiens, lesquels ne raisonnent que sur le vraisemblable ? Ensuite, quels sont les accidents propres de chacune de ces choses ? Il ne faut pas seulement rechercher ce qu’est chacune d’elles, mais encore si elles sont opposées les unes aux autres. Sont-ce les genres qui sont les principes et les éléments ; sont-ce les parties intrinsèques de chaque être ? Et si ce sont les genres, sont-ce les plus rapprochés des individus, ou bien les genres les plus élevés ? Est-ce l’animal, par exemple, ou bien l’homme, qui est principe ; et le genre l’est-il plutôt que l’individu ? Une autre question non moins digne d’être étudiée et approfondie est celle-ci y a-t-il ou non, en dehors de la substance, quelque chose qui soit cause en soi ? Ce quelque chose en est-il ou non indépendant ; est-il un ou multiple ? Est-il ou non en dehors de l’ensemble et par l’ensemble j’entends ici la substance avec sel attributs ? En dehors de quelques individus et non des autres ; et quels sont alors les êtres en dehors desquels il existe ? Ensuite, les principes soit formels soit substantiels, sont-ils numériquement distincts ou réductibles à des genres ? [996a] Les principes des êtres périssables et ceux des êtres impérissables sont-ils les mêmes ou différents ; sont-ils tous impérissables, ou bien les principes des êtres périssables sont-ils périssables ? De plus, et c’est là la difficulté la plus grande, la plus embarrassante, l’unité et l’être constituent-ils ou non la substance des êtres, comme le prétendaient les Pythagoriciens et Platon ; ou bien y a-t-il quelque chose qui leur serve de sujet, de substance, comme l’Amitié d’Empédocle, le feu, l’eau, l’air de tel ou tel autre philosophe ? Les principes sont-ils relatifs au général, ou bien aux choses particulières ? Sont-ils en puissance ou en acte ? Sont-ils en mouvement ou autrement ? Ce sont là de graves difficultés. Ensuite, les nombres, les longueurs, les figures, les points, sont-ils ou non des substances ; et, s’ils sont des substances, sont-ils indépendants des objets sensibles, ou existent-ils dans ces objets ? Sur tous ces points, non seulement il est difficile d’arriver à la vérité par une bonne solution, mais il n’est pas même bien facile de se poser nettement les difficultés. Chapitre 2 D’abord, comme nous nous le sommes demandé en commençant, appartient-il à une seule science ou à plusieurs, d’examiner toutes les espèces de causes ? Mais comment appartiendrait-il à une seule science de connaÃtre des principes qui ne sont pas contraires les uns aux autres ? Et de plus, il y a un grand nombre d’objets où ces principes ne se trouvent pas tous réunis. Comment, par exemple, serait-il possible de rechercher la cause du mouvement ou le principe du bien dans ce qui est immobile ? En effet, tout ce qui est bien en soi et par sa nature est un but, et par cela même une cause, puisque c’est en vue de ce bien que se produisent, qu’existent les autres choses. Un but, ce en vue de quoi, est nécessairement but de quelque action or, il n’y a point d’action sans mouvement ; de sorte que dans les choses immobiles on ne peut admettre ni l’existence de ce principe du mouvement, ni celle du bien en soi. Aussi ne démontre-t-on rien dans les sciences mathématiques au moyen de la cause du mouvement. On ne s’y occupe pas davantage du mieux et du pire ; et même aucun mathématicien ne tient compte de ces principes. C’est pour ce motif que quelques sophistes, Aristippe par exemple, repoussaient ignominieusement les sciences mathématiques. Dans tous les arts, disaient-ils, même dans les arts manuels, dans celui du maçon, du cordonnier, on s’occupe sans cesse du mieux et du pire ; [996b] tandis que les mathématiques ne font jamais mention du bien ni du mal. Mais s’il y a plusieurs sciences des causes, si chacune d’elles s’occupe de principes différents, laquelle de toutes ces sciences sera celle que nous cherchons ; ou, parmi les hommes qui les posséderont, lequel connaÃtra le mieux l’objet de nos recherches ? Il est possible qu’un seul objet réunisse toutes ces espèces de causes. Ainsi, dans une maison, le principe du mouvement, c’est l’art et l’ouvrier ; la cause finale, c’est l’œuvre ; la matière, la terre et les pierres ; le plan est la forme. Il convient donc, d’après la définition que nous avons assignée précédemment à la philosophie, de donner ce nom à chacune des sciences qui s’occupent de ces causes. La science par excellence, celle qui dominera toutes les autres, à laquelle les autres sciences devront céder en esclaves, c’est assurément celle qui s’occupe du but et du bien ; car tout le reste n’existe qu’en vue du bien. Mais la science des causes premières, celle que nous avons définie la science de ce qu’il y a de plus scientifique, ce sera la science de l’essence. On peut, en effet, connaÃtre la même chose de bien des manières ; mais ceux qui connaissent un objet par ce qu’il est, connaissent mieux que ceux qui le connaissent par ce qu’il n’est pas. Parmi les premiers même nous distinguons des degrés de connaissance ceux-là en ont la science la plus parfaite, qui connaissent, non point sa quantité, ses qualités, ses modifications, ses actes, mais son essence. Il en est de même aussi de toutes les choses dont il y a démonstration. Nous croyons en avoir la connaissance lorsque nous savons ce en quoi elles consistent Qu’est-ce, par exemple, que construire un carré équivalent à un rectangle donné ? C’est trouver la moyenne proportionnelle entre les deux côtés du rectangle. Et de même pour tous les autres cas. Pour la production, au contraire, pour l’action, pour toute espèce de changement, nous croyons avoir la science, lorsque nous connaissons le principe du mouvement, lequel est différent de la cause finale, et en est précisément l’opposé. Il paraÃtrait donc d’après cela que ce sont des sciences différentes qui doivent examiner chacune de ces causes. Ce n’est pas tout. Les principes de la démonstration appartiennent-ils à une seule science ou à plusieurs ? C’est encore là une question. J’appelle principe de la démonstration, ces axiomes généraux sur lesquels tout le monde s’appuie pour démontrer ; ceux-ci, par exemple Il faut nécessairement affirmer ou nier une chose ; Une chose ne peut pas être et n’être pas en même temps ; et toutes les autres propositions de ce genre. Hé bien, la science de ces principes est-elle la même que celle de l’essence, ou en diffère-t-elle ? Si elle en diffère, laquelle des deux reconnaÃtrons-nous pour celle que nous cherchons ? Les principes de la démonstration n’appartiennent pas à une seule science, cela est évident pourquoi la géométrie s’arrogerait-elle, plutôt que toute autre science, le droit de traiter de ces principes ? Si donc toute science quelconque a également ce privilège, et si pourtant elles ne peuvent pas toutes en jouir, l’étude des principes ne dépendra pas plus de la science qui connaÃt les essences, que de toute autre. Et puis, comment y aurait-il une science des principes ? Nous connaissons de prime abord ce qu’est chacun d’eux ; aussi tous les arts les emploient-ils comme choses bien connues. Tandis que s’il y avait une science démonstrative des principes, il faudrait admettre l’existence d’un genre commun, objet de cette science ; il faudrait d’un côté les accidents du genre, de l’autre des axiomes, car il est impossible de tout démontrer. Toute démonstration doit partir d’un principe, porter sur un objet, démontrer quelque chose de cet objet. Il s’ensuit que tout ce qui se démontre pourrait se ramener à un genre unique. Et en effet, toutes les sciences démonstratives se servent des axiomes. Or, si la science des axiomes est une autre science que la science de l’essence, laquelle des deux sera la science souveraine, la science première ? Les axiomes sont ce qu’il y a de plus général ; ils sont les principes de toutes choses si donc ils ne font pas partie de la science du philosophe, quel autre sera chargé de vérifier leur vérité ou leur fausseté ? Enfin, y a-t-il une seule science pour toutes les essences, y en a-t-il plusieurs ? S’il y en a plusieurs, de quelle essence traite la science qui nous occupe ? Qu’il n’y ait qu’une science de toutes les essences, c’est ce qui n’est pas probable. Dans ce cas il y aurait une seule science démonstrative de tous les accidents essentiels des êtres, puisque toute science démonstrative soumet au contrôle de principes communs tous les accidents essentiels d’un sujet donné. Il appartient donc à la même science d’examiner d’après des principes communs seulement les accidents essentiels d’un même genre. En effet, une science s’occupe de ce qui est ; une autre science, soit qu’elle se confonde avec la précédente ou s’en distingue, traite des causes de ce qui est. De sorte que ces deux sciences, ou cette science unique, dans le cas où elles n’en font qu’une, s’occuperont elles-mêmes des accidents du genre qui est leur objet. Mais, d’ailleurs, la science n’embrasse-t-elle que les essences, ou bien porte-t-elle aussi sur leurs accidents ? Par exemple, si nous considérons comme des essences, les solides, les lignes, les plans, la science de ces essences s’occupera-t-elle en même temps des accidents de chaque genre, accidents sur lesquels portent les démonstrations mathématiques, ou bien sera-ce l’objet d’une autre science ? S’il n’y a qu’une science unique, la science de l’essence sera alors une science démonstrative or, l’essence, à ce qu’il semble, ne se démontre pas ; et s’il y a deux sciences différentes, quelle est donc celle qui traitera des accidents de la substance ? C’est une question dont la solution est des plus difficiles. De plus, ne faut-il admettre que des substances sensibles, ou bien y en a-t-il d’autres encore ? N’y a-t-il qu’une espèce de substance, y en a-t-il plusieurs ? De ce dernier avis sont, par exemple, ceux qui admettent les idées, ainsi que les êtres intermédiaires objets des sciences mathématiques. Ils disent que les idées sont par elles-mêmes causes et substances, comme nous l’avons vu, en traitant cette question dans le premier livre. Cette doctrine est sujette à mille objections. Mais ce qu’il y a de plus absurde, c’est de dire qu’il existe des êtres particuliers en dehors de ceux que nous voyons dans l’univers, mais que ces êtres sont les mêmes que les êtres sensibles, à cette seule différence près que les uns sont éternels, les autres périssables en effet, tout ce qu’ils disent, c’est qu’il y a l’homme en soi, le cheval, la santé en soi ; imitant en cela ceux qui disent qu’il y a des dieux, mais que ces dieux ressemblent aux hommes. Les uns ne font pas autre chose que des hommes éternels ; les idées des autres ne sont de même que des êtres sensibles éternels. Si, outre les idées et les objets sensibles, l’on veut admettre les êtres intermédiaires, il s’en suit une multitude de difficultés. Car, évidemment, il y aura aussi des lignes intermédiaires entre l’idée de la ligne et la ligne sensible ; et de même pour toute espèce de choses. Prenons pour exemple l’Astronomie. Il y aura un autre ciel, en dehors de celui qui tombe sous nos sens, un autre soleil, une autre lune ; et de même pour tout ce qui est dans le ciel. Or, comment croire à leur existence ? Ce nouveau ciel, on ne peut raisonnablement le faire immobile ; et, d’un autre côté il est tout-à -fait impossible qu’il soit en mouvement. Il en est de même pour les objets dont traite l’Optique, et pour les rapports mathématiques des sons musicaux. Là encore on ne peut admettre, et pour les mêmes raisons, des êtres en dehors de ceux que nous voyons ; car, si vous admettez des êtres sensibles intermédiaires, il vous faudra nécessairement admettre des sensations intermédiaires pour les percevoir, ainsi que des animaux intermédiaires entre les idées des animaux et les animaux périssables. On peut se demander sur quels êtres porteraient les sciences intermédiaires. Car si vous reconnaissez que la Géodésie ne diffère de la Géométrie, qu’en ce que l’une porte sur des objets sensibles, l’autre sur des objets que nous ne percevons point par les sens, il vous faut évidemment faire la même chose pour la Médecine et pour toutes les autres sciences, et dire qu’il y a une science intermédiaire entre la Médecine idéale et la Médecine sensible. Et comment admettre une pareille supposition ? Il faudrait alors dire aussi qu’il y a une santé intermédiaire entre la santé des êtres sensibles et la santé en soi. Mais il n’est pas même vrai de dire que la Géodésie est une science de grandeurs sensibles et périssables, car, dans ce cas, elle périrait, quand périraient ces grandeurs. L’Astronomie elle-même, la science du ciel qui tombe sous nos sens, n’est pas une science de grandeurs sensibles. Les lignes sensibles ne sont pas les lignes du géomètre, car les sens ne nous donnent aucune ligne droite, aucune courbe, qui satisfasse à la définition. Le cercle ne rencontre pas la tangente en un seul point, mais par plusieurs, comme le remarquait Protagoras, dans ses attaques contre les géomètres. Et les mouvements ne sont pas réels ; les révolutions du ciel ne concordent complètement avec les mouvements et les révolutions que donnent les calculs astronomiques. Enfin les étoiles ne sont pas de la même nature que les points. D’autres philosophes admettent aussi l’existence de ces substances intermédiaires entre les idées et les objets sensibles ; mais ils ne les séparent point des objets sensibles ; ils disent qu’elles sont dans ces objets mêmes. Il serait trop long d’énumérer toutes les impossibilités qu’entraÃne une pareille doctrine. Remarquons cependant que non seulement les êtres intermédiaires, mais que les idées elles-mêmes seront nécessairement aussi dans les objets sensibles ; car les mêmes raisons s’appliquent également dans les deux cas. De plus, on aura ainsi nécessairement deux solides dans un même lieu ; et ils ne seront pas immobiles, puisqu’ils seront dans des objets sensibles en mouvement. En un mot, à quoi bon admettre des êtres intermédiaires, pour les placer dans les objets sensibles ? Les mêmes absurdités que tout à l’heure se reproduiront sans cesse. Ainsi, il y aura un ciel en dehors du ciel qui tombe sous nos sens ; seulement il n’en sera pas séparé, il sera dans le même lieu ce qui est plus inadmissible encore que le ciel séparé. Chapitre 3 Que faut-il décider sur tous ces points, pour arriver ensuite à la vérité ? Il y a là des difficultés nombreuses. Les difficultés relatives aux principes ne le sont pas moins. Faut-il regarder les genres comme éléments et principes ; ou bien ce titre n’appartient-il pas plutôt aux parties constitutives de chaque être ? Par exemple, les éléments, les principes du mot, paraissent être les lettres qui concourent à la formation de tous les mots, et non pas le mot en général. De même encore nous appelons éléments, dans la démonstration des propriétés des figures géométriques, ces démonstrations qui se trouvent au fond des autres, soit dans toutes, soit dans la plupart. De même enfin pour les corps et ceux qui n’admettent qu’un élément, et ceux qui en admettent plusieurs, regardent comme principe ce dont le corps est composé, ce dont l’ensemble le constitue. Ainsi, l’eau, le feu, et les autres éléments, sont pour Empédocle les éléments constitutifs des êtres, et non point des genres qui comprennent ces êtres. En outre, si l’on veut étudier la nature d’un objet quelconque, d’un lit par exemple, on cherche de quelles pièces il est composé, quel est l’arrangement de ces pièces, et alors on connaÃt sa nature. D’après ces considérations, les genres ne seraient pas les principes des êtres. Mais si l’on songe que nous ne connaissons rien que par les définitions, et que les genres sont les principes des définitions, il faut bien aussi que les genres soient les principes des êtres définis. D’ailleurs, s’il est vrai de dire que c’est acquérir la connaissance des êtres que d’acquérir celle des espèces auxquelles les êtres se rapportent, les genres seront encore principes des êtres puisqu’ils sont les principes des espèces. Quelques-uns même de ceux qui regardent comme éléments des êtres l’unité ou l’être, ou le grand et le petit, semblent en faire des genres. Toutefois les principes des êtres ne peuvent pas être en même temps les genres et les éléments constitutifs. L’essence ne comporte pas deux définitions — or, autre serait la définition des principes considérés comme genres ; autre, si on les considérait comme éléments constitutifs. D’ailleurs, si ce sont surtout les genres qui sont principes, faut-il regarder comme principes les genres les plus élevés, ou ceux immédiatement supérieurs aux individus ? C’est là encore un sujet d’embarras. Si les principes sont ce qu’il y a de plus général, évidemment les genres les plus élevés seront principes, car ils embrassent tous les êtres. On admettra par conséquent comme principes des êtres les premiers des genres ; et alors l’être, l’unité, seront principes et substances ; car ce sont surtout ces genres qui embrassent tous les êtres. D’un autre côté, tous les êtres ne peuvent pas être rapportés à un seul genre, soit à l’unité, soit à l’être. Il faut nécessairement que les différences de chaque genre soient, et que chacune de ces différences soit une or, il est impossible que ce qui désigne les espèces du genre désigne aussi les différences propres, il est impossible que le genre existe sans ses espèces. Si donc l’unité ou l’être est le genre, il n’y aura pas de différence qui soit, ni qui soit une. L’unité et l’être ne sont donc pas des genres, et par conséquent ils ne sont pas des principes, puisque ce sont les genres qui sont principes. Ajoutez à cela que les êtres intermédiaires pris avec leurs différences seront des genres jusqu’à ce qu’on arrive à l’individu. Or, les uns sont, il est vrai, des genres, mais d’autres n’en sont pas. En outre, les différences sont plutôt principes que les genres. Mais si les différences sont principes, il y a en quelque sorte une infinité de principes, surtout si l’on prend pour point de départ le genre le plus élevé. Remarquons d’ailleurs que, bien que l’unité nous paraisse surtout avoir le caractère de principe, l’unité étant indivisible, et ce qui est indivisible l’étant ou bien sous le rapport de la quantité, ou bien sous celui de l’espèce, et ce qui l’est sous le rapport de l’espèce ayant l’antériorité ; enfin les genres se divisant en espèces, l’unité doit être plutôt l’individu l’homme, en effet, n’est pas le genre des hommes particuliers. D’ailleurs, il n’est pas possible, dans les choses où il y a antériorité et postériorité, qu’il y ait, en dehors d’elles, quelque chose qui soit leur genre. La dyade, par exemple, est le premier des nombres ; il n’y a donc point, en dehors des diverses espèces de nombres, un autre nombre qui soit le genre commun ; il n’y a point non plus dans la géométrie une autre figure en dehors des diverses espèces de figures. Et s’il n’y a point ici de genre en dehors des espèces, à plus forte raison n’y en aura-t-il point dans les autres choses. Car c’est surtout pour les êtres mathématiques qu’il paraÃt y avoir des genres. Pour les individus il n’y a ni priorité, ni postériorité, et de plus, partout où il y a mieux et pire, le mieux a la priorité ; il n’y a donc pas de genres, principes des individus. D’après ce qui précède, les individus doivent plutôt être regardés comme les principes des genres. Mais, d’un autre côté, comment concevoir que les individus soient principes ? Il ne serait point facile de le démontrer. Il faut qu’alors la cause, le principe, soit en dehors des choses dont elle est le principe, qu’elle puisse en être séparée. Mais quelle raison a-t-on de supposer qu’il y a un principe de ce genre en dehors du particulier, si ce n’est que ce principe est quelque chose d’universel, et qu’il embrasse tous les êtres ? Or, si l’on se rend à cette considération, ce qu’il y a de plus général doit être plutôt regardé comme principe, et alors les principes seraient les genres les plus élevés. Chapitre 4 Il y a une difficulté qui se rattache aux précédentes, difficulté plus embarrassante que toutes les autres, et dont l’examen nous est indispensable ; c’est celle dont nous allons parler. S’il n’y a pas quelque chose en dehors du particulier, et s’il y a une infinité de choses particulières, comment est-il possible d’acquérir la science de l’infinité des choses ? ConnaÃtre un objet, c’est, pour nous, connaÃtre son unité, son identité et son caractère général. Or, si cela est nécessaire, et s’il faut qu’en dehors des choses particulières il y ait quelque chose, il y aura nécessairement, en dehors des choses particulières, les genres, soit les genres les plus rapprochés des individus, soit les genres les plus élevés. Mais nous avons trouvé tout à l’heure que cela était possible. Admettons d’ailleurs qu’il y a véritablement quelque chose en dehors de l’ensemble de l’attribut et de la substance, admettons qu’il y a des espèces. Mais l’espèce est-elle quelque chose en dehors de tous les objets, ou est-elle seulement en dehors de quelques objets sans être en dehors de quelques autres, ou enfin n’est-elle en dehors d’aucun ? Dirons-nous donc qu’il n’y a rien en dehors de choses particulières ? Alors il n’y aurait rien d’intelligible, il n’y aurait plus que des objets sensibles, il n’y aurait science de rien, à moins qu’on ne nomme science, la connaissance sensible. Il n’y aurait même rien d’éternel, ni d’immobile ; car tous les objets sensibles sont sujets à destruction, et sont en mouvement. Or, s’il n’y a rien d’éternel, la production même est impossible. Car il faut bien que ce qui devient soit quelque chose, ainsi que ce qui fait devenir ; et que la dernière des causes productrices soit de tout temps, puisque la chaÃne des causes a un terme, et qu’il est impossible que rien soit produit par le non-être. D’ailleurs, là où il y a naissance et mouvement, il y aura nécessairement un terme aucun mouvement n’est infini, et même tout mouvement a un but. Et puis il est impossible que ce qui ne peut devenir devienne ; mais ce qui devient, existe nécessairement avant de devenir. De plus, si la substance existe de tout temps, à plus forte raison faut-il admettre l’existence de l’essence au moment où la substance devient. En effet, s’il n’y a ni essence, ni substance, il n’existe absolument rien. Et, comme cela est impossible, il faut bien que la forme et l’essence soient quelque chose, en dehors de l’ensemble de la substance et de la forme. Mais si l’on adopte cette conclusion, une nouvelle difficulté se présente. Dans quels cas admettra-t-on cette existence séparée, et dans quels cas ne l’admettra-t-on point ? Car il est évident qu’on ne l’admettra pas dans tous les cas. En effet, nous ne pouvons pas dire qu’il y a une maison en dehors des maisons particulières. Ce n’est pas tout. La substance de tous les êtres est-elle une substance unique ? La substance de tous les hommes est-elle unique, par exemple ? Mais cela serait absurde ; car, tous les êtres n’étant pas un être unique, mais un grand nombre d’êtres, et d’êtres différents, il n’est pas raisonnable qu’ils n’aient qu’une seule substance. Et d’ailleurs comment la substance de tous ces êtres devient-elle chacun d’eux ; et comment la réunion de ces deux choses, l’essence et la substance, constitue-t-elle l’individu ? Voici une nouvelle difficulté relative aux principes. S’ils n’ont que l’unité générique, rien ne sera un numériquement, ni l’unité elle-même, ni l’être lui-même. Et alors, comment la science pourra-t-elle exister, puisqu’il n’y aura pas d’unité qui embrasse tous les êtres ? Admettrons-nous donc leur unité numérique ? Mais si chaque principe n’existe que comme unité, et que les principes n’aient aucun rapport entre eux ; s’ils ne sont pas comme les choses sensibles en effet, lorsque telle et telle syllabe sont de même espèce, leurs principes sont de même espèce, ces principes n’étant pas réduits à l’unité numérique ; s’il n’en est pas ainsi, si les principes des êtres sont réduits à l’unité numérique, il n’existera rien autre chose que les éléments. Un, numériquement, ou individuel, c’est la même chose, puisque nous appelons individuel ce qui est un par le nombre l’universel, au contraire, c’est ce qui est dans tous les individus. Si donc les éléments du mot avaient pour caractère l’unité numérique, il y aurait nécessairement un nombre de lettres égal en somme à celui des éléments du mot, n’y ayant aucune identité ni entre deux, ni entre un plus grand nombre de ces éléments. Une difficulté qui ne le cède à aucune autre et qu’ont également laissée à l’écart et les philosophes d’aujourd’hui et leurs devanciers, c’est de savoir si les principes des choses périssables et ceux des choses impérissables sont les mêmes principes, ou s’ils sont différents. Si les principes sont, en effet, les mêmes, comment se fait-il que parmi les êtres les uns soient périssables et les autres impérissables, et pour quelle raison en est-il ainsi ? Hésiode et tous les Théologiens n’ont cherché que ce qui pouvait les convaincre eux-mêmes, et n’ont pas songé à nous. Des principes ils font des dieux, et les dieux ont produit toutes choses ; puis ils ajoutent que les êtres qui n’ont pas goûté le nectar et l’ambroisie sont destinés à périr. Ces explications avaient sans doute un sens pour eux ; quant à nous, nous ne comprenons même pas comment ils ont pu trouver là des causes. Car, si c’est en vue du plaisir que les êtres touchent à l’ambroisie et au nectar, le nectar et l’ambroisie ne sont nullement causes de l’existence ; si au contraire c’est en vue de l’existence, comment ces êtres seraient-ils éternels, puisqu’ils auraient besoin de nourriture ? Mais nous n’avons pas besoin de soumettre à un examen approfondi, des inventions fabuleuses. Adressons-nous donc à ceux qui raisonnent et se servent de démonstrations, et demandons-leur comment il se fait que, sortis des mêmes principes, quelques-uns des êtres ont une nature éternelle, tandis que les autres sont sujets à destruction. Or, comme ils ne nous apprennent pas quelle est la cause en question, et qu’il y a contradiction dans cet état de choses, il est clair que ni les principes ni les causes des êtres ne peuvent être les mêmes causes et les mêmes principes. Aussi, un philosophe qu’on croirait parfaitement d’accord avec lui-même dans sa doctrine, Empédocle, est-il tombé dans la même contradiction que les autres. Il pose, en effet, un principe, la Discorde, comme cause de la destruction. Et cependant on n’en voit pas moins ce principe engendrer tous les êtres, hormis l’unité ; car tous les êtres, excepté Dieu, sont produits par la Discorde. Écoutons Empédocle Telles furent les causes de ce qui fut, de ce qui est, de ce qui sera dans l’avenir ; Qui firent naÃtre les arbres, et les hommes, et les femmes. Et les bêtes sauvages, et les oiseaux, et les poissons qui vivent dans les ondes, Et les dieux à la longue existence. Et même c’est-là une opinion qui résulte de bien d’autres passages. S’il n’y avait pas dans les choses une Discorde, tout, suivant Empédocle, serait réduit à l’unité. En effet, quand, les choses sont réunies, alors s’élève enfin la Discorde. Il suit de là que la Divinité, l’être heureux par excellence, connaÃt moins que les autres êtres ; car elle ne connaÃt pas tous les éléments. Elle n’a pas en elle la Discorde ; et c’est le semblable qui connaÃt le semblable Par la terre, dit Empédocle, nous voyons la terre, l’eau par l’eau ; Par l’air, l’air divin, et par le feu, le feu dévorant ; L’Amitié par l’Amitié, la Discorde par la Discorde fatale. Il est donc manifeste, pour revenir au point d’où nous sommes partis, que la Discorde, chez ce philosophe, est tout autant cause d’être que cause de destruction. De même l’Amitié est tout autant cause de destruction que d’être. En effet, quand elle réunit les êtres, et les amène à l’unité, elle détruit tout ce qui n’est pas l’unité. Ajoutez qu’Empédocle n’assigne au changement lui-même aucune cause ; il dit seulement qu’il en fut ainsi Alors que la puissante Discorde eut grandi, Et qu’elle se fut élancée pour s’emparer de ses honneurs, au jour marqué par le temps ; Le temps, qui se partage alternativement entre la Discorde et l’Amitié ; le temps qui a précédé même le majestueux serment ; Comme si le changement était nécessaire mais il n’assigne pas de cause à cette nécessité. Toutefois Empédocle a été d’accord avec lui-même en ce point, qu’il admet, non pas que parmi les êtres les uns sont périssables, les autres impérissables, mais que tout est périssable, excepté les éléments. La difficulté que nous nous étions proposée était celle-ci Pourquoi, si tous les êtres viennent des mêmes principes, les uns sont-ils périssables, les autres impérissables ? Or, ce que nous avons dit précédemment suffit pour montrer que les principes de tous les êtres ne sauraient être les mêmes. Mais si les principes sont différents, une difficulté se présente seront-ils impérissables eux aussi, ou périssables ? Car, s’ils sont périssables, il est évident qu’ils viennent nécessairement eux-mêmes de quelque chose, puisque tout ce qui se détruit retourne à ses éléments. Il s’ensuit donc qu’il y aurait d’autres principes antérieurs aux principes mêmes. Or cela est impossible, soit que la chaÃne des causes ait une limite, soit qu’elle se prolonge à l’infini. D’ailleurs, si l’on anéantit les principes, comment y aura-t-il des êtres périssables ? Et si les principes sont impérissables, pourquoi, parmi ces principes impérissables, les uns produisent-ils des êtres périssables, et les autres, des êtres impérissables ? Cela n’est pas conséquent ; c’est une chose impossible, ou qui du moins demanderait de longues explications. Enfin, aucun philosophe n’a admis que les êtres eussent des principes différents ; tous ils disent que les principes de toutes choses sont les mêmes. Mais c’est qu’ils passent par-dessus la difficulté que nous nous sommes proposée, et qu’ils la regardent comme un point peu important. Une question difficile entre toutes à l’examen, et d’une importance capitale pour la connaissance de la vérité, c’est de savoir si l’être et l’unité sont substances des êtres ; si ces deux principes ne sont pas autre chose que l’unité et l’être, chacun de son côté ; ou bien si nous devons nous demander qu’est-ce que l’être et l’unité, supposé qu’ils aient pour substance une nature autre qu’eux-mêmes. Car telles sont, sur ce sujet, les diverses opinions des philosophes Platon et les Pythagoriciens prétendent, en effet, que l’être ni l’unité ne sont pas autre chose qu’eux-mêmes ; que tel est leur caractère. L’unité en soi et l’être en soi, voilà , selon ces philosophes, ce qui constitue la substance des êtres. Les Physiciens sont d’un autre avis. Empédocle, par exemple, comme pour ramener son principe à un terme plus connu, explique ce que c’est que l’unité ; car on peut conclure de ses paroles, que l’être c’est l’Amitié ; l’Amitié est donc pour Empédocle la cause de l’unité de toutes les choses. D’autres prétendent que c’est le feu, d’autres que c’est l’air qui est cette unité et cet être, d’où sortent tous les êtres, et qui les a tous produits. Il en est de même de ceux-là encore qui ont admis la pluralité dans les éléments ; car ils doivent nécessairement compter autant d’êtres et autant d’unités qu’ils reconnaissent de principes. Si l’on n’établit pas que l’unité et l’être soient une substance, il s’ensuit qu’il n’y a plus rien de général, puisque ces principes sont ce qu’il y a de plus général au monde, et que si l’unité en soi, si l’être en soi, ne sont pas quelque chose, à plus forte raison n’y aura-t-il pas d’autre être en dehors de ce qu’on nomme le particulier. De plus, si l’unité n’était pas une substance, il est évident que le nombre même ne pourrait exister comme nature d’êtres séparée. En effet, le nombre se compose de monades, et la monade c’est ce qui est un. Mais si l’unité en soi, si l’être en soi, sont quelque chose, il faut bien qu’ils soient la substance, car il n’y a rien, sinon l’unité et l’être, qui se dise universellement de tous les êtres. Mais si l’être en soi et l’unité en soi sont quelque chose, il nous sera bien difficile de concevoir comment il pourrait y avoir autre chose en dehors de l’unité et l’être, c’est-à -dire, comment il y aura plus d’un être, puisque ce qui est autre chose que l’être n’est pas. Il s’ensuit donc nécessairement ce que disait Parménide, que tous les êtres se réduisent à un, et que l’unité c’est l’être. Mais c’est là une double difficulté ; car, que l’unité ne soit pas une substance, ou qu’elle en soit une, il est également impossible que le nombre soit une substance impossible dans le premier cas, nous avons déjà dit pourquoi. Dans le second cas, même difficulté que pour l’être. D’où viendrait, en effet, une autre unité en dehors de l’unité ? car, dans le cas dont il s’agit, il y aurait nécessairement deux unités. Tous les êtres sont, ou un seul être, ou une multitude d’êtres, si chaque être est unité. Ce n’est pas tout encore. Si l’unité était indivisible, il n’y aurait absolument rien, et c’est ce que pense Zénon. En effet, ce qui ne devient ni plus grand quand on lui ajoute, ni plus petit quand on lui retranche quelque chose, n’est pas, selon lui, un être, car la grandeur est évidemment l’essence de l’être. Et si la grandeur est son essence, l’être est corporel, car le corps est grandeur dans tous les sens. Or, comment, ajoutée aux êtres, la grandeur rendra-t-elle les uns plus grands, sans produire cet effet sur les autres ? Par exemple, comment le plan et la ligne grandiront-ils, et jamais le point ni la monade ? Toutefois, comme la conclusion de Zénon est un peu dure, et que d’ailleurs il peut y avoir quelque chose d’indivisible, on répond à l’objection que, dans le cas de la monade et du point, l’addition n’augmente pas l’étendue, mais le nombre. Mais alors, comment un seul ou même plusieurs êtres de cette nature formeront-ils une grandeur ? Autant vaudrait prétendre que la ligne se compose de points. Que si l’on admet que le nombre est, comme le disent quelques-uns, produit par l’unité elle-même, et par une autre chose qui n’est pas unité, il n’en restera pas moins à chercher, pourquoi et comment le produit est tantôt un nombre et tantôt une grandeur ; puisque le non-un, c’est l’inégalité, c’est la même nature dans les deux cas. En effet, on ne voit pas comment l’unité avec l’inégalité, ni un nombre avec elle, peuvent produire des grandeurs. Chapitre 5 Une difficulté se rattache aux précédentes ; la voici Les nombres, les corps, les plans et les points sont-ils ou non des substances ? Si ce ne sont pas des substances, nous ne connaissons bien ni ce que c’est que l’être, ni quelles sont les substances des êtres. En effet, ni les modifications, ni les mouvements, ni les relations, ni les dispositions, ni les proportions ne paraissent avoir aucun des caractères de la substance. On rapporte toutes ces choses comme attributs à un sujet, on ne leur donne jamais une existence indépendante. Quant aux choses qui paraissent le plus porter le caractère de la substance, telles que l’eau, la terre, le feu, qui constituent les corps composés, le chaud et le froid dans ces choses, et les propriétés de cette sorte, sont des modifications, et non des substances. C’est le corps sujet de ces modifications qui seul persiste, comme être, comme substance véritable. Et pourtant le corps est moins substance que la surface ; celle-ci l’est moins que la ligne, et la ligne moins que la monade et le point. C’est par eux que le corps est déterminé, et il est possible, ce semble, qu’ils existent indépendamment du corps ; mais sans eux l’existence du corps est impossible. C’est pourquoi, tandis que le vulgaire, tandis que les philosophes des premiers temps admettent que l’être et la substance, c’est le corps, et que les autres choses sont des modifications du corps, de sorte que les principes des corps sont aussi les principes des êtres, des philosophes plus récents, et qui se sont montrés plus vraiment philosophes que leurs devanciers, admettent pour principes les nombres. Ainsi donc que nous l’avons dit, si les êtres en question ne sont pas des substances, il n’y a absolument aucune substance, ni aucun être, car les accidents de ces êtres ne méritent certainement pas d’être nommés des êtres. Mais cependant si, d’un côté, l’on reconnaÃt que les longueurs et les points sont plus des substances que les corps, et si, de l’autre, nous ne voyons parmi quels corps il faudra les ranger – car on ne peut les placer parmi les objets sensibles, puisqu’il n’y aurait aucune substance. En effet, ce ne sont là , évidemment, que des divisions du corps soit en largeur, soit en profondeur, soit en longueur. Enfin, ou bien toute figure quelconque se trouve également dans le solide, ou bien il n’y en a aucune. De sorte que si l’on ne peut dire que l’Hermès existe dans la pierre avec ses contours déterminés, la moitié du cube n’est pas non plus dans le cube avec sa forme déterminée ; il n’y a même dans le cube aucune surface réelle. Car si une surface quelconque y existait réellement, ce qui détermine la moitié du cube y aurait-elle aussi une existence réelle. Le même raisonnement s’applique encore à la ligne, au point et à la monade. Par conséquent, si, d’un côté, le corps est la substance par excellence, si, de l’autre, les surfaces, les lignes et les points le sont plus que le corps même, et si d’ailleurs, ni les surfaces, ni les lignes, ni les points, ne sont des substances, nous ne savons bien, ni ce que c’est que l’être, ni quelle est la substance des êtres. Ajoutez à ce que nous venons de dire, des conséquences déraisonnables relativement à la production et à la destruction. Dans ce cas, en effet, la substance qui auparavant n’était pas, existe maintenant, celle qui était auparavant, cesse d’exister. N’est-ce pas là , pour la substance, une production et une destruction ? Au contraire, ni les points, ni les lignes, ni les surfaces ne sont susceptibles, ni de se produire ni être détruits ; et pourtant tantôt ils existent, et tantôt n’existent pas. Voyez ce qui se passe dans le cas dé la réunion ou de la séparation de deux corps s’ils se rapprochent, il n’y a qu’une surface ; s’ils se séparent, il y en a deux. Ainsi une surface, des lignes, des points, n’existent plus, ils ont disparu ; tandis qu’après la séparation, des grandeurs existent, qui n’existaient pas auparavant ; mais le point, objet indivisible, n’a pas été divisé en deux parties. Enfin, si les surfaces sont sujettes à production et à destruction, elles viennent de quelque chose. Mais il en est des êtres en question à peu près comme de l’instant actuel dans le temps. II n’est pas possible qu’il devienne et périsse ; toutefois, comme il n’est pas une substance, il paraÃt sans cesse différent. Évidemment les points, et les lignes, et les plans, sont dans un pareil cas ; car on peut leur appliquer les mêmes raisonnements. Ce ne sont là , aussi bien que l’instant actuel, que des limites ou des divisions. Chapitre 6 Une question qu’on doit absolument se poser, c’est de savoir pourquoi il faut, en dehors des êtres sensibles et des êtres intermédiaires, chercher encore d’autres objets, par exemple, ceux qu’on appelle idées. Le motif, dit-on, c’est que si les êtres mathématiques différent par quelque autre endroit des objets de ce monde, ils n’en diffèrent toutefois nullement par celui-ci, qu’un grand nombre de ces sont d’espèce semblable. De sorte que leurs principes ne seront pas bornés à l’unité numérique. Il en sera comme des principes des mots dont nous nous servons, qui se distinguent, non pas numériquement, mais génériquement ; à moins toutefois qu’on ne les compte dans telle syllabe, dans tel mot déterminé, car dans ce cas ils ont aussi l’unité numérique. Les êtres intermédiaires sont dans ce cas. Là aussi les similitudes d’espèce sont en nombre infini. De sorte que s’il n’y a pas, en dehors des êtres sensibles et des êtres mathématiques, d’autres êtres, ceux que quelques philosophes appellent idées, alors il n’y a pas de substance, une en nombre et en genre ; et alors les principes des êtres ne sont point des principes qui se comptent numériquement ; ils n’ont que l’unité générique. Et si cette conséquence est nécessaire, il faut bien qu’il y ait des idées. En effet, quoique ceux qui admettent leur existence n’articulent pas bien leur pensée, voici ce qu’ils veulent dire, et telle est la conséquence nécessaire de leurs principes. Chacune des idées est une substance, aucune n’est accident. D’un autre côté, si l’on établit que les idées existent, et que les principes sont numériques et non génériques, nous avons dit plus haut quelles impossibilités en résultent nécessairement. Une recherche difficile se lie aux questions précédentes Les éléments sont ils en puissance ou de quelque autre manière ? S’ils sont de quelque autre manière, comment y aura-t-il une autre chose antérieure aux principes car la puissance est antérieure à telle cause déterminée, et il n’est pas nécessaire que la cause qui est en puissance passe à l’acte ? [1003a] Mais si les éléments ne sont qu’en puissance, il est possible qu’aucun être n’existe. Pouvoir être, c’est n’être pas encore ; puisque ce qui devient, c’est ce qui n’était pas, et que rien ne devient, qui n’a pas la puissance d’être. Telles sont les difficultés qu’il faut se proposer relativement aux principes. Il faut se demander encore si les principes sont universels, ou bien s’ils sont des éléments particuliers. S’ils sont universels, ils ne sont pas des essences, car ce qui est commun à plusieurs êtres, indique qu’un être est de telle façon, et non qu’il est proprement tel être. Or, l’essence, c’est ce qu’est proprement un être. Et si l’universel est un être déterminé, si l’attribut commun aux êtres peut être posé comme essence, il y aura dans le même être plusieurs animaux, Socrate, l’homme, l’animal ; puisque dans la supposition, chacun des attributs de Socrate indique l’existence propre et l’unité d’un être. Si les principes sont universels, voilà ce qui s’ensuit. Mais s’ils ne sont pas universels, s’ils sont comme de éléments particuliers, ils ne peuvent être l’objet d’une science puisque toute science porte sur l’universel. Par conséquent, qu’il devra y avoir d’autres principes antérieurs à eux, et marqués du caractère de l’universalité, pour qu’il puisse y avoir une science des principes. Livre 4 Chapitre 1 Il est une science qui considère l’Être en tant qu’Être, et qui considère en même temps toutes les conditions essentielles que l’Être peut présenter. Cette science-là ne peut se confondre d’aucune manière avec les autres sciences, qui ont un sujet particulier, puisque pas une de ces sciences n’étudie d’une manière universelle l’Être en tant qu’Être ; mais, le découpant dans une de ses parties, elles limitent leurs recherches aux phénomènes qu’on peut observer dans cette partie spéciale. C’est ce que font, par exemple, les sciences mathématiques. Mais, quand on ne s’attache, comme nous, qu’aux principes et aux causes les plus élevées, on voit clairement que ces principes doivent être ceux d’une certaine nature prise en soi. Si donc les philosophes qui ont étudié les éléments des choses étudiaient, eux aussi, ces mêmes principes, il en résulte nécessairement que les éléments vrais de l’Être doivent être non pas accidentels, mais essentiels ; et voilà pourquoi nous, aussi bien que nos devanciers, nous essayons de découvrir les éléments de l’Être en tant qu’Être. Chapitre 2 Le mot d’Être peut avoir bien des acceptions ; mais toutes ces acceptions diverses se rapportent à une certaine unité, et à une réalité naturelle, unique pour toutes ces acceptions. Ce n’est pas un mot simplement homonyme ; mais il en est du mot Être comme du mot Sain, qui peut s’appliquer à tout ce qui concerne la santé, tantôt à ce qui la conserve, tantôt à ce qui la produit, tantôt à ce qui l’indique, et tantôt à l’être qui peut en jouir. [1003b] C’est encore le même rapport que soutient le mot Médical avec tout ce qui concerne la médecine. Médical peut se dire tout aussi bien, et de ce qui possède la science de la médecine, et de ce qui est doué de qualités naturelles pour l’acquérir, et du résultat que la médecine obtient. Nous pourrions citer bien d’autres mots qui présentent des diversités analogues à celles-là . C’est absolument de cette façon que le mot d’Être peut recevoir des acceptions multiples, qui toutes cependant se rapportent à un seul et unique principe. Ainsi, Être se dit tantôt de ce qui est une substance réelle, tantôt de ce qui n’est qu’un attribut de la substance, tantôt de ce qui tend à devenir une réalité substantielle, tantôt des destructions, des négations, des propriétés de la substance, tantôt de ce qui la fait ou la produit, tantôt de ce qui est en rapport purement verbal avec elle, ou enfin de ce qui constitue des négations de toutes ces nuances de l’Être, ou des négations de l’Être lui-même. C’est même en ce dernier sens que l’on peut dire du Non-être qu’il Est le Non-être. De même donc qu’il appartient à une seule science de s’occuper de tout ce qui regarde la santé, comme nous venons de le dire, de même aussi pour toute autre chose ; car ce ne sont pas seulement les attributs essentiels d’un seul être que doit considérer une seule et unique science ; ce sont, de plus, toutes les relations de cette unique nature ; car, à certains égards, ces derniers attributs s’appliquent bien aussi à ce seul être. Il faut donc en conclure que considérer les êtres en tant qu’êtres est l’objet d’une seule et même science. En toutes choses, la science s’occupe principalement du primitif, c’est-à -dire, de ce dont tout le reste dépend et tire son appellation. Or, si ce primitif est la substance, le philosophe a le devoir d’étudier les principes et les causes des substances. Pour un genre d’êtres tout entier, quel qu’il soit, il n’y a jamais qu’une seule manière de les percevoir et une seule science ; et par exemple, la grammaire, tout en restant une seule et même science, étudie tous les mots du langage. Si donc c’est à une science génériquement une, d’étudier toutes les espèces de l’Être, chacune de ces espèces seront étudiées par des espèces particulières de cette science. L’Être et l’Un sont identiques et sont une seule et même réalité naturelle, parce qu’ils se suivent toujours l’un l’autre, comme principe et comme cause, et non pas seulement comme étant exprimés par un seul et même mot. Par conséquent, il n’y a aucun inconvénient à les prendre pour semblables ; et en cela, il y a plutôt avantage. En effet, c’est bien toujours au fond la même chose de dire C’est Un homme, ou bien C’est un être qui Est homme, ou simplement, Il est homme. On a beau accumuler les mots en les redoublant, on ne dit rien de plus Il est un homme, ou Il est homme, ou bien C’est un être qui est homme. Il est clair que, dans aucun cas, on ne sépare jamais l’idée de l’Être de l’idée de l’Unité, ni dans la production, ni dans la destruction. Il en est tout à fait de même de la notion de l’Un, qu’on ne sépare jamais non plus de la notion d’Être. Il faut en conclure que l’addition d’un de ces termes a tout-à -fait le même sens, et que l’Un ne diffère en rien de l’Être. La substance de chacun d’eux est une, et ne l’est pas accidentellement ; c’est de part et d’autre également la réalité d’un objet individuel. Voilà pourquoi autant il y a d’espèces de l’Un, autant il y en a de l’Être. C’est à une science génériquement une d’étudier ce que sont toutes ces espèces ; je veux dire, par exemple, d’étudier ce que c’est que l’Identité, la Ressemblance, et toutes les autres nuances de cet ordre, en même temps aussi que les notions qui y sont opposées. Or, presque tous les contraires peuvent se réduire à ce principe de l’unité et de la pluralité, [1004a] ainsi que nous l’avons expliqué dans notre Choix des contraires. On comprend qu’il y a autant de parties distinctes dans la philosophie qu’il y a de substances ; et par conséquent, entre ces parties diverses, l’une viendra la première, tandis que l’autre ne viendra qu’en sous-ordre. Comme ce qu’on trouve tout d’abord, ce sont les différents genres, qui ont tous l’Un et l’Être, les sciences doivent se partager de la même manière, en les suivant. Le philosophe est, à cet égard, dans la situation du mathématicien, ainsi qu’on l’appelle, puisque les mathématiques ont également diverses parties, et qu’en elles aussi on peut distinguer une science qui est la supérieure, une autre qui est la seconde, et d’autres qui ne viennent qu’à leur suite. Comme c’est à une même et unique science qu’il appartient de considérer les opposés, et que l’opposé de l’unité, c’est la pluralité, il s’ensuit qu’il appartient aussi à une seule et même science de considérer la négation et la privation, parce qu’on peut étudier, à ce double point de vue, l’Un, auquel la négation, ou la privation, s’adresse. En effet, ou nous disons d’une manière absolue d’une chose qu’elle n’existe pas du tout, ou nous disons simplement qu’elle n’est pas applicable à tel genre. Seulement, dans la négation, la différence est jointe à l’objet Un, contrairement à ce que la négation exprime ; car la négation est la suppression de cette différence, tandis que, dans la privation, il subsiste toujours une certaine nature à laquelle la privation doit s’adresser. Mais, la pluralité étant l’opposé de l’unité, les termes opposés à ceux que nous avons mentionnés, c’est-à -dire l’Autre, le Dissemblable, l’Inégal et toutes les nuances appliquées, soit à ces termes, soit à la pluralité, soit à l’unité, sont l’objet de la science dont nous nous occupons. L’opposition par contraire est bien aussi un de ces termes ; car cette opposition est une différence, et la différence constate l’existence d’une autre chose. Par suite, quoique le mot d’Être puisse être pris en plusieurs sens, et que tous les termes dont nous venons de parler puissent aussi en avoir plusieurs, ce n’en est pas moins l’objet d’une seule science de les étudier tous. Car ce n’est pas la pluralité des acceptions qui exige une autre science, mais il en faut une autre toutes les fois que les définitions ne se rapportent pas directement à un seul et même objet, oui ne sont pas en quelque relation avec lui. Mais, si tout se rapporte au primitif, et si par exemple tout ce qui reçoit le nom d’Un doit être rapporté à l’Un primitif, cette remarque s’applique également bien à l’idée du Même, à celle de l’Autre, et à celle des Contraires. C’est là ce qui fait que, après avoir distingué toutes les acceptions diverses d’un mot, il faut avoir soin de montrer comment elles s’appliquent au primitif, dans chacune des catégories. Ainsi, l’une de ces acceptions vient de ce que l’être en question possède ces qualités ; l’autre, de ce qu’il les produit ; une troisième, de ce qu’il est exprimé selon tels autres modes analogues à ceux-là . Il est donc clair, comme nous l’avons dit en posant ces questions, que c’est à une seule science d’étudier toutes ces différences et la substance qu’elles affectent ; et c’était là un des problèmes signalés par nous. [1004b] Le devoir du philosophe, c’est de pouvoir en ceci tout comprendre ; car, si ce n’était pas lui, quel autre aurait à examiner des questions comme les suivantes  Socrate est-il une seule et même chose que Socrate assis ? Telle unité est-elle contraire à telle autre unité ? Et qu’est-ce que le contraire ? En combien de sens peut-il être compris ? » Il ya encore une foule d’autres questions qui ressemblent à celles-là . Mais, comme les modes essentiels qu’on vient d’indiquer sont ceux de l’unité, en tant qu’unité, et ceux de l’Être, en tant qu’Être, et non pas en tant que ce sont des nombres, des lignes ou du feu, il en résulte évidemment que c’est à cette science cherchée par nous qu’il appartient de connaÃtre ce que sont ces termes en eux-mêmes, et ce que sont les relations qui s’y appliquent. Il n’est pas moins clair qu’on ne peut pas reprocher à ceux qui s’occupent de ces matières de ne pas les traiter en philosophes ; mais ils se trompent en ce que, la substance étant antérieure à tout le reste, ils n’en soufflent pas mot. Or, de même que le nombre, en tant que nombre, a ses modifications propres – qui sont d’être impair, d’être pair, d’être proportionnel, égal, plus grand, plus petit – et que ces propriétés affectent les nombres pris en eux-mêmes ou dans leurs relations les uns avec les autres, et aussi comme il y a des propriétés spéciales du solide – qui est immobile ou en mouvement, qui n’a pas de poids ou en a –, de même aussi L’Être en tant qu’Être a ses propriétés, et c’est justement à les étudier que le philosophe doit s’appliquer pour découvrir le vrai. Ce qui le prouve bien, c’est que les Dialecticiens et les Sophistes, qui s’affublent du même vêtement que la philosophie, la Sophistique n’étant qu’une philosophie factice, et les Dialecticiens ne se faisant pas faute de parler de tout, et par conséquent aussi de l’Être, qui est le sujet commun de toutes les recherches, les Sophistes, dis-je, et les Dialecticiens dissertent tous sur ces matières, parce qu’en effet ces matières-là sont évidemment le domaine de la philosophie et son domaine propre. Ainsi, la Sophistique et la Dialectique tournent dans le même cercle de questions que la philosophie ; mais la philosophie se distingue, de celle-ci par la manière dont elle emploie ses forces, et de celle-là par l’intention qu’elle apporte dans la conduite de la vie. La Dialectique essaie de connaÃtre les choses que la philosophie connaÃt à fond ; et, quant à la Sophistique, elle n’a qu’une apparence sans réalité ; elle semble être, mais elle n’est pas. Quoi qu’il en soit, la privation est la seconde des deux combinaisons que peuvent présenter les contraires ; tous ils se ramènent à l’Être et au Non-être, à l’unité et à la pluralité. Ainsi, par exemple, on peut classer l’inertie dans l’unité, et le mouvement dans la pluralité. Or, on est assez généralement d’accord pour admettre que les êtres et la substance viennent des contraires. Aussi, tous les philosophes reconnaissent-ils que les principes sont contraires les uns les voyant dans l’impair et le pair ; les autres, dans le chaud et le froid ; ceux-ci, dans le fini et l’infini ; ceux-là , dans l’ la Discorde ; toutes ces oppositions et tant d’autres pouvant se réduire à celle de l’unité et de la pluralité. Supposons donc qu’en effet elles s’y réduisent, comme l’a démontré l’analyse que nous en avons faite, [1005a] et que les principes se rangent absolument dans ces deux classes, comme ils y ont été rangés par nos devanciers. Ces considérations ne peuvent que nous faire voir une fois de plus que c’est à une seule et même science d’étudier l’Être ; car toutes les choses, ou sont elles-mêmes des contraires, ou viennent de contraires, qui les produisent. Or, les principes des contraires eux-mêmes sont l’unité et la pluralité, objets d’une même et seule science, soit que ces termes n’aient qu’une acception, soit qu’ils en aient plusieurs, comme c’est peut-être le cas. Mais, bien que l’unité puisse s’entendre en plusieurs sens, tout le reste de ces acceptions diverses se ramènera à l’acception primitive, ainsi que les contraires ; et, en supposant même que l’Être et l’Un ne soient pas des universaux identiques pour toutes choses, ou qu’ils n’existent pas séparément, comme sans doute ils n’existent point, en effet, de cette façon, il n’en est pas moins vrai que toutes ces acceptions se rapportent directement à l’unité, ou qu’elles viennent à sa suite. C’est là ce qui fait que ce n’est pas au géomètre d’étudier ce qu’on doit entendre par le Contraire, le Parfait, l’Un, l’Être, le Même, l’Autre ; ou du moins, il ne peut les étudier qu’en en supposant préalablement l’existence. Donc, en résumé, il appartient certainement à une seule et même science d’étudier l’Être en tant qu’Être, avec tous les attributs qui lui sont propres, à ce titre. Et non seulement cette même science doit étudier les substances, mais aussi leurs conditions essentielles ; et, sans parler de celles que nous avons indiquées, elle doit analyser également l’Antérieur et le Postérieur, le Genre et l’Espèce, le Tout et la Partie, et toutes les autres notions qui sont analogues à celles-là . Chapitre 3 si c’est à une seule et même science, ou si c’est à une science différente, qu’il appartient d’étudier ce que, dans les mathématiques, on appelle les Axiomes, en même temps que d’étudier la substance. Pour nous, il est évident que l’examen des axiomes appartient à une seule et même science, qui est celle du philosophe. Les axiomes s’appliquent à tous les êtres sans exception et non point spécialement à tel genre d’êtres, à l’exclusion des autres. De plus, dans toutes les sciences, on se sert des axiomes, parce qu’ils concernent l’Être en tant qu’Être, bien que l’objet de chacune d’elles soit toujours l’Être considéré sous un certain point de vue. Mais elles ne font usage des axiomes que dans la mesure où il leur convient d’y recourir, c’est à lire, selon l’étendue du genre auquel s’adressent leurs démonstrations. Comme il est manifeste que les axiomes s’appliquent à tous les êtres en tant qu’êtres, puisque c’est là leur caractère commun, il en résulte que les étudier revient de droit à celui-là même qui considère l’Être en tant qu’il Est purement et simplement. Aussi, parmi ceux qui consacrent leurs recherches à un genre d’êtres partiels, personne ne pense-t-il à dire un mot des axiomes, pour savoir s’ils sont vrais ou faux, pas plus le géomètre que l’arithméticien. Il n’y a que les Physiciens qui parfois y ont songé ; et ce n’était pas absolument sans raison pour eux, puisqu’ils se persuadaient qu’ils étaient les seuls à s’occuper de la nature considérée dans son ensemble, et à s’occuper de l’Être. Mais il y a une étude plus haute encore que l’étude de la nature, puisque après tout la nature n’est qu’un genre particulier de l’Être, et l’étude de ces matières supérieures regarde la science qui considère l’universel, et ne s’attache qu’à la première substance. [1005b] Sans doute, la Physique est bien aussi une philosophie d’un certain genre ; mais ce n’est pas la philosophie première ; et tout ce que les Physiciens se sont quelquefois hasardés à dire de la vérité et des moyens de la reconnaÃtre, prouve de reste leur complète ignorance des principes mêmes de l’analyse ; car il faut de longues préparations pour en arriver à comprendre de telles questions, et ce n’est pas à des écoliers qu’il appartient de les approfondir. On le voit donc c’est au philosophe et à celui qui étend son regard sur la substance entière, telle qu’elle est dans la nature, de s’enquérir également des principes sur lesquels le raisonnement s’appuie. Mais, de même qu’en chaque science celui qui la connaÃt le mieux est capable d’indiquer aussi les principes les plus solides du sujet dont il s’occupe, de même celui qui étudie l’Être en tant qu’Être a également sur tous les êtres les principes les plus fermes ; et celui-ci, c’est le philosophe. Or, le plus inébranlable de tous les principes est le principe sur lequel il est absolument impossible de se tromper. Un tel principe doit être le plus notoire de tous les principes, puisqu’on ne se trompe jamais que sur les choses qu’on ne connaÃt pas, et il doit être pur de toute hypothèse. Mais le principe qu’il faut nécessairement admettre pour comprendre quoi que ce soit à la réalité, ce principe là n’a rien d’hypothétique ; et la notion que l’on doit posséder nécessairement, pour connaÃtre quoi que ce puisse être à un degré quelconque, est un accompagnement nécessaire de tous les pas qu’on fait. Qu’un tel principe soit le plus incontestable de tous les principes, c’est ce que chacun doit voir. Mais quel est-il précisément ? Après ce qui précède, nous pouvons l’énoncer en disant que le voici  Il est impossible qu’une seule et même chose soit, et tout à la fois ne soit pas, à une même autre chose, sous un même rapport. » Si nous ajoutions quelques développements à cette définition, ce serait uniquement pour répondre aux objections, toutes logiques, qu’on pourrait y opposer ; mais ce principe n’en est pas moins le plus certain de tous sans contredit, et il a bien le caractère que nous lui attribuons. Personne, en effet, ne peut jamais penser qu’une même chose puisse être et n’être pas, comme on prétend quelquefois que le disait Héraclite. Il est vrai qu’il n’est pas nécessaire de penser tout ce qu’on dit. Mais, s’il ne se peut jamais qu’une seule et même chose reçoive les contraires, proposition que nous pourrions appuyer de toutes les considérations qu’on y joint d’ordinaire, et si une pensée est contraire à une autre pensée quand elle la contredit, il s’ensuit évidemment qu’un même esprit ne peut point penser tout ensemble que la même chose est et n’est point ; car celui qui commettrait cette grossière erreur devrait avoir en un seul et même instant des pensées contraire. Aussi, toutes les fois qu’on fait une démonstration, s’appuie-t-on en définitive sur ce principe que nous venons de poser, et qui, par la nature même des choses, est le point de départ obligé de tous les autres axiomes. Chapitre 4 Ainsi que nous l’avons dit, il y a des philosophes qui prétendent qu’il est possible que la même chose soit et ne soit pas, [1006a] et que l’esprit peut avoir la pensée simultanée des contraires. Bon nombre de Physiciens aussi admettent cette possibilité. Mais, quant à nous, nous affirmons qu’il ne se peut jamais qu’en même temps une même chose soit et ne soit pas ; et c’est en vertu de cette conviction que nous avons déclaré ce principe le plus incontestable de tous les principes. Ceux qui essaient de démontrer ce principe lui-même ne le font que faute de lumières suffisantes ; car c’est manquer de lumières que de ne pas discerner les choses qu’on doit chercher à démontrer, et celles qu’on ne doit pas démontrer du tout. Il est bien impossible qu’il y ait démonstration de tout sans exception, puisque ce serait se perdre dans l’infini, et que, de cette façon, il n’y aurait jamais de démonstration possible. Mais, s’il y a des choses qu’on ne doit pas vouloir démontrer, nos contradicteurs seraient bien embarrassés de dire quel principe mériterait cette exception mieux que le nôtre. On pourrait essayer, il est vrai, de démontrer, sous forme de réduction à l’absurde, que ce principe est impossible. Mais il faudrait tout au moins que celui qui le combattrait voulût bien seulement dire quelque chose d’intelligible ; et, s’il est hors d’état de rien dire, il serait assez plaisant de chercher à parler raison avec quelqu’un qui ne donne aucune raison sur le sujet même où ce quelqu’un est si peu raisonnable. Un tel homme, en se conduisant ainsi, n’a guère plus de rapport avec nous que n’en a une plante. A mon sens, démontrer quelque chose par voie de réduction à l’absurde est fort différent de démontrer par la voie ordinaire. Celui qui essaierait de démontrer directement la fausseté du principe établi par nous, paraÃtrait bien vite faire une pétition de principe. Mais, si c’est un autre, si c’est l’adversaire qui est cause de cette faute, c’est une simple réduction à l’absurde, et ce n’est plus là une démonstration. Pour répondre à toutes les objections de ce genre, le vrai moyen n’est pas de demander à l’adversaire de déclarer si la chose est ou n’est pas ; car on verrait sans peine qu’on fait une pétition de principe ; mais c’est de lui demander une énonciation quelconque qui soit intelligible pour lui et pour l’autre interlocuteur. C’est là , en effet, une condition nécessaire du moment qu’il parle ; autrement, il ne se comprendrait pas plus lui-même qu’il ne serait compris d’autrui. Dès que l’adversaire a fait cette concession, la démonstration devient possible, puisqu’on a dès lors un sujet précis. qu’on peut discuter. Mais ce n’est pas celui qui démontre qui a provoqué ce résultat, c’est celui qui accepte la discussion ; car, tout en détruisant le raisonnement par sa base, il n’en accepte pas moins qu’on raisonne avec lui. Un premier point qui est en ceci de toute clarté, c’est qu’on ne peut pas exprimer le nom d’une chose sans dire que la chose est ou n’est point telle chose ; d’où il suit qu’il ne se peut pas pour une chose quelconque qu’elle soit de telle façon, et en même temps ne soit pas de cette façon. De plus, si ce mot Homme, par exemple, exprime un certain être individuel, et que sa définition soit, si l’on veut, Animal-bipède, quand je dis que ce mot représente un certain être individuel, j’entends que, si telle chose est homme, en supposant qu’il s’agisse de l’homme, cette chose aura tous les attributs de l’homme. Peu importe d’ailleurs qu’on prétende qu’un mot peut désigner plusieurs êtres, pourvu seulement que ces êtres soient en nombre défini. [1006b] En effet, on pourrait alors imposer un nom différent à chaque signification particulière. Par exemple, si l’on nie que le mot Homme n’ait qu’un sens, et si l’on prétend qu’il en a plusieurs, il y en aura toujours un qui, pris isolément, serait celui d’Animal-bipède. En supposant aussi qu’il peut y avoir pour l’homme bien d’autres définitions que celle-là , le nombre en est limité ; et à chacune d’elles on peut attribuer un nom différent et spécial. Si on ne le fait pas, et si l’on croit que les significations d’un mot peuvent être en nombre infini, alors il n’y a plus de langage possible. Ne pas exprimer quelque chose d’un et d’individuel, c’est ne rien exprimer du tout ; et, du moment que les mots ne signifient plus rien, il n’est plus possible aux humains de s’entendre entre eux ; et, à dire vrai, il sera tout aussi impossible de s’entendre avec soi-même, puisqu’on ne peut jamais penser qu’à la condition de penser quelque chose d’individuel. Or, dès qu’on peut penser à quelque chose de précis, on peut donner un nom précis à cette chose. Reconnaissons donc, ainsi que nous l’avons dit au début, qu’un mot a toujours une signification et qu’il signifie une seule et unique chose. Il ne se peut certes pas qu’être homme signifie la même chose que n’être pas homme, du moment que le mot Homme signifie non pas seulement l’attribut d’un être, mais bien une seule et même nature et un être individuel. C’est que l’attribut d’un être Un ne doit pas être considéré par nous comme signifiant cet être lui-même ; car, s’il en était ainsi, les attributs de Blanc, de Musicien, et le substantif Homme exprimeraient alors une seule et même chose, un seul et même être. Par suite, tous ces attributs sans exception seraient l’individu, puisqu’ils sont synonymes, et que la même chose ne peut jamais tout ensemble être et n’être pas, si ce n’est par simple homonymie, comme si l’être appelé par nous du nom d’Homme recevait des autres l’appellation de Non-homme. Mais la question n’est pas de savoir si le mot peut à la fois être et n’être pas Homme, mais si la chose, si l’être réel, le peut. Si le mot Homme et le mot Non-homme ne signifient pas des choses différentes, il est clair que n’être pas Homme a aussi le même sens qu’être Homme, et que réciproquement être homme se confond avec n’être pas homme. Ce ne serait alors qu’un seul et même être. Or, être une seule et même chose signifie que la définition est identique et une, comme pour les deux mots de Vêtement et d’Habit. Mais si c’était ici une seule et même chose qui fût exprimée, être homme se confondrait avec ne pas être homme. Or, nous venons de démontrer que les deux sens sont tout différents l’un de l’autre. C’est donc une nécessité, si toutefois cette définition est la véritable, qu’être homme, c’est être Animal-bipède ; car le mot d’Homme n’avait pas un autre sens ; et si c’est là une conclusion nécessaire, il ne se peut plus dès lors qu’il ne soit pas un animal bipède ; car la nécessité d’être homme implique l’impossibilité de ne l’être pas. Donc, il ne se peut point que le même être soit et ne soit pas homme, en un même temps. Le raisonnement est le même si l’on dit que le mot en question est Non-homme ; [1007a] car être Homme et être Non-homme sont des expressions différentes, aussi évidemment qu’être blanc est tout autre chose qu’être Homme. Même en ceci, l’opposition est beaucoup plus forte, de façon que le sens est encore plus différent. Mais, si l’on va jusqu’à soutenir que le blanc et l’individu qui est blanc sont une seule et même chose, nous répondrons, en répétant ce que nous avons déjà dit, à savoir que tout alors sans exception se confond en une seule unité, et que ce ne sont même plus seulement les opposés qui se confondent ainsi. Mais, comme cela ne se peut pas, notre objection conserve toute sa force, pourvu qu’on veuille bien ne répondre qu’à ce qu’on demande. A une interrogation simple et absolue, si l’on répond en ajoutant tout ce qui n’est pas l’objet dont il s’agit, ce n’est plus là répondre à la question ; car rien n’empêche que l’être ne soit tout ensemble homme, blanc, et mille choses de ce genre. Mais, quand on vous demande s’il est vrai que telle chose spéciale soit ou ne soit pas Homme, il faut ne répondre que par un terme qui indique une seule chose, et ne point ajouter que l’objet est blanc ou qu’il est grand ; car, les attributs accidentels étant innombrables, il serait bien impossible de les parcourir tous. Or, il faut, ou s’occuper de tous sans exception, ou ne s’occuper d’aucun. De même aussi, quoi qu’une même chose puisse être des milliers de fois Homme et Non-homme, il ne faut pas répondre, quand on vous demande si tel être est Homme, qu’il est Non-homme en même temps, puisqu’il n’est pas possible d’énumérer tout au long, dans la réponse qu’on fait, tout ce que l’homme est ou n’est pas ; et si, par hasard, on se laisse aller à cette énumération, il n’y a plus moyen de discuter. Soutenir de tels principes, c’est complètement détruire la substance ; c’est détruire ce qui fait qu’elle est ce qu’elle est. Dans ce système, tout se réduit nécessairement à de purs accidents ; la réalité de l’homme et celle de l’animal cessent d’être et disparaissent également. Car, si l’homme est quelque chose de réel, il n’est pas possible que ce quelque chose soit le Non-homme, ou qu’il ne soit pas l’homme ; et ce sont là cependant les seules négations possibles de l’homme. L’être que cette notion désignait était un et individuel ; et c’était bien là exprimer l’essence d’un certain être. Affirmer l’essence d’une chose revient à dire que cette chose ne peut pas être autre chose que ce qu’elle est. Mais si cette chose est tout ensemble l’homme, et aussi le Non-homme, ou la négation de l’homme, alors elle est une chose tout autre. Par conséquent, les partisans de cette théorie seront forcés de dire qu’il ne peut jamais y avoir une définition essentielle de quoi que ce soit, mais qu’il n’y a que des accidents et des attributs. En effet, voici la différence de la substance et de l’attribut. Par exemple, la blancheur n’est qu’un accident et un attribut de l’homme, parce que l’homme peut avoir la blancheur, c’est-à -dire peut être blanc ; mais sa substance n’est pas la blancheur. Si l’on ne peut jamais exprimer que des accidents et des attributs, alors il n’y a plus de primitif auquel l’attribut puisse s’adresser. Si l’accident indiqué toujours une attribution à un sujet, selon la catégorie, [1007b] on se perd nécessairement dans l’infini. Mais il est bien impossible de parcourir l’infini, puisque la combinaison ne peut aller ici au-delà de deux, et qu’il ne se peut jamais que l’attribut soit attribué à un autre attribut, à moins que tous les deux ne soient les attributs d’une seule et même chose. Prenons, par exemple, les attributs Blanc et Musicien ; je puis dire que le musicien est blanc ou que le blanc est musicien, parce que l’un et l’autre sont des attributs possibles de l’homme. Mais on ne peut pas dire de Socrate qu’il soit musicien en telle sorte que ces deux termes soient l’un et l’autre les attributs de quelque être différent de lui. Donc, puisqu’il y a des attributs de ces deux choses, les uns de cette façon et les autres de la façon opposée, tous ceux qui le sont dans le sens où l’on dit que Blanc est un attribut de Socrate, ne peuvent être en nombre infini dans la série remontante ; et, par exemple, Socrate blanc ne peut recevoir encore un autre attribut, parce que de l’ensemble de ces attributs accumulés, il ne pourrait jamais se former une unité individuelle quelconque. A plus forte raison, l’attribut Blanc ne pourrait-il avoir un autre attribut, Musicien, si l’on veut ; car le premier n’est pas plus l’attribut du second que le second ne l’est du premier. Nous avons fait remarquer en même temps qu’il y a des attributs de ce genre, mais qu’il y en a aussi comme l’attribut de Musicien appliqué à Socrate. Pour ceux-ci, ce ne sont pas des attributs attribués à des attributs ; mais les autres ne sont que cela. Par conséquent, tout n’est pas accident et attribut, comme on le dit ; et il y aura un terme aussi pour désigner l’être en tant que substance. Or, s’il en est ainsi, on a démontré par cela même que les contradictoires ne peuvent jamais être attribuées simultanément à une seule et même chose. Si les contradictoires étaient toutes également vraies relativement à la même chose, tout dès lors serait confondu avec tout. Ce serait une seule et même chose qu’une trirème, un mur, un homme, si l’on peut indifféremment ou tout affirmer ou nier tout, comme sont forcés de le soutenir les partisans de la théorie de Protagoras. Si quelqu’un trouve que l’homme n’est pas une trirème, l’homme évidemment n’est pas une trirème ; mais il l’est, si la contradictoire est également vraie. On retombe alors aussi dans la doctrine d’Anaxagore  Toutes choses sont confondues les unes avec les autres » ; et, par cela même, il n’y a plus rien qui soit réellement existant. Mais c’est là , il nous semble, ne parler que de l’indéterminé ; et ces philosophes, tout en croyant parler de l’Être, ne parlent que du Non-être uniquement ; car ce qui n’est qu’à l’état de simple possibilité, et non point à l’état de réalité complète, c’est ce qu’on doit précisément appeler l’indéterminé. On n’en doit pas moins, pour toutes choses, exprimer l’affirmation ou la négation ; car il serait absurde de soutenir que, si chaque être peut recevoir sa propre négation, il ne peut pas aussi recevoir la négation d’un autre être, qui n’est pas lui. Je veux dire, par exemple, que, s’il est vrai de nier de l’homme qu’il soit homme, il est encore plus clair qu’il n’est pas une trirème. Si donc on prétend que l’affirmation d’un objet différent est vraie, la négation ne l’est pas moins nécessairement. Mais, si l’affirmation n’est pas vraie, la négation d’un objet différent sera vraie du premier objet plus encore que la sienne propre. [1008a] Si donc cette dernière lui est applicable, celle de la trirème le lui sera aussi ; et, si cette négation de la trirème est exacte, l’affirmation l’est également. Voilà les conséquences où sont réduits ceux qui soutiennent cette théorie, et qui avancent que ce n’est jamais une nécessité, ou de nier, ou d’affirmer. S’il est vrai que tel être soit Homme et aussi Non-homme indifféremment, il n’y a plus réellement ni Homme ni Non-homme, puisque, pour les deux, il y a aussi deux négations égales ; et si, d’une part, les deux assertions se confondent en une seule, d’autre part, l’assertion opposée sera une assertion unique aussi. Ajoutez que, ou bien il en est ainsi pour toutes les propositions sans exception par exemple, une chose est blanche et n’est pas blanche, une chose est et n’est pas, et de même pour toutes les autres affirmations et négations ; ou bien, il n’en est pas ainsi, et l’observation s’applique aux unes tandis qu’elle ne s’applique pas aux autres. Si elle ne s’applique pas à toutes, c’est qu’on passe condamnation sur celles auxquelles l’observation ne s’applique pas ; et si elle s’applique à toutes, alors encore on peut nier tout ce qu’on a affirmé et affirmer tout ce qu’on a nié, ou bien nier ce qu’on a affirmé, sans pouvoir réciproquement affirmer tout ce qu’on a nié. Si ce dernier cas a lieu, l’existence du Non-être devient indirectement certaine. Dès lors, on a un principe assuré, et, du moment que le Non-être est quelque chose d’assuré et de connu, l’affirmation opposée l’est encore davantage. Si l’on peut également affirmer tout ce qu’on a nié, alors il faut nécessairement, ou qu’on soit dans le vrai en divisant les propositions, et en disant, par exemple  Ceci est blanc » ; et à l’inverse  Ceci n’est pas blanc » ; ou bien, on n’est pas dans le vrai. Mais, si l’on n’est pas dans le vrai, même en faisant cette division, c’est que l’adversaire ne peut plus soutenir aucune de ces assertions, et qu’il n’y a plus rien à discuter. Et comment des êtres qui ne sont pas, pour raient-ils encore parler et penser ? Tout alors se confond et se réduit à l’unité, comme je le disais tout à l’heure ; et ce sera une même chose que l’homme, Dieu, une trirème, ainsi que les contradictions de ces termes. Si, pour chaque cas, les assertions contradictoires sont également acceptables, une chose ne diffère plus d’une autre ; ou, si elle en diffère, ce sera cette différence qui sera vraie, et qui sera propre à la chose en question. Si l’on croit que, par la division des deux assertions, on peut arriver à la vérité, notre objection a toujours la même force. Ajoutez qu’alors tout le monde est dans le vrai, tout le monde est dans le faux ; et l’adversaire lui-même doit convenir qu’il est aussi dans l’erreur. Il n’est pas moins clair qu’avec lui on ne peut plus engager de discussion sur un sujet quelconque ; car ce qu’il dit n’a pas la moindre valeur. Il ne se prononce, ni de cette façon, ni de la façon contraire ; mais il admet tout à la fois les deux façons de se prononcer. Puis, de nouveau, il nie les deux assertions, ne disant, ni que la chose est ainsi, ni qu’elle n’est pas ainsi ; et, s’il ne commettait pas cette équivoque, il y aurait sur-le-champ une assertion précise. Autre objection. Si, quand l’affirmation est vraie, la négation est fausse, et réciproquement si, quand la négation est vraie, c’est l’affirmation qui cesse de l’être, il en résulte qu’il est impossible d’être également dans le vrai en affirmant et en niant en même temps la même chose. [1008b] Mais peut-être nos adversaires nous répondraient-ils que c’est là précisément ce qui est en question. Cependant, si celui qui prétend que la chose est ou qu’elle n’est pas de telle façon est dans le faux, comment celui qui soutient les deux assertions à la fois peut-il avoir raison ? S’il a la vérité pour lui, que peut alors signifier le dicton que l’on répète si souvent que telle est la nature des choses ? S’il n’a pas pour lui la vérité, et que celui qui croit au contraire que les choses ont une nature spéciale, ait davantage raison, c’est qu’alors les êtres sont, en effet, d’une certaine minière déterminée. Cette assertion est donc vraie, et il n’est pas possible qu’en même temps elle ne le soit pas. Mais, si les deux interlocuteurs disent également vrai et également faux, l’adversaire n’a plus à souffler mot et à rien dire, puisqu’il avance dans une seule et même phrase que telles choses sont et qu’elles ne sont pas. Si son esprit ne s’arrête à rien, et s’il croit et ne croit pas, à titre pareil, ce qu’il dit, en quoi un tel homme se distingue-t-il d’un végétal ? Mais voici quelque chose qui fera voir, de la façon la plus manifeste, que personne n’est sérieusement dans cette disposition d’esprit, ni parmi le reste des hommes, ni même parmi ceux qui soutiennent cette théorie. D’où vient que cet homme est en route pour se rendre à Mégare, au lieu de rester chez lui tranquillement, en s’imaginant qu’il est en marche ? Pourquoi, en sortant, un beau matin, ne va-t-il pas tout droit tomber dans un puits, ou dans un trou, qui se rencontre sous ses pas ? Et pourquoi au contraire lui voit-on prendre mille précautions, comme un homme qui ne juge pas du tout qu’il soit également bon ou mauvais de tomber, ou de ne pas tomber, dans un précipice ? Il est clair comme le jour qu’il juge l’une des deux alternatives meilleure, et qu’il ne trouve pas du tout que ce soit l’autre qui vaille mieux. Si cela est incontestable, il est nécessairement vrai aussi qu’il croit que tel être est un homme, et que tel autre n’est pas un homme ; et que telle chose est douce et agréable, et que telle autre ne l’est pas. On ne traite pas toutes choses sur un pied d’égalité, ni dans ses actes, ni dans sa pensée ; et quand on croit qu’il vaut mieux boire de l’eau pour apaiser sa soif, ou voir quelqu’un dont on a besoin, on se donne la peine de rechercher et de découvrir l’un et l’autre. Il faudrait cependant rester dans la plus parfaite indifférence, si l’Homme et le Non-homme étaient réellement une seule et même chose. Mais, encore une fois, il n’y a personne qui, dans les cas que nous venons d’indiquer, ne mette la plus grande attention à rechercher ceci ou à éviter cela. On peut donc assurer, à ce qu’il semble, que tout le monde croit à quelque chose d’absolu, si ce n’est sur toutes matières sans exception, du moins en ce qui fait la distinction du meilleur et du pire. Que si l’on ne sait pas précisément les choses de science certaine, et si l’on n’en a qu’une opinion vague, c’est une raison de plus pour apporter â la recherche de la vérité infiniment davantage de soin, de même que le malade s’occupe, avec bien plus de sollicitude, de la santé que celui qui se porte bien. En effet, comparativement à l’homme qui sait les choses, celui qui ne s’en forme qu’une vague opinion n’est pas dans une santé parfaite par rapport â la vérité. En supposant même, à toute force ; que les choses peuvent être tout à la fois de telle façon et n’être pas de cette façon, il existe certainement du plus et du moins dans la nature des êtres. Ainsi ; on ne dirait jamais avec une vérité égale que deux et trois sont des nombres pairs ; et ce n’est pas non plus une égale erreur de croire que quatre valent cinq, ou de croire qu’ils valent mille. Si l’erreur n’est pas la même des deux parts, il est clair que l’un se trompe moins que l’autre, et par suite qu’il est davantage dans le vrai. Comme ce qui est plus vrai se rapproche plus de la vérité, il faut donc aussi qu’il y ait une vérité absolue, [1009a] dont se rapproche davantage ce qui est plus vrai. Et même en supposant qu’il n’y ait pas d’absolu, il y a tout au moins quelque chose qui est plus solide et plus ferme que le reste ; et cela suffit pour nous débarrasser de cette théorie intempérante, qui nous interdisait de penser quoi que ce soit de déterminé et de précis. Chapitre 5 La théorie de Protagoras s’appuie sur le même fondement que la précédente ; et nécessairement, c’est à titre égal que toutes les deux sont vraies, ou qu’elles sont fausses. Si tout ce qu’on pense, si tout ce qu’on aperçoit est vrai, alors tout est à la fois vrai et faux ; car il ne manque pas de gens pour penser le contraire les uns des autres ; et la plupart des hommes se figurent qu’on est dans l’erreur du moment qu’on ne partage pas leur opinion. Par une conséquence nécessaire, il en résulte que la même chose est et n’est pas ; et, s’il en est ainsi, il n’est pas moins nécessaire que tout ce qu’on pense soit vrai, puisque ceux qui se trompent et ceux qui ont pour eux la vérité, se contredisent dans leur façon de voir. Si les choses ne sont réellement que cela, tout le monde aura la vérité pour soi. Mais, si les deux théories sont évidemment animées du même esprit, ce n’est pas de la même façon qu’on doit les combattre l’une et d’autre. Avec les uns, c’est la persuasion qui suffit ; mais il faut imposer aux autres la force d’arguments irrésistibles. Ceux qui ont été conduits à cette doctrine par un examen des difficultés de la question, peuvent être sans trop de peine guéris de leur ignorance ; car, pour les convaincre, ce n’est pas à ce qu’ils disent qu’il faut s’adresser ; c’est à ce qu’ils pensent. Pour ceux, au contraire, qui ne parlent ainsi que pour parler, le moyen de les guérir, c’est de réfuter leur langage et les mots dont ils se servent. Ceux qui ont étudié la question sérieusement ont pu tirer leur opinion du spectacle des choses sensibles ; et s’ils ont adopté cette opinion, à savoir que les contradictoires et les contraires peuvent coexister, c’est en observant que les contraires peuvent sortir d’une seule et même source. Si donc il est impossible que ce qui n’est pas se produise, il fallait qu’une certaine chose existât antérieurement, et fût les deux contraires tout ensemble, dans le sens où Anaxagore, et aussi Démocrite, ont dit que  Tout était mêlé à tout ». Car, pour ce dernier, le vide et le plein se trouvent également dans une partie quelconque de la matière ; et à ses yeux, le plein représente l’Être, de même que le Non-être est représenté par le vide. Quant à ceux qui sont arrivés à leur système par la route que nous venons de rappeler, nous leur dirons qu’à un certain point de vue ils ont raison, et qu’à un autre ils se trompent. Le mot Être peut être pris dans deux acceptions diverses ; et, selon l’une, il est possible qu’il sorte quelque chose du Non-être ; selon l’autre acception, c’est impossible. Si une même chose peut tout ensemble être et n’être pas, ce n’est pas du moins dans le même sens. En puissance, une même chose peut être les deux contraires ; mais, en absolue réalité, elle ne le peut pas. Du reste, nous croyons ne pas nous tromper en supposant que ces philosophes aussi admettent une autre essence des choses, qui n’est soumise absolument, ni au mouvement, ni à la destruction, ni à la production. [1009b] C’est encore par un motif semblable que, en parlant des faits sensibles, quelques philosophes en sont venus à croire à la vérité de tous les phénomènes que nous percevons. Selon eux, ce n’est pas par le nombre plus ou moins grand des témoignages qu’il convient de juger de la vérité dans les choses. Le même aliment flatte le goût des uns et révolte le goût des autres ; de telle sorte que, si tout le monde était malade ou insensé, et que deux ou trois personnes seulement fussent en santé ou dans leur bon sens, ce seraient elles qui passeraient pour malades ou pour folles, tandis que le reste passerait pour sain et parfaite ment raisonnable. Ajoutez qu’il est une foule d’animaux qui sentent tout autrement que nous les mêmes objets que nous sentons ; et que chacun de nous ne juge pas toujours de la même manière une même chose perçue par lui. Dans toutes ces perceptions, où est la vérité, où est l’erreur ? C’est ce qui reste profondément obscur ; car l’un n’est pas plus vrai que l’autre, et les deux le sont également. Aussi, Démocrite prétendait-il, ou qu’il n’y a rien de vrai pour l’homme, ou bien que, s’il y a de la vérité, nous ignorons ce qu’elle est. D’une manière générale, on peut dire que ces philosophes ont été amenés à regarder tout phénomène de sensation pour vrai, parce qu’ils ont confondu la sensibilité et la raison, et que la sensation leur a paru un changement. C’est là la voie qui a conduit aussi Empédocle comme Démocrite, et tous les autres, pour ainsi dire, à se jeter dans de si fausses doctrines. Ainsi Empédocle avance que, quand notre disposition vient à changer, notre pensée change aussitôt avec elle Le présent est toujours maÃtre de notre esprit. Et dans un autre passage, il dit encore Car plus les changements se produisaient en eux, plus aussi les pensées leur surgissaient nombreux. Parménide ne s’exprime pas non plus d’une autre manière C’est le tempérament qui règle nos esprits, Et fait cette raison, dont l’homme est tant épris. Pour tous et pour chacun, c’est notre corps qui pense, Et qui dispose en nous de notre intelligence. On se rappelle également le propos qu’on prête à Anaxagore, disant à quelques-uns de ses amis que  Pour chacun d’eux les choses ne seraient que ce que leur jugement voudrait bien les faire ». On va même parfois jusqu’à trouver une pensée semblable dans Homère, parce qu’il nous montre Hector, sous le coup qu’il vient de recevoir, Étendu sur le sol, l’esprit bouleversé. Comme si Homère eût cru que les hommes qui ont le délire continuent de penser, mais pensent autre chose que les gens de sang-froid. Il en résulterait évidemment que, si ; de part et d’autre, il y a toujours de la pensée, les êtres ne peuvent tout à la fois être de telle façon et ne pas être de cette même façon. Mais voici une conséquence bien autrement grave qui ressort de tout cela. Si ceux qui ont le plus profondément entrevu la vérité qu’il nous est permis d’atteindre, et ce sont les gens qui la recherchent et qui l’aiment avec le plus de passion, s’en sont fait des idées si fausses, et l’ont si singulièrement interprétée, comment ceux qui débutent dans l’étude de la philosophie, ne seraient-ils pas absolument découragés ? Rechercher la vérité, ne serait-ce donc que poursuivre des oiseaux qui s’envolent ? [1010a] Ce qui a causé l’erreur des partisans de cette théorie, c’est que, tout en étudiant sincèrement la vérité, ils ne voyaient d’êtres réels que dans les choses sensibles exclusivement. Or, dans les choses que nos sens nous révèlent, c’est en grande partie l’indétermination qui domine, et cette nature spéciale de l’Être, que nous venons d’indiquer. Aussi, l’opinion de ces philosophes pouvait bien être assez vraisemblable ; mais, au fond, ce n’était pas la vérité. Cependant il valait mieux encore parler comme eux que comme Épicharme, dans ses critiques contre Xénophane. Mais je le répète, c’est en voyant que cette nature tout entière, que nous avons sous les yeux, est incessamment livrée au mouvement, et qu’il est impossible de savoir la vérité sur ce qui change sans cesse, que les philosophes ont été poussés à croire que l’homme ne peut jamais conquérir la vérité, au milieu de ce bouleversement perpétuel et général. C’est là l’hypothèse qui fit fleurir la plus extrême de toutes les doctrines que nous venons de citer celle des soi-disant disciples d’Héraclite, parmi lesquels il faut compter Cratyle, qui en était enfin arrivé à ce point de croire qu’il ne devait même pas proférer une seule parole, qui se contentait de remuer le doigt, et qui faisait un crime à Héraclite d’avoir osé dire  Qu’on ne pouvait jamais se baigner deux fois dans la même eau courante » ; car, pour lui, il pensait qu’on ne pouvait pas même dire qu’on s’y baignât une seule fois. Nous reconnaissons très volontiers, en faveur de cette doctrine, qu’il y a bien quelque raison de refuser de croire à l’existence d’un objet qui change, au moment même où il subit le changement ; quoique cependant ce point même soit discutable, puisque le permutant retient quelque chose du permuté, et que déjà aussi il existe nécessairement quelque chose de ce qui se produit et devient. Généralement parlant, si un être périt, c’est qu’antérieurement il aura été quelque chose et s’il devient, il faut bien de toute nécessité qu’il y ait un être d’où il vienne et qui l’engendre, sans que d’ailleurs cette génération puisse remonter à l’infini. Mais, écartant ces considérations, nous nous bornons à affirmer que ce n’est pas la même chose de changer de quantité et de changer de qualité. En fait de quantité, nous accordons que l’être peut ne pas subsister tel qu’il est ; mais il subsiste par l’espèce, à l’aide de laquelle nous connaissons toujours les choses. Une autre critique très fondée contre ce système, c’est que les philosophes qui le soutiennent, tout en voyant que, même parmi les objets sensibles, c’est de beaucoup le moindre nombre d’entre eux qui est sujet au changement, n’en ont pas moins étendu leurs explications à l’ensemble de l’univers. Il est bien vrai que ce lieu du sensible qui nous environne, est soumis incessamment à la production et à la destruction ; mais il est seul à y être assujetti, et c’est une parcelle qui ne compte pour rien, à vrai dire, dans l’univers entier, ou pour presque rien. Vraiment, nos philosophes auraient été cent fois plus justes d’absoudre notre monde par l’univers plutôt que de condamner l’univers aux conditions de notre monde. Évidemment aussi, nous pourrons répéter contre eux les objections que nous avons déjà faites si souvent ; et il faut leur apprendre et leur persuader qu’il existe une certaine nature immuable et immobile. Toutefois ceux qui disent que les choses peuvent tout ensemble être et n’être pas, devraient incliner davantage à les croire en repos plutôt qu’en mouvement ; car, alors, il n’existe rien en quoi la chose puisse changer, puisque tout est à tout. [1010b] Pour s’assurer de cette vérité que tout ce qui nous apparaÃt n’est pas vrai à ce seul titre, on peut se convaincre d’abord que la sensation ne nous trompe jamais sur son objet propre ; mais la conception que nous tirons de la sensation ne doit pas être confondue avec elle. On peut s’étonner aussi non moins justement d’entendre encore demander – comme le font nos philosophes – si les grandeurs et les couleurs sont bien dans la réalité ce qu’elles paraissent à ceux qui les regardent de loin, ou ce qu’elles paraissent à ceux qui les regardent de près ; si les choses sont ce qu’elles semblent aux gens bien portants plutôt qu’aux gens malades ; si les corps ont plus de pesanteur, selon que ce sont des gens faibles ou des gens forts qui les portent ; en un mot, si c’est la vérité qu’on voit quand on dort plutôt que ce qu’on voit durant la veille. Évidemment, sur tout cela, nos philosophes n’ont pas le plus léger doute. Personne, en se supposant dans son sommeil être à Athènes, bien qu’il soit en Afrique, ne va se mettre en route pour l’Odéon. Dans une maladie, comme le remarque Platon, l’opinion du médecin sur l’issue qu’elle doit avoir, et l’opinion d’une personne qui ignore la médecine, ne sont pas d’un poids pareil, quand il s’agit de savoir si le malade guérira ou s’il ne guérira pas. Bien plus, entre les sens eux-mêmes, le témoignage d’un sens sur un objet qui lui est étranger, ne vaut pas son témoignage sur un objet qui lui est propre. Le témoignage d’un sens voisin ne vaut pas celui du sens lui-même. C’est la vue, ce n’est pas le goût qui juge de la couleur ; c’est le goût qui juge de la saveur, et ce n’est pas la vue. Il n’est pas un sens qui, dans le même moment et relativement à la même chose, vienne nous dire tout à la fois que cette chose est et n’est pas de telle ou telle façon. Même dans un moment différent, le sens ne se trompe point sur la qualité actuelle, bien qu’il puisse se tromper sur l’objet qui présente cette qualité. Par exemple, le même vin, soit qu’il change directement lui-même, ou bien que ce soit le corps qui change, semble tantôt être agréable au goût et tantôt ne l’être pas. Mais pour cela, la saveur agréable, telle qu’elle est quand elle est, ne change jamais. La sensation est toujours véridique à cet égard ; et toute saveur qui devra être agréable, comme celle du vin, est nécessairement soumise à la même condition. Ce sont là des faits que méconnaissent toutes ces théories ; et de même qu’elles suppriment la réalité de la substance pour toutes choses, elles nient de même qu’il y ait rien de nécessaire au monde. En effet, ce qui est de toute nécessité ne peut pas être à la fois de telle façon et d’une façon contraire ; et du moment qu’il y a quelque chose qui est nécessaire, ce quelque chose ne peut pas être et n’être pas, tel qu’il est. En un mot, s’il n’y avait au monde que le sensible, il n’y aurait plus rien dès qu’il n’y aurait plus d’êtres animés, puisqu’il n’y aurait pas non plus de sensation. Il peut être vrai que, dans ce cas, il n’y aurait plus ni objets sentis, ni sensation ; puisque, pour tout cela, il faut toujours l’intervention d’un être sentant qui éprouve cette modification. Mais il serait impossible que les objets qui causent la sensation n’existassent pas, sans même qu’aucune sensation eût lieu. La sensibilité ne relève pas seulement d’elle-même ; mais il y a en dehors de la sensation quelque chose de différent d’elle, et qui lui est nécessairement antérieur. [1011a] Ainsi, par exemple, le moteur est par nature antérieur à l’objet qu’il meut ; et cette vérité n’en est pas moins certaine, bien que ces deux termes puissent s’appliquer réciproquement l’un à l’autre. Chapitre 6 Quelques-uns de nos philosophes élèvent ici une question, aussi bien ceux qui sont convaincus sincèrement de leur doctrine, que ceux qui ne la soutiennent que pour les besoins de leur cause. Ils demandent qui jugera de la santé de l’être qui sent ; et, d’une manière générale, quel sera, dans chaque cas, le juge vraiment compétent. Mais soulever de telles questions, c’est absolument se demander si, dans le moment où nous parlons, nous sommes endormis ou éveillés. Au fond, toutes ces difficultés si gratuites n’ont qu’une même valeur ; ces philosophes se figurent qu’il faut rendre raison de tout, et cherchant un principe, ils veulent l’obtenir par démonstration. Mais ce qui prouve bien qu’ils ne sont pas très convaincus de cette prétendue possibilité de tout démontrer, c’est la manière même dont ils agissent et se conduisent. Du reste, nous avons déjà dit que c’était là leur erreur ; ils s’appliquent à rendre raison de choses pour lesquelles il n’y a pas de raison à donner, puisque le principe de la démonstration ne saurait être une démonstration. Ces philosophes pourraient assez aisément se convaincre de leur méprise ; car il n’est pas difficile de voir d’où elle vient. Mais ceux qui, dans la discussion, ne cherchent qu’à violenter leurs interlocuteurs, courent après l’impossible ; car, tout en demandant qu’on les contredise, ils commencent par se contredire eux-mêmes, dès leur premier mot. Si tout dans le monde n’est pas relatif, et s’il y a des choses qui existent en soi et par elles-mêmes, il s’ensuit que tout ce qui nous apparaÃt n’est pas indistinctement vrai. Ce qui paraÃt doit nécessairement paraÃtre à quelqu’un ; et prétendre que tous les phénomènes sont vrais sans exception, c’est prétendre que tout au monde est relatif. Aussi ceux qui ne trouvent de force convaincante que dans les mots, et qui veulent engager la discussion, doivent ici bien prendre garde que ce n’est pas toute apparence qui est vraie, mais qu’elle est vraie seulement pour celui à qui elle apparaÃt, pour le moment, dans la mesure et sous le jour où elle lui apparaÃt. Ils auraient beau engager la discussion, s’ils ne l’engagent pas en faisant cette concession, ils seront bien vite forcés de soutenir les contraires. Une même chose, en effet, peut à la vue sembler être du miel, et n’en être pas pour le goût ; et, comme nous avons deux yeux, il est bien possible que les choses ne semblent pas les mêmes à l’un et à l’autre oeil, si la vision y est inégale. A ceux qui soutiennent que toute apparence est vraie, en s’appuyant sur les motifs que nous avons naguère indiqués, et que, par conséquent, tout est également faux et vrai tout ensemble, on peut accorder que les apparences ne sont pas les mêmes pour tout le monde, qu’elles ne sont pas même toujours identiques pour la même personne, et que souvent elles semblent toutes contraires dans un seul et même instant. Ainsi, le toucher, par la superposition des doigts, nous atteste deux objets là où la vue n’en montre qu’un. Mais les choses ne sont les mêmes, ni pour le même sens appliqué au même objet, ni pour ce sens agissant de la même façon, ni dans un seul et même moment ; donc la théorie Très utilisé pour nourrir les animaux, le maïs est aussi une plante qui consomme beaucoup d'eau alors que le pays connait une sécheresse maïs, originaire du Mexique, a conquis la France dans les années 1970 et est devenu indispensable pour nourrir le bétail. Mais cette plante gourmande en eau pendant l'été est de moins en moins adaptée alors que le changement climatique va aggraver les sécheresses en France est devenue le premier exportateur européen de maïs, qui occupe autour de 10% de sa surface agricole utile. Avant tout destiné à l'alimentation animale - maïs grain pour les volailles, les ovins et les porcs; maïs fourrage pour les bovins- il s'est imposé dans des régions comme la plaine d'Alsace ou les à partir du 17e siècle en France, le maïs a "d'abord été confiné dans le Sud-Ouest, la région la plus chaude de France et la plus humide", des conditions qui lui sont favorables, raconte à l'AFP Christian Huyghe, directeur scientifique Agriculture de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement Inrae.C'est grâce au travaux d'hybridation "à la fin des années 1940", que la plante tropicale a pu gagner "des climats un peu plus frais", partir de la fin des années 1960, les superficies récoltées explosent, selon des données de la l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture FAO. Aujourd'hui la culture du maïs représente près de 3 millions d'hectares, sur les 28 millions d'hectares de surface agricole du dans les années 1970, les vaches étaient nourries l'été au pâturage et l'hiver au foin, à la paille ou à l'ensilage d'herbe pour conserver l'herbe humide, rappelle le scientifique, ingénieur révolution de l'élevage"Et le maïs est arrivé, avec des machines adaptées, des ensileuses qui permettent de faire des gros volumes de stocks qui se conservent facilement, se font très rapidement et en une seule récolte" contre plusieurs pour l'herbe, "révolution totale" a permis d'énormément simplifier la vie de l' maïs est toutefois faible en protéines et il a fallu importer des tourteaux de soja pour compléter l'alimentation donnée aux animaux, explique Christian en période de sécheresse estivale, qui seront amenées à s'intensifier avec le réchauffement climatique, "une variété emblématique, le maïs, pose question", soulève Agnès Ducharne, chercheuse au CNRS."Pour finir sa croissance et faire de la production agricole valorisable, il a besoin d'eau en juillet et en août, les mois où il y en a moins en France", pose la question de "réduire la part du maïs dans l'agriculture française pour des cultures plus adaptées à la sécheresse estivale", poursuit Agnès Ducharne, spécialiste du cycle de l'eau et des impacts du changement problème avec la culture du maïs, c'est qu'elle demande de l'eau à un moment où les sources ne débordent pas. Pour qu'elle puisse avoir un bon rendement, son irrigation est nécessaire mais "quel système de production permet d'être le plus résilient? Et est-ce que le maïs a une place là-dedans?", interroge Christian lui, "le maïs va faire partie de la panoplie", mais "sa part va plutôt être amenée à se réduire" à l'avenir, ce qui va obliger le marché de l'alimentation animale à se réorganiser."Pour être résilient, un système doit être diversifié", insiste-t-il. "Une trajectoire d'investissement qui conduirait à maximiser les cultures en maïs" en assurant leur arrosage avec de grandes réserves d'eau "fragiliserait le système", met-il en garde."Bien sûr qu'on va continuer à produire du maïs"Mais pour la FNSEA, principale fédération agricole, pas question d'abandonner le maïs. "Bien sûr qu'on va continuer à produire du maïs", assure sur BFM Business sa présidente Christiane Lambert."D'une part, il s'en produit moins qu'il y a quelques années. D'autre part, les variétés ont changé et la sélection variétale permet d'avoir aujourd'hui des espèces qui nécessitent moins d'eau" "il est nécessaire d'avoir de la production de fourrage pour maintenir l'élevage" prévient-elle. "Est-ce que vous préférez qu'on arrête le maïs et qu'on importe la viande d'Amérique du sud? Ou qu'on importe le porc d'Espagne où ils irriguent? Le comble, c'est qu'aujourd'hui on importe de la paille de blé d'Espagne où on irrigue … et nous en France, on n'irrigue pas et on importe la paille. Est-ce que c'est bien sérieux en terme d'empreinte carbone?"De manière plus large, la production de viande, via l'élevage intensif, a plus d'impacts environnementaux que celle d'autres produits alimentaires, selon des études scientifiques. Des ONG prônent donc de réduire la consommation de viande et de privilégier l'élevage du bétail nourri à l'herbe. Oui, c'est dès 1980 que je suis devenu végétarien en fréquentant des stars du rock, et la chanteuse des Pretenders en particulier. Chrissie Hynde était une amie. On avait joué en première partie de son groupe et un jour elle m'a pris la tête pour que, comme elle, je mange autre chose que des animaux. La belle Chrissie a changé ma vie. Oui, c'est dès 1980 que je suis devenu végétarien en fréquentant des stars du rock, et la chanteuse des Pretenders en particulier. Chrissie Hynde était une amie. On avait joué en première partie de son groupe et un jour elle m'a pris la tête pour que, comme elle, je mange autre chose que des animaux. Bob Marley, Paul McCartney, Peter Tosh, Joe Strummer m'ont laissé entendre que résister à l'injustice passait par la case VG Son discours état limpide. Elle avait raison et c'était pas le genre à te l'envoyer dire. La belle Chrissie, qui était admirable en plus d'être une grande musicienne, a donc changé ma vie. Le moins que je puisse faire c'est la remercier, et je raconte ça aux petits oignons dans ma tout aussi admirable autobiographie De Viandard à végane, qui vient de paraître. Et hop, me voilà à la tribune du Huffington Post pour en mettre une couche sur le cauchemar planétaire des poulets. Pendant ma période pigiste j'ai rencontré un tas d'autres artistes végétariens dont Bob Marley, Paul McCartney, Peter Tosh, Joe Strummer The Clash et d'autres, qui m'ont laissé entendre que résister à l'injustice, ça passait par la case VG. Ça m'a donné envie. J'ai toujours aimé les animaux, faut pas m'en vouloir. Et je n'ai jamais vu beaucoup de différence entre un veau et un chiot, entre un cochon et un thon, parce que ça souffre pareil et que ça a envie de vivre, idem. Dans mon bouquin, j'énumère mes prises de conscience successives dans le domaine du respect des animaux en essayant de déconner un peu parce que c'est quand même une vie de rockeur que je raconte, donc pas question de déballer un truc sinistre sur les abattoirs. Ceux qui ne comprennent pas, c'est qu'ils ne veulent pas comprendre. J'y raconte aussi les difficultés que j'ai rencontrées avec les gens, qui me regardaient de travers, horrifiés que le foie de veau me dégoûte. Oui car jadis en 1980, la peine de mort n'était pas encore abolie -ni pour l'homme, ni pour les animaux. En ces temps anciens, ça semblait normal. Seulement voilà, on est au vingt-et-unième siècle maintenant. Et le Moyen-Âge est derrière nous. La révolution numérique est là, et le révolution écologique aussi. Les abominations honteuses que tous devinent mais n'osent pas aller regarder Et aujourd'hui, c'est toute la France qui est horrifiée par le spectacle des poulets de batterie, des abattoirs, de l'atroce violence de la production du lait, des œufs, des transports d'animaux et de toutes les abominations honteuses que tous devinent mais n'osent pas encore aller regarder. Oui aujourd'hui, tout bascule. On est encore loin du compte, mais grâce à l'association L214, des millions de Français ne peuvent plus ignorer la réalité que l'ignoble industrie agro-alimentaire a tout fait pour nous cacher, avec la complicité des autorités pour qui tout ça, c'est le pactole, c'est du PIB. En écoutant la belle Chrissie causer ce jour-là je ne pouvais pas imaginer que trente ans plus tard, je deviendrais végane comme elle, comme Prince, comme Lenny Kravitz, comme Venus Williams, comme Carl Lewis, comme le champion du monde d'haltérophilie Patrik Baboumian. Que Paul McCartney écrirait ma préface et m'inviterait à jouer en Angleterre avec mon groupe de musiciens véganes, Cabaret Végane. Végane, ça me semblait impossible mais aujourd'hui c'est facile Végane, ça me semblait impossible. Mais aujourd'hui, c'est facile, très facile. Quel délice! Quelle splendeur! C'est à portée de main. Vu l'ambiance dans les abattoirs, dans la fabrication de cuir on écorche les animaux vivants par millions pour ne pas abîmer la peau, c'est devenu le minimum de la décence. Avec les magasins véganes, avec la profusion de magasins "bios", de recettes en ligne, de livres comme le mien, la solution est là, délicieuse, exquise, triomphante, une solution tout confort, lumineuse. Un immense mouvement végane est né là, sous ton nez, quand tu ne regardais pas. À Berlin on trouve des kebabs véganes impeccables à tous les coins de rue. Qui va s'en plaindre? Dans le quartier de la rue de Paradis à Paris, on trouve vingt-six restaurants qui servent des plats sans aucun produit animal. Et très bientôt, cent. Car ça marche. À Londres, tous les restaurants ou presque proposent des menus avec un "V" devant la moitié des plats. En Israël, 20% de la population est végétarienne. Et ne parlons pas des Etats-Unis, du Canada... Les succulents produits véganes déferlent sur internet "poisson" pané, "burgers" V-Bites à tomber, "merguez" et "chorizo" meilleurs que les vrais, "chicken" nuggets, tout ce que tu veux et plus encore, tu ne remarques pas trop la différence si on ne te le dit pas. Et la France, pays de la bonne cuisine, n'a pas encore été foutue de sortir UN SEUL produit végane du genre, tout est encore importé. On est en retard à ce point. Qu'attendent les investisseurs? En Allemagne, c'est l'eldorado, les grandes surfaces véganes, clean, sans souffrance, ouvrent partout. Putain, que c'est bon de voir ça. On a joué au premier salon Veggie World de Paris en avril dernier avec Cabaret Végane, l'affluence était incroyable, la fête était là, les jeunes dansaient, 80% de femmes, à fond, pas de cris de cochons à étouffer, et on remet ça en octobre avec le double de surface... fabuleux! C'était l'événement de l'année la France a commencé à basculer. Ça ne s'arrêtera plus. De 20 à 50 millions d'animaux tués chaque jour en France On se la raconte de moins en moins. Aujourd'hui on sait qu'entre vingt et cinquante millions d'animaux sont tués CHAQUE JOUR rien qu'en France. Ce n'est plus un carnage, c'est un génocide perpétuel. Plus les animaux marins, qui, chaque jour, sont des dizaines de millions rien que dans les bateaux français ou les élevages, à suffoquer, souffrant mille morts écrasés dans des filets, éviscérés et congelés vivants... Si, si. C'est plus possible. Le mouvement végane n'est pas un régime alimentaire, c'est un mouvement de libération. De justice sociale. Il nous ouvre des horizons démentiels. Il nous met au diapason des vrais enjeux 90% des cultures du monde servent à nourrir des animaux d'élevage! On rase l'Amazonie pour produire du soja OGM pour les cochons d'Europe! Argh! On m'a appris à fermer le robinet quand je me lave les dents mais pour produire un seul burger, on gaspille quinze mille lires d'eau! Être écolo, ça commence par devenir végane, point. La filière bidoche, c'est 50% du dérèglement climatique, réveillez-vous! Mais on n'abolit pas l'esclavage parce que ça pollue les rivières. On l'abolit parce que c'est abject d'exploiter des êtres sensibles. Les animaux font partie de la planète, ils sont des terriens comme nous et veulent vivre comme nous. On n'a aucun droit sur eux. Aucun. Penser qu'on a le droit de les dominer, c'est penser en mode domination brutasse, c'est penser en esclavagiste. C'est comme dominer les femmes, trouver que les homos sont moins bien que les hétéros, tout ça, c'est un mode de pensée d'avant. C'est terminé. Impossible de "produire" des animaux sans souffrances innommables Donc les éleveurs doivent passer à l'étape suivante se recycler et planter des fleurs! Et des pommiers! Des fraises! STRAWBERRY POWER! Leur business ignoble gratte huit milliards de subventions par an, de quoi rembourser le trou de la sécu d'un coup. Sans ce fric, ils fermeraient à cause de la concurrence industrielle étrangère. Quelle arnaque! Qui veut des fermes de cinq mille vaches à huit milliards de subventions? Plantez plutôt des brocolis les gars! À calories égales, elles contiennent deux fois plus de protéines! On ne peut pas "produire" d'animaux sans souffrances innommables. C'est impossible. Et si c'était possible, ça serait réservé aux riches, car ça coûterait dix fois plus cher ça n'arrivera jamais. Il faut libérer les cent milliards d'animaux tués chaque année. Nous exigeons la fermeture de tous les abattoirs. Nous exigeons l'abolition de l'exploitation des animaux. De TOUS les animaux. Bienvenue au vingt-et-unième siècle et bon appétit, tout est expliqué dans mon livre! Également sur Le HuffPost En l’espace de 3 semaines, entre mars et avril, le muscari d’Arménie Muscari armeniacum, ou jacinthe à grappes, honore le jardin d’une mer de fleurs. Plantés en groupes à l’avant des massifs, en bordure d’allée ou encore au pied d’un arbre sur une belle pelouse, ces petits bulbes très rustiques -25°C se couvrent de grappes de fleurs en clochettes d’un ravissant bleu électrique. Quand et comment les planter ? Un ravissant tapis bleu Les muscaris sont très courants dans nos jardins. De croissance rapide, ils forment entre mars et avril d’élégants tapis de fleurs bleues parfumées s’élevant à 15/20 centimètres de hauteur. Leur feuillage rubané vert clair, caduc, apparaît en hiver, parfois plus précocement. Ces feuilles étroites ne se déploient cependant véritablement qu’après la floraison. Les fleurs tubulaires bleues de muscari sont bordées d’un liseré blanc Les fleurs tubulaires bleues, bordées de blanc, composent des épis qui s’élèvent au milieu des touffes de feuilles. A l’image d’autres bulbes printaniers Jacinthe, Narcisses,…, les muscaris ont besoin d’une période sèche estivale, nécessaire à leur repos. Où les installer ? De nature peu exigeante, le muscari aime les terres fraîches et bien drainées, indifféremment à la mi-ombre ou au soleil. Quand et comment les planter ? Les muscaris fleurissent au début du printemps mais leurs bulbilles s’installent de bonne heure, de la fin septembre à la mi-novembre. Pour obtenir un joli tapis, plantez-les en groupes de 25 à 30 bulbes. Choisissez-les fermes au toucher. Creusez des trous ou des fosses de 10 cm de profondeur. Étalez sur le fond une fine couche de sable, de terreau ou de compost si le sol est lourd. Déposez chaque bulbe, pointe tournée vers le haut, en respectant un écartement de 8 à 10 cm. Rebouchez avec la terre extraite. Culture en pot du Muscari Ces petits bulbes composent classiquement de lumineuses potées printanières, en association à des narcisses, des jacinthes, ou bien seuls ! Plantez-les au début de l’automne. Préparez un mélange de 2/3 de terreau pour 1/3 de sable. Installez-les serrés, ils affectionnent ces conditions en coupe ou en pots, à raison de 10 à 12 bulbilles dans un contenant de 15 cm de diamètre. Laissez les pots au froid, nécessaire à l’amorçage de la végétation, vous obtiendrez ainsi en mars-avril un foisonnement de clochettes offrant une touche colorée à votre terrasse, votre balcon ou votre rebord de fenêtre. En potée ou en rocaille, comme ici, les muscaris armeniacum se remarquent ! Quel entretien ? L’entretien des muscaris est à la fois simple et limité tant ces bulbes sont parfaitement rustiques. Une fois installés en terre, ils peuvent y rester, été comme hiver, et s’y naturalisent par ailleurs rapidement. A la fin de la floraison, ôtez les grappes de fleurs sèches mais attendez que le feuillage jaunisse et sèche complètement avant de nettoyer les touffes. La fin du printemps est en effet une période importante de leur cycle de végétation durant laquelle la plante profite de la lumière croissante pour reconstituer ses réserves. En pleine terre, les arrosages sont inutiles. Apportez de l’eau uniquement aux potées, surtout celles placées sous une avancée de toit ou un rebord de fenêtre. Les autres se contentent souvent des fréquentes pluies de l’automne à la fin d’hiver. Les muscaris se ressèment parfois trop naturellement. Si leur étalement devient un problème, coupez les fleurs avant qu’elles ne montent en graines pour empêcher leur dissémination. Comment les multiplier ? Le semis de graines de muscaris est possible mais il faut savoir faire preuve de patience. Ces bulbes printaniers ne peuvent être plantés en effet qu’après la 3-ème année de culture. C’est la raison pour laquelle on multiplie généralement les muscaris en divisant les bulbilles. L’opération est à effectuer en cours d’été, lorsque le feuillage est entièrement sec. Déterrez une souche à l’aide d’un transplantoir. Séparez délicatement les bulbes. Replantez immédiatement en pleine terre les plus gros, réservez les plus petits à la confection des jardinières ou des potées. Comment utiliser les muscaris ? En potées, les muscaris se marient à merveille à d’autres bulbes printaniers, des variétés naines de narcisses jaunes par exemple, des jacinthes, des scilles, des nivéoles ou encore des tulipes basses. Ils sont aussi parfaitement à leur aise en pleine terre, dans une rocaille, un parterre surélevé, en bordure d’une allée qu’ils soulignent ou d’un massif qu’ils égaient en attendant l’arrivée d’autres floraisons. Dans une ambiance de sous-bois, ils forment d’élégants tapis bleus ou de vastes tâches de couleurs. En association à des aubriètes et des primevères, les muscaris bleus démarrent les floraisons printanières, Jardin de Maguy 64 On peut leur associer d’autres bulbes précoces, des crocus, des eranthis, des narcisses bas à l’image de la variété tête-à-tête, à peine plus hauts qu’eux ! Ou des plantes tapissantes à floraison printanière à l’image des aubriètes, des pâquerettes, des primevères… Quelles variétés choisir ? Classiquement, les fleurs des muscaris sont bleues mais les nombreuses créations de l’Homme ont bousculé les codes et apporté pas mal de fantaisie. On trouve facilement maintenant en jardineries des muscaris aux couleurs plus originales blancs , roses, à fleurs simples ou doubles ! Dans cette vidéo, découvrez tous mes conseils pour bien planter les muscaris en début d’automne DébutPage précedentePage suivanteFin Le 15 août 2022 à 201849 Le 15 août 2022 à 201540 Le 15 août 2022 à 201348 Le 15 août 2022 à 201208 Le 15 août 2022 à 200939 Le 15 août 2022 à 200413 Le 15 août 2022 à 200147 Le 15 août 2022 à 195954 Le 15 août 2022 à 195706 Préparation mentale Il faut se préparer pendant que tu as du tempsJe sais pas commentMoi oui Passe Mp si tu veux !Tu peux me l'expliquer ici si ça te dérange pas stp ?Sans problème ça risque juste de polluer le topic Tu dois apprendre à respirer et respirer correctement en toute circonstance. Pour ça il faut t’infliger des stress en situation contrôlée afin d’apprendre à stresser correctement et donc concrètement à respirer correctement en toute es obligé de créer des situations factices car ça permet une libération totale sur les conséquences au début Ensuite tu peux aussi méditer. J’utilise une technique mais plusieurs sont bonnes pas petit bambou hein ! le tout étant de travailler ton mental comme une gymnastique Bien entendu il te faudra aussi un minimum d’entraînement physique de n’importe quel type car un corps en mauvais état fait un mental en mauvais état Dans la même lignée il te faudra apprendre à détendre tes muscles car la souplesse c’est la jeunesse. Un muscle tendu est une réponse à un stress pour être prêt la fois d’après mais a force d’accumuler on pete la machine Voilà un résuméOk merci même si j'avais l'impression que tu trollais ai débutAbsolument pas je suis très sérieux Ton corps et tout le reste sont adaptés à ta vie actuelle. Des gros changements extérieurs vont impliquer de grandes perturbations. Te préparer à ça est la meilleure façon de te préparer à profiter et ne pas faire n’importe quoi Croire que ce que tu vas recevoir est seulement un cadeau est une erreur. C’est un cadeau si tu es à la hauteur sinon ce sera potentiellement un drameMerci pour ton message mec même si je pense que ce que je vais recevoir est tellement bon que ca pourra jamais devenir un drame No problem mais garde à l’esprit qu’il faut toujours du reculProfite au max ;Merci mec c'est gentil Le 15 août 2022 à 201901 Le 15 août 2022 à 201816 Le 15 août 2022 à 201654 Le 15 août 2022 à 201616 Le 15 août 2022 à 201244 Le 15 août 2022 à 201059 Apprend à cultiver des fruits et légumesÇa peut toujours servir d'avoir la main verte LolIl n'a pas tort. S'occuper en plantant des fruits et légumes, c'est pas mal long et ennuyant !C'est long ? Tant mieux, ça t'occupera. C'est ennuyant ? Au bout d'un moment, lorsque tu jouis d'un bien-être matériel, tu finis aussi par t'ennuyer... il faut s'y habituer d'épouser la meilleure femme du monde est bien plus jouissive à mes yeux que de jardinerOue bah redescend alors Le 15 août 2022 à 194610 En pétantMais pourquoi jerry Le 15 août 2022 à 201851 Le 15 août 2022 à 201800 Le 15 août 2022 à 201648 Le 15 août 2022 à 201624 Le 15 août 2022 à 201517 Le 15 août 2022 à 195520 Le 15 août 2022 à 195407 Go te cultiver en attendant khey Livres, films, musiques, peu importe ce qui est ton dada J'ai chopé un problème au cerveau qui a détruit ma concentration/mémorisation donc c'est chaud Je serai guerit quand la période du 1er post entrera mais pour l'instant nonSans indiscrétion, de quel type de problème s'agit-il ? Sinon, un sport natation, football ou combat. Ca n'a aucun nom car je suis le seul au monde a souffrir de ça Ah, dommage. Je n'avais pas cerné le te promets que je ne troll absolument pas mec, j'aimerais bien te l'expliquer mais ça va me decridibiliserJ'ai le bon soupçon donc je vais te croire, est-ce que tu peux donner plus de détails ? Je ne jugerai pasEn gros j'ai prié Dieu pour guerir d'une maladie incurable TDAH et je suis presque guerit sauf que ca s'est pas passé comme prévu Le 15 août 2022 à 202009 Le 15 août 2022 à 201901 Le 15 août 2022 à 201816 Le 15 août 2022 à 201654 Le 15 août 2022 à 201616 Le 15 août 2022 à 201244 Le 15 août 2022 à 201059 Apprend à cultiver des fruits et légumesÇa peut toujours servir d'avoir la main verte LolIl n'a pas tort. S'occuper en plantant des fruits et légumes, c'est pas mal long et ennuyant !C'est long ? Tant mieux, ça t'occupera. C'est ennuyant ? Au bout d'un moment, lorsque tu jouis d'un bien-être matériel, tu finis aussi par t'ennuyer... il faut s'y habituer d'épouser la meilleure femme du monde est bien plus jouissive à mes yeux que de jardinerOue bah redescend alorsComment ça redescend ? Le 15 août 2022 à 201901 Le 15 août 2022 à 201816 Le 15 août 2022 à 201654 Le 15 août 2022 à 201616 Le 15 août 2022 à 201244 Le 15 août 2022 à 201059 Apprend à cultiver des fruits et légumesÇa peut toujours servir d'avoir la main verte LolIl n'a pas tort. S'occuper en plantant des fruits et légumes, c'est pas mal long et ennuyant !C'est long ? Tant mieux, ça t'occupera. C'est ennuyant ? Au bout d'un moment, lorsque tu jouis d'un bien-être matériel, tu finis aussi par t'ennuyer... il faut s'y habituer d'épouser la meilleure femme du monde est bien plus jouissive à mes yeux que de jardinerComme le sentiment de bien-être, la jouissance est éphémère. C'est pour cela qu'il faut se focaliser sur des choses essentielles. Le 15 août 2022 à 202046 Le 15 août 2022 à 201851 Le 15 août 2022 à 201800 Le 15 août 2022 à 201648 Le 15 août 2022 à 201624 Le 15 août 2022 à 201517 Le 15 août 2022 à 195520 Le 15 août 2022 à 195407 Go te cultiver en attendant khey Livres, films, musiques, peu importe ce qui est ton dada J'ai chopé un problème au cerveau qui a détruit ma concentration/mémorisation donc c'est chaud Je serai guerit quand la période du 1er post entrera mais pour l'instant nonSans indiscrétion, de quel type de problème s'agit-il ? Sinon, un sport natation, football ou combat. Ca n'a aucun nom car je suis le seul au monde a souffrir de ça Ah, dommage. Je n'avais pas cerné le te promets que je ne troll absolument pas mec, j'aimerais bien te l'expliquer mais ça va me decridibiliserJ'ai le bon soupçon donc je vais te croire, est-ce que tu peux donner plus de détails ? Je ne jugerai pasEn gros j'ai prié Dieu pour guerir d'une maladie incurable TDAH et je suis presque guerit sauf que ca s'est pas passé comme prévuÇa se guérit un TDAH ? wtf Le 15 août 2022 à 202106 Le 15 août 2022 à 201901 Le 15 août 2022 à 201816 Le 15 août 2022 à 201654 Le 15 août 2022 à 201616 Le 15 août 2022 à 201244 Le 15 août 2022 à 201059 Apprend à cultiver des fruits et légumesÇa peut toujours servir d'avoir la main verte LolIl n'a pas tort. S'occuper en plantant des fruits et légumes, c'est pas mal long et ennuyant !C'est long ? Tant mieux, ça t'occupera. C'est ennuyant ? Au bout d'un moment, lorsque tu jouis d'un bien-être matériel, tu finis aussi par t'ennuyer... il faut s'y habituer d'épouser la meilleure femme du monde est bien plus jouissive à mes yeux que de jardinerComme le sentiment de bien-être, la jouissance est éphémère. C'est pour cela qu'il faut se focaliser sur des choses essentielles. Bah elle durera autant de temps que j'aurai ces biens non ? Le 15 août 2022 à 193151 Je devrais bientôt - Etre riche au point d'avoir tout ce que je veux - Epouser la femme la plus pure et plus belle du monde - Prison pour ma famille qui m'a fais du mal - Quitter la France pour un des meilleurs pays du monde - Devenir un 10/10Cependant j'ai beaucoup de mal à patienter en attendant les récompenses qui m'attendent...un conseil ?Ne te fait pas trop d'illusions sur une "meilleure vie", épanouis toi avec ce que t'as. Le 15 août 2022 à 202134 Le 15 août 2022 à 202046 Le 15 août 2022 à 201851 Le 15 août 2022 à 201800 Le 15 août 2022 à 201648 Le 15 août 2022 à 201624 Le 15 août 2022 à 201517 Le 15 août 2022 à 195520 Le 15 août 2022 à 195407 Go te cultiver en attendant khey Livres, films, musiques, peu importe ce qui est ton dada J'ai chopé un problème au cerveau qui a détruit ma concentration/mémorisation donc c'est chaud Je serai guerit quand la période du 1er post entrera mais pour l'instant nonSans indiscrétion, de quel type de problème s'agit-il ? Sinon, un sport natation, football ou combat. Ca n'a aucun nom car je suis le seul au monde a souffrir de ça Ah, dommage. Je n'avais pas cerné le te promets que je ne troll absolument pas mec, j'aimerais bien te l'expliquer mais ça va me decridibiliserJ'ai le bon soupçon donc je vais te croire, est-ce que tu peux donner plus de détails ? Je ne jugerai pasEn gros j'ai prié Dieu pour guerir d'une maladie incurable TDAH et je suis presque guerit sauf que ca s'est pas passé comme prévuÇa se guérit un TDAH ? wtfNon c'est incurable mais Dieu a fais un miracle me concernant ! Voila pourquoi j'ai dis que j'ai peur d'être decridibiliser Le 15 août 2022 à 202207 Le 15 août 2022 à 193151 Je devrais bientôt - Etre riche au point d'avoir tout ce que je veux - Epouser la femme la plus pure et plus belle du monde - Prison pour ma famille qui m'a fais du mal - Quitter la France pour un des meilleurs pays du monde - Devenir un 10/10Cependant j'ai beaucoup de mal à patienter en attendant les récompenses qui m'attendent...un conseil ?Ne te fait pas trop d'illusions sur une "meilleure vie", épanouis toi avec ce que t' compliqué car je vis une épreuve des plus difficile que j'ai eu depuis un long moment en ce moment Le 15 août 2022 à 202104 Le 15 août 2022 à 202009 Le 15 août 2022 à 201901 Le 15 août 2022 à 201816 Le 15 août 2022 à 201654 Le 15 août 2022 à 201616 Le 15 août 2022 à 201244 Le 15 août 2022 à 201059 Apprend à cultiver des fruits et légumesÇa peut toujours servir d'avoir la main verte LolIl n'a pas tort. S'occuper en plantant des fruits et légumes, c'est pas mal long et ennuyant !C'est long ? Tant mieux, ça t'occupera. C'est ennuyant ? Au bout d'un moment, lorsque tu jouis d'un bien-être matériel, tu finis aussi par t'ennuyer... il faut s'y habituer d'épouser la meilleure femme du monde est bien plus jouissive à mes yeux que de jardinerOue bah redescend alorsComment ça redescend ?Rien de ce qui ne vaut la peine en ce monde ne s'obtient sans effort Le 15 août 2022 à 202154 Le 15 août 2022 à 202106 Le 15 août 2022 à 201901 Le 15 août 2022 à 201816 Le 15 août 2022 à 201654 Le 15 août 2022 à 201616 Le 15 août 2022 à 201244 Le 15 août 2022 à 201059 Apprend à cultiver des fruits et légumesÇa peut toujours servir d'avoir la main verte LolIl n'a pas tort. S'occuper en plantant des fruits et légumes, c'est pas mal long et ennuyant !C'est long ? Tant mieux, ça t'occupera. C'est ennuyant ? Au bout d'un moment, lorsque tu jouis d'un bien-être matériel, tu finis aussi par t'ennuyer... il faut s'y habituer d'épouser la meilleure femme du monde est bien plus jouissive à mes yeux que de jardinerComme le sentiment de bien-être, la jouissance est éphémère. C'est pour cela qu'il faut se focaliser sur des choses essentielles. Bah elle durera autant de temps que j'aurai ces biens non ?Il est probable que tu en finisses las. Le 15 août 2022 à 202234 Le 15 août 2022 à 202134 Le 15 août 2022 à 202046 Le 15 août 2022 à 201851 Le 15 août 2022 à 201800 Le 15 août 2022 à 201648 Le 15 août 2022 à 201624 Le 15 août 2022 à 201517 Le 15 août 2022 à 195520 Le 15 août 2022 à 195407 Go te cultiver en attendant khey Livres, films, musiques, peu importe ce qui est ton dada J'ai chopé un problème au cerveau qui a détruit ma concentration/mémorisation donc c'est chaud Je serai guerit quand la période du 1er post entrera mais pour l'instant nonSans indiscrétion, de quel type de problème s'agit-il ? Sinon, un sport natation, football ou combat. Ca n'a aucun nom car je suis le seul au monde a souffrir de ça Ah, dommage. Je n'avais pas cerné le te promets que je ne troll absolument pas mec, j'aimerais bien te l'expliquer mais ça va me decridibiliserJ'ai le bon soupçon donc je vais te croire, est-ce que tu peux donner plus de détails ? Je ne jugerai pasEn gros j'ai prié Dieu pour guerir d'une maladie incurable TDAH et je suis presque guerit sauf que ca s'est pas passé comme prévuÇa se guérit un TDAH ? wtfNon c'est incurable mais Dieu a fais un miracle me concernant ! Voila pourquoi j'ai dis que j'ai peur d'être decridibiliserCasse pas les couilles le TDAH c'est pas une maladie c'est une autre façon d'être Le 15 août 2022 à 202342 Le 15 août 2022 à 202104 Le 15 août 2022 à 202009 Le 15 août 2022 à 201901 Le 15 août 2022 à 201816 Le 15 août 2022 à 201654 Le 15 août 2022 à 201616 Le 15 août 2022 à 201244 Le 15 août 2022 à 201059 Apprend à cultiver des fruits et légumesÇa peut toujours servir d'avoir la main verte LolIl n'a pas tort. S'occuper en plantant des fruits et légumes, c'est pas mal long et ennuyant !C'est long ? Tant mieux, ça t'occupera. C'est ennuyant ? Au bout d'un moment, lorsque tu jouis d'un bien-être matériel, tu finis aussi par t'ennuyer... il faut s'y habituer d'épouser la meilleure femme du monde est bien plus jouissive à mes yeux que de jardinerOue bah redescend alorsComment ça redescend ?Rien de ce qui ne vaut la peine en ce monde ne s'obtient sans effortBah en quoi ça contredit le fait que je vais epouser la femme la plus pure et belle Le 15 août 2022 à 202415 Le 15 août 2022 à 202154 Le 15 août 2022 à 202106 Le 15 août 2022 à 201901 Le 15 août 2022 à 201816 Le 15 août 2022 à 201654 Le 15 août 2022 à 201616 Le 15 août 2022 à 201244 Le 15 août 2022 à 201059 Apprend à cultiver des fruits et légumesÇa peut toujours servir d'avoir la main verte LolIl n'a pas tort. S'occuper en plantant des fruits et légumes, c'est pas mal long et ennuyant !C'est long ? Tant mieux, ça t'occupera. C'est ennuyant ? Au bout d'un moment, lorsque tu jouis d'un bien-être matériel, tu finis aussi par t'ennuyer... il faut s'y habituer d'épouser la meilleure femme du monde est bien plus jouissive à mes yeux que de jardinerComme le sentiment de bien-être, la jouissance est éphémère. C'est pour cela qu'il faut se focaliser sur des choses essentielles. Bah elle durera autant de temps que j'aurai ces biens non ?Il est probable que tu en finisses las. Franchement j'espère pas et je doute fort Le 15 août 2022 à 202234 Le 15 août 2022 à 202134 Le 15 août 2022 à 202046 Le 15 août 2022 à 201851 Le 15 août 2022 à 201800 Le 15 août 2022 à 201648 Le 15 août 2022 à 201624 Le 15 août 2022 à 201517 Le 15 août 2022 à 195520 Le 15 août 2022 à 195407 Go te cultiver en attendant khey Livres, films, musiques, peu importe ce qui est ton dada J'ai chopé un problème au cerveau qui a détruit ma concentration/mémorisation donc c'est chaud Je serai guerit quand la période du 1er post entrera mais pour l'instant nonSans indiscrétion, de quel type de problème s'agit-il ? Sinon, un sport natation, football ou combat. Ca n'a aucun nom car je suis le seul au monde a souffrir de ça Ah, dommage. Je n'avais pas cerné le te promets que je ne troll absolument pas mec, j'aimerais bien te l'expliquer mais ça va me decridibiliserJ'ai le bon soupçon donc je vais te croire, est-ce que tu peux donner plus de détails ? Je ne jugerai pasEn gros j'ai prié Dieu pour guerir d'une maladie incurable TDAH et je suis presque guerit sauf que ca s'est pas passé comme prévuÇa se guérit un TDAH ? wtfNon c'est incurable mais Dieu a fais un miracle me concernant ! Voila pourquoi j'ai dis que j'ai peur d'être decridibiliserJe suis moi-même croyant, donc il y a peu de chance que tu te décrédibilises, et quand bien même, osef khey. Le 15 août 2022 à 202418 Le 15 août 2022 à 202234 Le 15 août 2022 à 202134 Le 15 août 2022 à 202046 Le 15 août 2022 à 201851 Le 15 août 2022 à 201800 Le 15 août 2022 à 201648 Le 15 août 2022 à 201624 Le 15 août 2022 à 201517 Le 15 août 2022 à 195520 Le 15 août 2022 à 195407 Go te cultiver en attendant khey Livres, films, musiques, peu importe ce qui est ton dada J'ai chopé un problème au cerveau qui a détruit ma concentration/mémorisation donc c'est chaud Je serai guerit quand la période du 1er post entrera mais pour l'instant nonSans indiscrétion, de quel type de problème s'agit-il ? Sinon, un sport natation, football ou combat. Ca n'a aucun nom car je suis le seul au monde a souffrir de ça Ah, dommage. Je n'avais pas cerné le te promets que je ne troll absolument pas mec, j'aimerais bien te l'expliquer mais ça va me decridibiliserJ'ai le bon soupçon donc je vais te croire, est-ce que tu peux donner plus de détails ? Je ne jugerai pasEn gros j'ai prié Dieu pour guerir d'une maladie incurable TDAH et je suis presque guerit sauf que ca s'est pas passé comme prévuÇa se guérit un TDAH ? wtfNon c'est incurable mais Dieu a fais un miracle me concernant ! Voila pourquoi j'ai dis que j'ai peur d'être decridibiliserCasse pas les couilles le TDAH c'est pas une maladie c'est une autre façon d'êtreBien sûr que si c'est une maladie Il manque des bouts de cerveau cortex prefontal et le cerveau est plus petit et j'en passe Une vrai catastrophe destructrice cette maladie Le 15 août 2022 à 202539 Le 15 août 2022 à 202342 Le 15 août 2022 à 202104 Le 15 août 2022 à 202009 Le 15 août 2022 à 201901 Le 15 août 2022 à 201816 Le 15 août 2022 à 201654 Le 15 août 2022 à 201616 Le 15 août 2022 à 201244 Le 15 août 2022 à 201059 Apprend à cultiver des fruits et légumesÇa peut toujours servir d'avoir la main verte LolIl n'a pas tort. S'occuper en plantant des fruits et légumes, c'est pas mal long et ennuyant !C'est long ? Tant mieux, ça t'occupera. C'est ennuyant ? Au bout d'un moment, lorsque tu jouis d'un bien-être matériel, tu finis aussi par t'ennuyer... il faut s'y habituer d'épouser la meilleure femme du monde est bien plus jouissive à mes yeux que de jardinerOue bah redescend alorsComment ça redescend ?Rien de ce qui ne vaut la peine en ce monde ne s'obtient sans effortBah en quoi ça contredit le fait que je vais epouser la femme la plus pure et belleJ'te dis juste que même si t'epouse une telle idée, ça sera juste pour te faire astiquer la nouille et ça te changera en rien Le 15 août 2022 à 202705 Le 15 août 2022 à 202418 Le 15 août 2022 à 202234 Le 15 août 2022 à 202134 Le 15 août 2022 à 202046 Le 15 août 2022 à 201851 Le 15 août 2022 à 201800 Le 15 août 2022 à 201648 Le 15 août 2022 à 201624 Le 15 août 2022 à 201517 Le 15 août 2022 à 195520 Le 15 août 2022 à 195407 Go te cultiver en attendant khey Livres, films, musiques, peu importe ce qui est ton dada J'ai chopé un problème au cerveau qui a détruit ma concentration/mémorisation donc c'est chaud Je serai guerit quand la période du 1er post entrera mais pour l'instant nonSans indiscrétion, de quel type de problème s'agit-il ? Sinon, un sport natation, football ou combat. Ca n'a aucun nom car je suis le seul au monde a souffrir de ça Ah, dommage. Je n'avais pas cerné le te promets que je ne troll absolument pas mec, j'aimerais bien te l'expliquer mais ça va me decridibiliserJ'ai le bon soupçon donc je vais te croire, est-ce que tu peux donner plus de détails ? Je ne jugerai pasEn gros j'ai prié Dieu pour guerir d'une maladie incurable TDAH et je suis presque guerit sauf que ca s'est pas passé comme prévuÇa se guérit un TDAH ? wtfNon c'est incurable mais Dieu a fais un miracle me concernant ! Voila pourquoi j'ai dis que j'ai peur d'être decridibiliserCasse pas les couilles le TDAH c'est pas une maladie c'est une autre façon d'êtreBien sûr que si c'est une maladie Il manque des bouts de cerveau cortex prefontal et le cerveau est plus petit et j'en passe Une vrai catastrophe destructrice cette maladieÇa vient de quoi ? wtf DébutPage précedentePage suivanteFin Victime de harcèlement en ligne comment réagir ?

c est en se plantant qu on devient cultivé